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Une vérité scientifique peut-elle être dangereuse ? (Bac philo - TES)

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Introduction   Si la vérité peut être considéré comme de l'ordre d'une connaissance théorétique, comment une vérité théorique pourrait être dangereuse en soi ? Ne faut-il pas passer dans l'ordre de la pratique pour que la vérité puisse acquérir une puissance effective qui la rende dangereuse ? Le vrai n'est-il pas inoffensif car purement tourné vers la  contemplation désintéressée de l'Idée ? Mais, ne dit-on pas que l'on peut mourir de la révélation de certaines vérités... Il faut donc questionner l'effectivité de la vérité, la puissance qu'elle possède de modifier le réel. Plus précisément, il faut se savoir en quoi, et pour qui, elle pourrait être dite dangereuse, néfaste. Mais, si la vérité scientifique peut être dangereuse, est-ce seulement dans l'effectuation de celle-ci, c'est-à-dire dans le fait de la dire, ou encore dans celui de l'instrumentaliser au service d'autres intérêts (idéologiques, techniques, économiques...) ? Ou peut-on dire que la vérité peut être dangereuse en soi, qu'il y a un aspect dangereux de la vérité qui se trouve au coeur de la connaissance elle-même, avant même que celle-ci n'acquiert un caractère politique ou technique ?

« Une vérité scientifique peut-elle être dangereuse ? (Bac philo 2010 - TL) Introduction Si la vérité peut être considéré comme de l'ordre d'une connaissance théorétique, comment une vérité théorique pourrait être dangereuse en soi ? Ne faut-il pas passer dans l'ordre de la pratique pour que la vérité puisse acquérir une puissance effective qui la rende dangereuse ? Le vrai n'est-il pas inoffensif car purement tourné vers la contemplation désintéressée de l'Idée ? Mais, ne dit-on pas que l'on peut mourir de la révélation de certaines vérités... Il faut donc questionner l'effectivité de la vérité, la puissance qu'elle possède de modifier le réel.

Plus précisément, il faut se savoir en quoi, et pour qui, elle pourrait être dite dangereuse, néfaste.

Mais, si la vérité scientifique peut être dangereuse, est-ce seulement dans l'effectuation de celle-ci, c'est-à-dire dans le fait de la dire, ou encore dans celui de l'instrumentaliser au service d'autres intérêts (idéologiques, techniques, économiques...) ? Ou peut-on dire que la vérité peut être dangereuse en soi, qu'il y a un aspect dangereux de la vérité qui se trouve au coeur de la connaissance elle-même, avant même que celle-ci n'acquiert un caractère politique ou technique ? Première partie : N'est-ce pas en raison du caractère politique de la vérité que celle-ci peut être dangereuse ? - Si la vérité peut être dangereuse, pour qui le sera-t-elle ? Dire la vérité, n'est-ce pas un acte risqué ? N'y a-t-il pas dans la parole vraie une prise de risque, qui engage son énonciateur ? Platon montre comment l'exigence de vrai qui fournissait le fil conducteur de la vie de Socrate a conduit à sa condamnation à mort, sous l'accusation d' « impiété » (L'Apologie de Socrate).

La vérité expose ainsi celui qui la découvre ou qui la répand à de possibles représailles (exemple : procès de Giordano Bruno).

Comment expliquer ce caractère dangereux de la vérité, et d'abord pour celui qui l'énonce ? C'est que la vérité, si elle se trouve fondée par une connaissance théorique, qu'elle résulte d'une « attitude théorétique » (Husserl) et contemplative, conduit à « n'admettre sans questions aucune opinion donnée d'avance, aucune tradition » (Husserl, « La crise de l'humanité européenne et la philosophie », in La crise des sciences européennes et la philosophie, Tel Gallimard, 1976, pp.

347-385 ; p.367).

L'attitude théorétique, en tant qu'elle remet en question les traditions et les normes établies, s'engage donc sur l'arène politique, entraînant un « combat » « dans la sphère de la puissance politique » entre les « conservateurs, que satisfait la tradition, et le cercle des hommes philosophiques » (ibid., p.369), lesquels, en Grèce, incluent les scientifiques (les sciences étant des branches de l'attitude théorétique générale qui fonde la philosophie).

C'est donc le caractère politique de la vérité qui explique qu'elle puisse être dangereuse à celui qui la profère : énoncer la vérité comporte toujours une prise de risque (Zola qui risque sa réputation, déjà établie, en défendant un juif inconnu, A.

Dreyfus). - La vérité peut donc acquérir un caractère dangereux lorsqu'elle est transférée du terrain proprement spéculatif (celui de l'attitude théorétique) au terrain pratique, celui de l'histoire et de la politique.

Ce transfert est inévitable, au sens où la mise en question des normes traditionnelles par l'attitude théorétique induit nécessairement un conflit entre les philosophes et l'ordre établi.

Qu'il soit inévitable ne signifie pas qu'il ne soit pas problématique : passer de la théorie à la praxis, c'est-à-dire donner de l'effectivité aux idées, est un problème indissolublement philosophique et politique, auquel Marx répond en opposant à l'idéalisme allemand une philosophie matérialiste, qui vise non pas à « interpréter » le monde, mais à « le transformer » (IXe Thèse sur Feuerbach – publié avec L'Idéologie allemande, ou dans vol.

III des OEuvres de Marx, éd.

La Pléiade).

La théorie, les idées, doivent s'emparer des masses : substituer « la critique des armes » aux « armes de la critique » (cf.

par ex.

Etienne Balibar, La philosophie de Marx, La Découverte, coll.

Repères, 2001, p.24).

La vérité acquiert ici un caractère dangereux en devenant praxis effective : la théorie n'est plus conçue ici comme une connaissance désintéressée, purement spéculative, mais comme productive d'effets réels, au service d'une stratégie politique déterminée (cf.

Foucault qui veut écrire des livres qui ne soient pas seulement des « boîte à outils », des idées qui puissent être utilisées par d'autres acteurs sociaux, mais des « livres-bombes », dont les idées ne puissent être utilisées qu'une fois, afin d'éviter toute instrumentalisation de celles-ci - M.

Foucault, « Dialogue sur le pouvoir », texte n°221 des Dits et Ecrits (tome III), 1978, pp.464-477). Deuxième partie. »

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