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On parle souvent de la relativité de la connaissance scientifique. Que pensez-vous de cette expression ?

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« VOCABULAIRE: CONNAÎTRE / CONNAISSANCE: 1.

— Être familier de quelqu'un ou quelque chose.

2.

— Discerner, distinguer quelque chose : « Le premier et le moindre degré de connaissance, c'est d'apercevoir » (CONDILLAC) 3.

— Posséder une représentation de quelque chose, en part.

une représentation exacte.

4.

— Connaissance: a) Acte par lequel un sujet s'efforce de saisir de saisir et de se représenter les objets qui se présentent à lui.

b) Résultat de cet acte. Il y a un contraste frappant entre l'idée que se fait l'opinion courante et celle que porte le monde savant luimême sur la valeur de la connaissance scientifique.

Rien n'est moins scientifique, aux yeux des savants, que l'aveugle confiance des ignorants en ce qui est « scientifiquement établi ».

Il n'est point de savant qui prétende que la science puisse atteindre à la certitude absolue et tous admettent la « relativité » de la connaissance scientifique. Mais ce mot recouvre, selon les uns ou les autres, un sens très différent.

On peut, en effet, entendre d'abord par cette expression le fait que la science n'est pas achevée et qu'elle ne pourra jamais l'être.

L'expression peut signifier aussi que, même dans le domaine où la science est la plus avancée, elle n'est qu'une « connaissance approchée ». Mais, par cette expression, certains veulent mettre en question la portée même de cette connaissance, considérant toutes les propositions et surtout les théories scientifiques comme des assertions ou des constructions toujours provisoires; la science est sans valeur théorique, elle ne nous fait pas connaître le réel, elle n'est qu'un ensemble de recettes pratiques qui réussissent; quelques-uns parmi eux vont même jusqu'à déclarer que comme connaissance la science a fait faillite.

D'autres reconnaissent le caractère relatif de la connaissance scientifique, mais le relativisme de la science est pour eux, en revanche, le moteur du progrès scientifique, qui implique d'incessantes rectifications dans tout l'édifice, la connaissance absolue n'étant en quelque sorte que le point asymptotique dont la science se rapproche par la suite indéfinie de ses réajustements. La première chose à remarquer, c'est que les épistémologues, qui sont le plus souvent les savants eux-mêmes réfléchissant sur leur propre science, ont surtout exercé leur examen critique sur les sciences les plus avancées, mathématiques et sciences physiques, et leurs conclusions ne valent pas toutes pour la biologie et les sciences humaines.

Il importe, en effet, de distinguer des niveaux de science et des phases de développement.

On admet, au moins schématiquement, que toute science part de la description et de la classification, passe, grâce à l'observation et à l'expérimentation, de l'établissement des faits à la découverte des lois, s'élève ensuite aux théories et à la déduction pour aboutir à une axiomatisation, qui formalise le savoir, c'est-à-dire lui confère le maximum de rigueur logique'.

Or, c'est précisément sur le caractère provisoire des théories scientifiques et sur leur caducité qu'on s'est généralement appuyé pour parler du relativisme de la science, voire pour proclamer, comme le critique littéraire Brunetière, sa faillite. Cette construction des théories, qui correspond à la troisième phase dans l'avancement d'une science, consiste dans la découverte du principe ou loi générale, de laquelle peuvent être déduites mathématiquement les lois particulières, comme de celles-ci se déduisent les faits, l'édifice scientifique formant des faits aux lois et des lois au principe de la théorie, comme une vaste pyramide.

Ainsi la loi de la chute des corps, la révolution de la terre autour du soleil, sa rotation sur elle-même, les phases de la lune, les mouvements des marées, etc., se déduisent du principe newtonien de la gravitation universelle. Toutefois, cet indéniable progrès ne saurait achever la connaissance, et un des faits les plus manifestes de l'histoire des sciences, c'est la rapidité avec laquelle les théories se succèdent.

C'est sans doute en raison de cette précarité que de nombreux savants, à la suite du physicien autrichien Ernst Mach, admettent que la fonction d'une théorie est uniquement de réaliser une synthèse conforme au principe de l'économie de pensée, en substituant à un grand nombre de lois séparées un petit nombre de propositions, qui en assurent la coordination et la condensation.

Citons, outre la théorie de la gravitation, celle de la mécanique ondulatoire, qui tend à embrasser aussi bien la théorie corpusculaire que la théorie de l'ondulation dans une explication globale de tous les phénomènes optiques.

Parmi ces savants, on retiendra surtout le physicien français Duhem, qui ajoute à cette représentation économique des lois expérimentales la classification de ces lois.

Mais les théories ne sauraient « nous révéler la véritable nature des choses; ce serait, dit-il, une prétention déraisonnable ».

La célèbre École de Vienne, avec Schlick, Hans Reichenbach, Rudolf Carnap, etc., dont les idées connurent une grande vogue dans l'entre-deux-guerres, a repris cette conception, cherchant seulement à lui donner une extrême rigueur logique, bornant la tâche de la science à la coordination des énoncés par lesquels nous exprimons les phénomènes, c'est-à-dire notre expérience relative des choses ou, en d'autres termes, limitée à nos moyens humains de connaissance. On a taxé cette conception de nominalisme scientifique, en ce sens que la science se réduirait à l'établissement des rapports entre les mots ou noms par lesquels nous désignons les choses.

Condillac, au XVIII siècle, avait déjà dit qu'une science bien traitée n'est qu'une langue bien faite.

Dès lors, si une théorie a seulement « pour but de représenter aussi simplement, aussi complètement et aussi exactement que possible un ensemble de lois expérimentales (Duhem) », on l'abandonnera dès que de nouvelles découvertes en rendront une autre plus utile.

La théorie n'a pas de valeur de connaissance et son rôle final n'est que de faire des lois des recettes d'un emploi plus pratique.

La connaissance scientifique ne vaut que parce qu'elle soumet la nature à nos ordres. S'il est indiscutable qu'une des fonctions de la théorie est de réaliser une économie de la pensée et de constituer une classification des lois, s'ensuit-il qu'elle n'en ait pas d'autre ? Il est difficile déjà d'admettre que la connaissance scientifique ne soit qu'un ensemble de gestes et de formules qui réussissent on ne sait ni pourquoi ni comment, et que la science ne se distingue de la magie et de la sorcellerie que par son constant succès.

Mais surtout le nominalisme scientifique se heurte à des objections sans doute décisives. Tout d'abord, dans la perspective de cette conception pragmatiste, comment est-il possible d'expliquer que la théorie ait un pouvoir heuristique, c'est-à-dire de découverte ? L'exemple de Leverrier, qui, à partir des perturbations de la planète Uranus et se fondant sur la théorie de la gravitation, découvrit Neptune par le calcul,. »

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