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La science nous livre-t-elle le réel tel qu'il est ?

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« On pourrait penser que le scientifique se contente de procéder à une accumulation de faits qu'il suffirait de constater, la réalité étant là, ne demandant qu'à être " cueillie ", comme si la science se ramenait à une observation ou à un constat.

Qu'en est-il vraiment ? D'un côté, si on considère que la science cherche à établir des vérités, elle doit bien nous conduire à saisir le réel tel qu'il est.

En effet, la vérité se définit bien comme l'adéquation de l'esprit et du réel.

Vous retrouvez ici la définition de la vérité comme adequatio réi et intellectu.

Le but de la science serait donc de nous livrer le réel tel qu'il est.

Pourtant, que faut-il entendre par réel ? Vous verrez vite que le scientifique ne se contente pas d'observer passivement la nature et ce qui l'entoure, car la science au contraire s'établit et ne progresse qu'en théorisant son objet plutôt qu'en se limitant à une simple collection de faits.

Ainsi, le fait scientifique, dit Bachelard, est-il construit et pas simplement donné.

Par exemple, lorsque le scientifique conduit une expérimentation en laboratoire, il a déjà formulé une hypothèse, ce qui revient à poser des questions à une nature qui, sans cela, resterait muette.

Le fait est donc mesuré, il est interprété, il est choisi, il est comparé et souvent opposé à des faits antérieurs (d'anciennes connaissances).

Le réel est donc toujours le produit de la conscience, ce qui n'exclut bien sûr pas l'objectivité de la connaissance.

Vous pouvez également vous reporter aux analyses de Kant dans la Critique de la raison pure.

Dans ce texte il nous montre que « nous ne connaissons des choses que ce que nous y mettons nous-mêmes ».

Que faut-il entendre par là ? Kant va ainsi montrer que connaître, c'est saisir à travers les catégories et les structures de notre esprit.

Par exemple, la connaissance suppose de déterminer l'objet à connaître comme cet objet.

Connaître suppose de saisir dans l'espace et dans le temps qui sont des structures de notre esprit des « formes a priori de la sensibilité ».

Cela signifierait que nous ne connaissons pas les choses en elles-mêmes, les choses en soi mais des phénomènes.

Comment alors peut-on encore parler de vérité au regard de la définition que nous avons énoncée ? [L'essence même de toute activité scientifique est de parvenir à l'objectivité, donc de décrire le réel tel qu'il est.] Science, objectivité et mathématisation du réel « Ce qui est objet de science existe de toute nécessité et a, par suite, un caractère éternel», écrit Aristote dans l'Éthique à Nicomaque.

Qu'est-ce qui est nécessaire et à la fois éternel? Le réel.

Non celui que je perçois et qu'autrui perçoit d'une autre manière, mais celui dont seule la science est capable de rendre compte, celui qui obéit à des principes rationnels intangibles.

Galilée dira à la suite d'Aristote que: "La nature est écrite en langage mathématique." Galilée est un savant du XVI ième siècle, connu comme le véritable fondateur de la physique moderne, et l'homme auquel l'Inquisition intenta un procès pour avoir soutenu que la Terre tournait sur elle-même et autour du soleil. Dans un ouvrage polémique, « L'essayeur », écrit en 1623, on lit cette phrase : « La philosophie [ici synonyme de science] est écrite dans ce très vaste livre qui constamment se tient ouvert devant nos yeux –je veux dire l'univers- mais on ne peut le comprendre si d'abord on n'apprend pas à comprendre la langue et à connaître les caractères dans lesquels il est écrit.

Or il est écrit en langage mathématique et ses caractères sont les triangles, les cercles, et autres figures géométriques, sans lesquels il est absolument impossible d'en comprendre un mot, sans lesquels on erre vraiment dans un labyrinthe obscur . » Dans notre citation, la nature est comparée à un livre, que la science a pour but de déchiffrer.

Mais l'alphabet qui permettrait de lire cet ouvrage, d'arracher à l'univers ses secrets, ce sont les mathématiques.

Faire de la physique, saisir les lois de la nature, c'est d'abord calculer, faire des mathématiques.

Galilée est le premier à pratiquer la physique telle que nous la connaissons: celle où les lois de la nature sont écrites sous forme d'équations mathématiques, et où les paramètres se mesurent. Pour un homme du vingtième siècle cette imbrication de la physique et des mathématiques va de soi, comme il semble évident que nous devons mesurer et calculer les phénomènes observés.

Pourtant, c'est une véritable révolution qui se manifeste dans ces lignes : elles signent la fin d'une tradition d'au moins vingt et un siècle. La tradition inaugurée par Aristote, et que Saint Thomas a christianisé au treizième siècle.

Pour comprendre la portée de cette révolution qui manifeste et renforce une véritable crise de civilisation, il faut d'abord exposer la vision du monde et des sciences qui prédominait jusqu'à Galilée. Koyré a magnifiquement résumé le changement du monde qui s'opère entre le XVI ième et le XVII ième : on passe du « monde clos à l'univers infini ». Pour les anciens, le monde était fini, comparable à une sphère, dont le centre était la Terre, immobile au centre du monde, et la circonférence les étoiles fixes.

L'espace est non seulement fini, clos, achevé, mais parfaitement ordonné. De plus, les anciens séparaient ce monde en deux zones : le supralunaire (au-dessus de la Lune), et le sublunaire (au-dessous de la Lune).

Ils croyaient que le monde supralunaire était parfait, immuable, car on. »

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