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Est-il légitime de parler d'une conscience de soi de l'humanité ?

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« Définition des termes du sujet: LÉGITIME: C aractère de ce qui est conforme à l'équité, aux principes supérieures du droit ou de la morale.

On oppose légitime et légal.

Ainsi, ce que prescrivent des lois despotiques ou racistes peut être légal sans être pour autant légitime cad conforme au droit naturel. La conscience vient du latin conscientia, qui signifie « accompagné » (cum) de « savoir » (scire).

Être conscient signifie donc que lorsque l'on sent, pense, agit, on sait que l'on sent, pense ou agit.

Mais il convient de distinguer la conscience directe ou immédiate, qui accompagne ainsi tous les actes du sujet, de la conscience réfléchie, conscience qui se saisit elle-même comme conscience.

La première consiste à « avoir conscience », tandis que la seconde consiste à « être conscient d'avoir conscience ».

Le passage de l'un à l'autre serait le fait de « prendre conscience ». La conscience est par définition réalité personnelle, interne, même si l'exercice de la pensée se fait avec les mots de tous et au contact d'autrui. C ependant la conscience de soi de chaque individu lui permet aussi de savoir qu'il est précédé, porté, humanisé par une culture collective qui le précède et qui le forme. 1.

LA DIMENSION COLLECTIVE DES PHÉNOMÈNES DE CONSCIENCE A - Cultures et conscience humaine ¦ Dans l'histoire de l'humanité, la conscience apparaît notamment lorsque des traces de rituels de funérailles manifestent une conscience de la mort.

C'est l'indice d'une différenciation fondamentale entre cadavres des animaux mangés et cadavres des semblables – et plus particulièrement le corps des proches : il est un certain lien entre rituels accompagnant les morts et culte des ancêtres. ¦ L'interdit de l'inceste n'est pas seulement la première règle culturelle qui différencie de la nature, ni l'occasion ou la nécessité des échanges interhumains ; il témoigne aussi d'une conscience de soi qui instaure des différenciations et des valeurs : « On n'est pas des bêtes ; on ne peut se permettre n'importe quoi ! » Différence des sexes et différence des générations sont ainsi constitutives de la conscience de soi, conditions de l'élaboration d'une subjectivité. ¦ L'extrême diversité des cultures humaines, constatable, est occultée par l'impression que sa propre culture est « naturelle », évidente, qu'elle est la norme de toute culture possible (ethnocentrisme). B - Les particularismes ¦ Le rejet de l'autre, non conforme, ou celui de l'autre culture, sont engendrés par cette conscience défensive qui se méconnaît elle-même et craint la différence – alors que c'est la différence et la différenciation qui font l'humanité comme telle. ¦ Le caractère distinctif de la barbarie est d'ailleurs, selon Lévi-Strauss, dans ce rejet de l'autre homme jugé sauvage (c'est-à-dire de la « forêt », encore animal) ou barbare.

Une civilisation est toujours constituée de multiples emprunts et tend à considérer la différence comme une ressource de l'humanité. Même si la régression à la peur de l'autre menace toujours. ¦ L'identité est donc individuelle mais formée dans et par des collectifs.

Une personne humaine n'est pas définie par ses racines – ce n'est pas un arbre et c'est sa liberté que de pouvoir aussi, éventuellement, s'éloigner de ses origines –, mais elle est entravée dans la construction de sa subjectivité si cette origine est déniée ou méprisée. 2.

LA RECONNAISSANCE DE L'HUMANITÉ COMME HUMANITÉ A - Les Lumières et l'universalité ¦ L'abolition de l'esclavage est réclamée par les penseurs des Lumières au XV IIIe siècle, au nom de la dignité universelle de l'être humain, conscient et libre. ¦ La notion de droits de l'homme naît historiquement dans cette logique et la première Déclaration universelle des droits de l'homme, en 1789, proclame les droits de l'homme et du citoyen : c'est la construction de la liberté politique qui permet d'accéder à la conscience d'une universalité humaine... ¦ Une éthique des droits de l'homme ne peut donc pas suffire.

Elle est aujourd'hui plus invoquée que jamais, mais on assiste en même temps à une banalisation du mal, à une prétendue fatalité du malheur économique (chômage et misère), et au resurgissement de certaines formes d'esclavage (travail ou prostitution des enfants). B - Semblables, différents, solidaires - ou déshumanisés et aliénés ¦ C onjuguer l'universalité humaine et le jeu des différences (culturelles, sexuelles, individuelles) est la première condition pour une conscience de soi de l'humanité qui soit à la fois claire et responsable. ¦ La mondialisation économique et la consommation font au contraire de toutes choses, y compris l'homme, une marchandise indifférenciée : l'uniformité radicale fait alors ressurgir exclusions et racismes, comme pseudo-défenses contre l'écrasement. ¦ L'unité du genre humain est au contraire à reconnaître dans la diversité de ses formes culturelles, et appelle le respect.

C 'est bien la reconnaissance mutuelle qui selon Hegel est requise pour la « pleine satisfaction de la conscience de soi ». CITATIONS: « Posséder le Je dans sa représentation : ce pouvoir élève l'homme infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivants sur la terre.

Par là, il est une personne.

» Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique, 1798. Dès le moment où l'enfant commence à parler de lui à la première personne — moment décisif et irréversible —, il se saisit lui-même comme sujet pensant et conscient.

C ette faculté de la conscience à se prendre elle-même pour objet, qu'on appelle la « réflexivité » de la conscience, fait de l'être humain une personne, c'est-à-dire, chez Kant, un sujet moral responsable constituant une fin en soi. C onscience : « C 'est le savoir revenant sur lui-même et prenant pour centre la personne humaine elle-même, qui se met en demeure de décider et de se juger.

» Alain, Définitions, 1953 (posth.) La conscience réfléchie, par laquelle chacun prend conscience de ses propres états de conscience, est aussi conscience morale.

Car, portant mon attention sur mes véritables intentions, je suis à même d'en examiner la rigueur et la valeur morales. « La seule façon d'exister pour la conscience c'est d'avoir conscience qu'elle existe.

» Sartre, L'Imagination, 1936. « Connais-toi toi-même.

» Maxime gravée au fronton du temple de Delphes.

C e précepte, devenu la maxime favorite de Socrate, prête au contresens.

En effet, il ne doit pas être interprété comme une invitation à l'introspection, mais comme la nécessité pour l'âme de connaître les valeurs d'après lesquelles elle se détermine. « La maxime "C onnais-toi toi-même", dans la bouche d'un dieu et adressée aux hommes, est presque une méchanceté.

» Nietzsche, Le Gai Savoir, 1883.. »

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