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NIETZSCHE: La science, croyance métaphysique en la vérité.

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On dit avec juste raison que, dans le domaine de la science, les convictions n'ont pas droit de cité : c'est seulement lorsqu'elles se décident à adopter modestement les formes provisoires de l'hypothèse, du point de vue expérimental, de la fiction régulatrice, qu'on peut leur concéder l'accès du domaine de la connaissance et même leur y reconnaître une certaine valeur (...). - Mais cela ne revient-il pas, au fond, à dire que c'est uniquement lorsque la conviction cesse d'être conviction qu'elle peut acquérir droit de cité dans la science ? La discipline de l'esprit scientifique ne commencerait-elle pas seulement au refus de toute conviction ?... C'est probable ; reste à savoir si l'existence d'une conviction n'est pas déjà indispensable pour que cette discipline elle-même puisse commencer. (...) On voit par là que la science elle-même repose sur une croyance ; il n'est pas de science sans postulat. NIETZSCHE1. Une idée admise : les convictions n'ont pas de place dans la science. - Explication : la science rejette toute opinion, c'est-à-dire toute croyance non démontrée, non vérifiée. Or la conviction est une opinion ferme. Elle ne peut donc être admise dans la science, sinon d'une manière provisoire, à titre d'hypothèse, de point de vue expérimental, de «fiction régulatrice», c'est-à-dire en n'étant plus posée comme véritable conviction (puisqu'elle est posée comme douteuse, non sûre).

« PREMIERE CORRECTION Ce texte est un extrait du Gai Savoir, œuvre de Friedrich Nietzsche où le philosophe expose son point de vue concernant les fondements de la science et étudie le rapport entre la vérité et les sciences, réfutant l'objectivité absolue accordée généralement à la science au XIXe siècle.

Ainsi, l'auteur assoit sa thèse en débutant avec cet à priori même : « […] dans le domaine de la science, les convictions n'ont pas droit de cité » mais il opère plus tard à un renversement, en posant la question de la nécessité de l'existence d'une conviction pour que l'entreprise scientifique existe. L'extrait s'achève avec la réponse – qui est à la fois critique – que donne Nietzsche : « il n'est pas de science sans postulat ». Afin d'expliquer l'analyse de Nietzsche, il convient de diviser sa critique en deux parties, la première posant la question du fondement des sciences à proprement parler, et la seconde consistant en une vision plus morale de la relation entre science et vérité : la science repose selon Nietzsche sur la croyance en l'absolue nécessité de la vérité.

Enfin, il convient de voir quelles sont les limites de la critique que réalise Nietzsche : la science a-t-elle une défense ? Un des problèmes philosophiques soulevé par l'auteur est la question du fondement de la science, c'est à dire des bases, des fondations, sur lesquelles repose l'édifice scientifique. Nietzsche commence son argumentation en reprenant un des éléments qui assurent l'objectivité de la science, c'est à dire à la capacité qu'à la science d'offrir des résultats dont la véracité est certifiée par des critères d'ordre logique, notamment dans les sciences hypothético-déductives comme les mathématiques, ou par des procédés rigoureux comme l'expérimentation scientifique, notamment dans les sciences du vivant.

Les convictions n'ont pas leur place dans la science, puisqu'il s'agit de croyances non-démontrées en une thèse, relevant d'un choix (une conviction est subjective) et dont on refuse la falsifiabilité, attribut nécessaire de toute thèse scientifique.

Le philosophe poursuit en affirmant que c'est seulement lorsque la conviction revêt l'habit de l'hypothèse qu'on peut lui « concéder l'accès du domaine de la connaissance ».

Une hypothèse, dans les sciences de fait, est une explication théorique et anticipée des faits qui nécessite la vérification de l'expérience pour être admise, tandis qu'il s'agit dans les sciences logiques – que Nietzsche appelle « fiction régulatrice » - d'une donnée à partir de laquelle on déduit selon la méthode de la démonstration des propositions équivalentes, qui permettent de vérifier ou d'infirmer l'hypothèse initiale.

Nietzsche ajoute qu'on peut même reconnaître une certaine valeur à ces hypothèses, dans la mesure où elles consistent en une orientation choisie de l'attention, comme le reconnaît aussi Claude Bernard dans son ouvrage Introduction à l'étude de la médecine expérimentale (1865) où le savant français déclare « Si l'on expérimentait sans idées préconçues, on irait à l'aventure ».

Cependant, l'auteur ajoute que faire revêtir l'habit de l'hypothèse à une conviction revient à se débarrasser de cette conviction, puisque l'hypothèse diverge de la conviction en ceci qu'elle est falsifiable : la conviction est incompatible avec la démarche scientifique qui est de supposer puis de vérifier, en ayant recours au doute méthodique comme le préconise Descartes : on refuse toute conviction, et plus généralement tout élément dont la véracité ne peut être prouvé. Mais cette réflexion amène au problème que soulève Friedrich Nietzsche dans les dernières lignes de cet extrait : si tout élément utilisé en science doit être démontré par une preuve, alors la preuve même doit obéir à la même règle et être donc démontrée en ayant recours à un autre élément ! Les liens que procure la démonstration dans les sciences hypothético-déductives sont absolus car ils obéissent à une logique rigoureuse, et il en va de même dans les sciences de fait, bien qu'à un degré inférieur, la certitude absolue ne pouvant être atteinte par le biais de l'expérimentation ; la science a donc une cohérence interne indéniable, mais un de ses points faibles soulignés ici par Nietzsche est son fondement : le tout premier élément a dû être défini et admis tel que.

Par conséquent, l'ensemble de la science est relative à ce premier postulat ! Ainsi, dans le domaine de la géométrie, 5 postulats qu'on retrouve dans Les Eléments, furent posés par Euclide il ya plus de deux mille ans : 1.

Un segment de droite peut être tracé en joignant deux points quelconques. 2.

Un segment de droite peut être prolongé indéfiniment en une ligne droite. 3.

Étant donné un segment de droite quelconque, un cercle peut être tracé en prenant ce segment comme rayon et l'une de ses extrémités comme centre. 4.

Tous les angles droits sont congruents. 5.

Si deux lignes sont sécantes avec une troisième de telle façon que la somme des angles intérieurs d'un côté est strictement inférieure à deux angles droits, alors ces deux lignes sont forcément sécantes de ce côté.. »

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