Analyse linéaire Marivaux, La Fausse suivante, scène 3, acte III
Publié le 01/03/2023
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Analyse linéaire Marivaux, La Fausse suivante, scène 3, acte III
Introduction
Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, dit Marivaux, est né à Paris en 1688 dans une
famille de petite noblesse, et meurt en 1763 des suites d'une pleurésie, maladie de la plèvre.
Marivaux était un écrivain, journaliste et dramaturge français du XVIIIème siècle.
Inscrit à la
Faculté de droit à Paris en 1710, il préfère à ses études la fréquentation des salons célèbres
(Mme de Lambert et Mme de Tencin) où il découvre la préciosité*.
Auteur principalement de pièces de théâtre, inspiré par la commedia dell'arte, Pierre de
Marivaux écrit surtout pour la Comédie-Française et la Comédie-Italienne.
De plus, l’un des
personnages de la scène étudiée, Lélio est un personnage de la commedia dell’arte.
Ses pièces de théâtres remportent pour certaines un grand succès populaire : La Surprise
de l'amour en 1722, La Double inconstance en 1723, Le Jeu de l'amour et du hasard (1730)
et Les Fausses confidences (1737) en sont quelques exemples.
Il y est le plus souvent question d'amours légères, ce que l'on appellera plus tard le
marivaudage.
Cependant, à cette apparente légèreté s'ajoute dans ses pièces une subtile
critique des inégalités sociales, comme L'île des esclaves (1725) ou La Colonie (1750),
Marivaux étant un écrivain des Lumières.
Ce mouvement intellectuel du XVIIIème siècle se
fonde sur la raison, indispensable pour lutter contre l’intolérance et accéder au bonheur, à la
connaissance et à la liberté.
La scène étudiée provient de La Fausse suivante, publiée en 1724.
Dans cette comédie en
trois actes écrite par Marivaux, il y est mis en scène une “demoiselle de Paris" qui, pour
connaître le caractère et les sentiments de l’homme qu'elle doit épouser, Lélio, se déguise
en chevalier et se lie d’amitié avec lui.
Ainsi, elle découvre qu’il est d’ores et déjà engagé et
qu’il veut tout de même se marier avec la “demoiselle de Paris” pour sa fortune.
Dans cette
scène (3, III), Lélio, qui soupçonne le Chevalier d’être une femme, cherche à le demasquer
en le provoquant en duel.
*La préciosité est un mouvement et une mode littéraire française du XVIIᵉ siècle visant à
raffiner les mœurs et la langue française.
Problématique
Comment Marivaux met-il au service le travestissement pour découvrir la vérité (sur les
sentiments des autres) ?
Partie 1: Mise en place du piège de Lélio / résistance du chevalier
Répliques
Analyses
Interprétations
Réplique 1 : Lélio
verbe à l’impératif
ordre de Lélio au chevalier
Dès la première réplique, Lélio ne laisse pas
le choix à son interlocuteur, il s’impose.
Cependant c’est une indication sèche qu’il
adresse au Chevalier, cela pose un cadre sur
le caractère du personnage.
Il ne semble pas
vouloir s’exprimer davantage.
“Suivez-moi”
Réplique 2 : Le chevalier
“ Lui tâtant le pouls.
Voilà
un pouls qui dénote un
transport au cerveau; Il
faut que tu aies reçu un
coup de soleil ”
stichomythie
didascalie “lui tâtant le pouls”
Le comique (de geste) est déjà amené par
cette didascalie, il ne le prend pas au sérieux.
présentatif “Voilà”
verbe “dénote”
Le Chevalier a fini son auscultation, il
annonce les symptômes et la cause du
“transport au cerveau” de Lélio.
Il se prend
pour un médecin.
marque du subjonctif
“il faut que tu aies”
Forme verbale qui laisse sous-entendre que
sans ça Lélio n’aurait pas proposer une chose
pareille.
Pour Le Chevalier, cela semble tout à
fait absurde.
Référence ou lien (peut-être) au Malade
Imaginaire, les Diafoirus tâtent le pouls
d’Argan (acte II, scène 6)
Réplique 3 : Lélio
“point de”
“ Point tant de raisons;
suivez-moi, vous dis-je ”
Négation absolue, son propos n’a donc pas
été influencé par ce “coup de soleil”.
impératif
Il souhaite encore s’imposer, il donne le
même ordre que le précédent.
forme “vous dis-je”
Forme qui appuie son propos, le Chevalier n’a
pas le choix que de le suivre.
adverbe de temps “encore”
nom commun “coup”
Il continue dans son idée du coup de soleil
reçu et de son épisode de délire.
D’après lui,
il n’y a pas d’autres raisons que celle-ci pour
que Lélio lui propose cela.
tutoiement, langage familier
“va te coucher”
Cette fois-ci, c’est lui qui ordonne son
interlocuteur.
plusieurs virgules
“mon ami”
Marquent les étapes de “l’analyse” du
Chevalier, qui finit par une marque amicale.
Elle veut le calmer.
Réplique 4 : Le chevalier
“ Encore un coup, va te
coucher, mon ami ”
Réplique 5 : Lélio
comparaison
“ne” explétif
“si”
Il donne un ordre mais avec une condition et
une conséquence.
Si le Chevalier ne suit pas
son instruction, alors il sera considéré comme
“lâche” aux yeux de Lélio.
Réplique 6 : Le chevalier
didascalie “avec pitié”
“ avec pitié.
Pauvre
homme ! Après ce que tu
me dis là, tu es moins
heureux de n’avoir plus le
bon sens ”
Il avance toujours dans son idée de “coup de
soleil” et de “transport au cerveau”.
Voir ainsi
Lélio lui fait pitié.
Interjection
Renforce la comédie de la scène mais aussi
le côté tragique de cette situation, cette
réplique.
Le chevalier tente tant bien que mal
de tromper Lélio en lui faisant croire qu’il est
atteint d’un épisode de délire.
négation partielle avec
“n’avoir plus”
Encore une fois le Chevalier plaint Lélio de
son état.
Il paraît malheureux aux yeux du
Chevalier.
De son point de vue, Lélio n’a plus
toute sa tête et ça serait pourquoi il lui
proposerait de le suivre sans cesse.
“Oui” mot affirmatif
Réponse sèche qui renvoie au caractère du
personnage, il ne cherche ni à nier, ni à
affirmer les propos du Chevalier.
Il n’y
accorde aucune importance.
Comparaison dévalorisante
Il compare le Chevalier à une femme en le
décrivant tel un peureux, un lâche.
Il
comprend que le chevalier essaye de
détourner son attention pour ne pas avoir à se
battre.
Seulement cela ne fait que renforcer
les soupçons de Lélio sur la vraie nature de
son “ami”.
Lélio est un homme misogyne.
Réplique 8 : Le chevalier
aparté
“ à part.
Tenons ferme.
(à
Lélio) Lélio, je vous crois
malade; tant pis pour
vous si vous ne l’êtes
pas.
“
Il s’encourage à tenir bon, il ne faut surtout
pas qu’il le suive.
Le Chevalier se doit de
continuer à jouer le jeu.
“Lélio”
Pour la première fois il s’adresse à lui par son
prénom, marque la rupture entre l’aparté et le
dialogue avec Lélio.
“crois malade”
Il lui annonce clairement ce qu’il pense quant
à son état actuel.
marque du regret
“tant pis pour vous”
Cependant, il lui dit juste après que ce n’est
pas grave s’il ne l’est pas mais que c’est
dommage pour lui.
Sous entendrait-il que
Lélio serait de nature comme ça ? Que cela
n’est pas causé par un coup de soleil ? Et
qu’ainsi le chevalier considérait Lélio comme
un homme vivant constamment dans un
épisode de délire ?
“ Je vous regarde comme
un lâche si vous ne
marchez ”
Réplique 7 : Lélio
“ Oui, vous êtes aussi
poltron qu’une femme ”
vouvoiement
Elle commence à adopter une stratégie, elle
prend de la distance.
Réplique 9 : Lélio
“ avec dédain.
Je vous
dis que vous manquez de
cœur, et qu’une
quenouille siérait mieux à
votre côté qu’une épée.
”
didascalie “avec dédain”
verbe “manquez”
“quenouille”
Réplique 10 : Le chevalier répétition du nom “quenouille”
“ Avec une quenouille,
mes pareils vous
battraient encore ”
possessif “mes pareils”
Réplique 11 : Lélio
En avançant qu’un bâton, auquel on attache
de la laine, serait plus adapté qu’une épée
pour ce chevalier, il bafoue son honneur de
combattant.
Il a donc pour idée de rabaisser
le chevalier à une femme.
Lélio a une version stéréotypée des sexes.
Elle attaque parce qu’elle se sent blessée
dans son amour propre.
Réplique ironique,
forme de comique.
Elle est sûre d’elle, reprend confiance.
Message caché pour le public, émancipation
de la femme.
Réplique féministe.
La femme reprend ses
droits.
“Oui” mot affirmatif
Une affirmation qui ne vise pas réellement à
être d’accord avec les propos du chevalier.
Il
dit cela seulement dans le but de sousentendre sa compréhension sans pour autant
y adhérer.
complément circonstanciel de
temps
Il donne des indications pour faire en sorte de
démasquer le Chevalier et de l’amener avec
lui.
Mais il rabaisse aussi les camarades du
Chevalier.
Il pourrait le battre mais seulement
“dans une ruelle”.
Il la rabaisse et la
provoque.
“ Oui, dans une ruelle ”
Réplique 12 : Le chevalier adverbe “Partout.”
“ Partout.
Mais ma tête
s’échauffe; vérifions un
peu votre état.
Regardezmoi entre deux yeux; je
crains encore que ce ne
soit un accès de fièvre,
voyons.
(Lélio le regarde)
Oui, vous avez quelque
chose de fou dans le
regard et j’ai pu m’y
Lélio ne semble pas essayer de comprendre
ce que dit le chevalier.
Pour lui, ce ne sont
que des propos absurdes sortant de la
bouche d’un lâche ne souhaitant pas le
suivre.
Il lui affirme de but en blanc qu’il manque de
courage et ainsi il remet en cause....
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