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Quelle différence profonde faites-vous entre une tragédie et une comédie ?

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« Introduction : a) Le fait de dire, pour expliquer l'échec de Dom Garcie de Navarre, que Molière n'avait pas le génie tragique, ou que telle de ses comédies (L'Avare, L'Ecole des Femmes, Dom Juan, Le Misanthrope), touche a la tragédie, montre bien qu'on distingue d'emblée une tragédie dune comédie. b et c) Le problème est plus difficile s'il s'agit de préciser la nature de cette différence. I.

— Ce qu'elle n'est pas : Elle ne réside, en effet, comme on se risque souvent à le dire... a) ni dans une différence de sujet : L'Avare et Mithridate ont des sujets fort voisins; : un père amoureux de la même femme que son (ou ses) fils; b) ni dans une différence de tonalité, l'une faisant rire, l'autre pleurer, car il y a...

Tous les degrés du rire et des larmes.

Il existe, à la limite, des tragédies où l'on ne pleure pas, des comédies où l'on ne rit pas davantage. c) ni même dans une différence de perspective psychologique la tragédie peignant, dit-on, principalement des passions et la comédie, des caractères; • car derrière les passions de la tragédie, on est bien obligé, pour la vraisemblance, de camper des personnages ayant un caractère, un âge, un sexe, capables de « sous-tendre » cette passion; • de son côté, dans la comédie, le personnage à caractère si particulier doit avoir, lui aussi, ses passions : Harpagon est avare, monsieur Jourdain ambitieux. • On ne peut pas les différencier non plus par la qualité de ces passions, en disant qu'elles seraient bonnes socialement dans la tragédie, mauvaises socialement dans la comédie; car il y a de ces passions mauvaises chez Racine et de ces passions, sinon bonnes du moins anodines, (Le Distrait) ou ambivalentes, (Alceste) dans la comédie. • On ne peut même pas dire que, souvent, dans la comédie on peint un conflit entre le caractère et la passion, car dans la tragédie aussi on représente de tels conflits : Ruy Blas ambitieux, au fond, est également amoureux, mais l'amour l'emporte sur l'ambition. II.

— Ce qu'elle est en surface : Il faut donc chercher des différences plus essentielles.

En analogie avec les autres genres littéraires, on y verra d'abord une différence d'inspiration, et d'intention.

On énoncera cette évidence... a) que la tragédie fait tout pour rendre l'atmosphère plus tragique. Exemple de Mithridate : — Le choix de l'action : une lutte de l'homme contre son destin et pour une fidélité à une valeur qui donne un sens à sa vie.

Un enjeu terrible : une question de vie ou de mort, et qu'importe la mort, puisque la vie tragique est déjà pareille à la mort. — Le choix du héros : mi-coupable, mi-innocent, selon l'observation d'Aristote, pour qu'on puisse le craindre et avoir pitié de lui, car il est là pour me faire prendre conscience de mon destin d'homme, non que je risque de revivre exactement ses aventures mais, toutes proportions gardées, je puis courir des malheurs analogues. — Choix du rythme: : action tendue, précipitée soit dans le cadre étroit des trois unités classiques, soit dans l'engrenage d'un pari dans lequel j'ai jeté une liberté plus ou moins chancelante. b) Au contraire, la comédie fait tout pour rendre la pièce plus comique.

Exemple de l'Avare. — Les enjeux sont mesquins; personne ne songe à en mourir et personne n'en guérit. — Le personnage comique est psychologiquement et moralement inexistant.

Il est là ou pour me détendre du sérieux social, ou pour me faire prendre conscience de ma supériorité, ou pour me venger à peu de frais de mes « persécuteurs » sociaux. III.

— Ce qu'elle est en profondeur : Là encore, nous ne tenons que des procédés différents et des effets différents.

Mais quelles sont les causes de ces procédés et de ces résultats.

En quoi est-ce plus tragique ? en quoi plus comique ? A.

— Qu'y a-t-il, en effet d'effrayant dans le héros tragique ? C'est que, comme l'a bien vu Hegel : « Une souffrance vraiment. »

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