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Une théorie sans expérience nous apprend-elle quelque chose ?

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« VOCABULAIRE: EXPÉRIENCE: a) Sens courant (expérience vécue): instruction acquise par une longue pratique des choses (l'expérience de la vie).

b) Connaissance acquise par les données ou impressions des sens.

c) En science, observation méthodique et réfléchie de certains phénomènes, en vue de vérifier une hypothèse (synonyme d'expérimentation). CHOSE (n.

f.) 1.

— Désigne la réalité (res en latin : chose) en gén.

; cf.

DESCARTES : « chose pensante » (âme), « chose étendue » (matière). 2.

— Désigne la réalité, envisagée comme déterminée et statique, existant hors de la représentation ; en ce sens, KANT utilise l'expression « chose en soi ». 3.

— (Par ext.) À partir du sens 2, désigne la réalité inanimée, hors de son rapport à la pensée (le monde des choses). Rem.

: la chose se distingue de l'objet en ce que ce dernier est construit ; cela n'implique pas que la chose soit chose en soi ; ce qui est chose se constitue comme ce qui est maniable, ce qui est disponible ; autrement dit, l'objet se réfère à la pensée, la chose à l'action ; le monde des choses, c'est le monde qui se détermine dans la pratique, et y résiste ; à partir du sens 3, le réaliste confond volontiers la chose et l'objet (cf.

DURKHEIM : « Il faut considérer les faits sociaux comme des choses »).

4.

— Chosisme : attitude qui consiste à considérer la réalité comme une chose au sens 2. THÉORIE (n.

f., étym.

: grec theoria : vue d'un spectacle, contemplation, spéculation) 1.

— (Lato) Connaissance spéculative, abstraite, désintéressée, enchaînant des principes à des conséquences ; opposée à pratique.

2.

— Ensemble d'hypothèses gén.

visant à expliquer soit la totalité, soit une classe déterminée de phénomènes.

3.

— Ensemble d'hypothèses, d'opinions gén.

propres à un auteur.

4.

— Construction achevée d'une doctrine scientifique : « La théorie est l'hypothèse vérifiée après qu'elle a été soumise au contrôle du raisonnement et de la critique expérimentale » (Claude BERNARD). Introduction Nous percevons communément les sciences comme des outils au service d'une meilleure compréhension ou d'une domination plus efficace du monde qui nous entoure ; aussi une théorie sans lien avec l'expérience nous semble-t-elle souvent fantaisiste ou inutile.

Ce reproche est-il toujours justifié ? Une théorie sans expérience nous apprend-elle quelque chose? Pourquoi observer sans hypothèse, sans théorie, instruit-il peu? Pour analyser les enjeux de cette question, nous nous appuierons alternativement sur les deux volets de la fameuse phrase de Kant selon laquelle « un concept sans intuition est vide et une intuition sans concept est aveugle », en la transposant au niveau de la théorie et de l'expérience; nous étudierons enfin trois façons dont la théorie « pure » peut nous apprendre quelque chose. I.

Une théorie sans expérience est creuse ... La réponse la plus spontanée à la question est négative : une théorie sans expérience semble détachée de la réalité et, à ce titre, stérile. • Théorie ou rêverie? Une théorie sans expérience semble d'abord avoir un caractère arbitraire comme pour la rêverie, la déconnexion par rapport à l'expérience semble autoriser toutes les extravagances; une théorie sans expérience serait alors un système fictif, une « vue de l'esprit » qui ne nous apprend rien. • Validité et vérité Apprendre, c'est en effet acquérir de nouvelles connaissances; or une théorie sans expérience est une pure construction intellectuelle dont la seule qualité peut être la validité logique; pour parler de connaissance, il faut au contraire qu'il y ait un rapport entre des idées et un objet réel. • Une méthode intellectuelle? Que nous apprennent alors les mathématiques? Descartes les considérait comme une méthode intellectuelle qui fournit un modèle pour toutes les sciences expérimentales, l'intuition intellectuelle des « vérités mathématiques » tenant lieu d'expérience.

Mais l'apparition d'une infinité de systèmes géométriques ou algébriques possibles complique et enrichit à la fois la fonction des mathématiques. II.

...

mais une expérience sans théorie est aveugle Il semble donc difficile de parler d'une progression des « connaissances lorsqu'il s'agit de théories coupées de l'expérience. Il ne faudrait cependant pas penser que les connaissances sont purement dans l'expérience. • L'expérience ne précède pas la théorie L'épistémologie moderne, depuis Kant jusqu'à Bachelard, a bien montré qu'il n'est possible de parler de connaissance au sens véritablement scientifique que si l'observation est guidée par un système théorique qui permet de poser des questions pertinentes et de combiner les données de façon rigoureuse.

L'expérience ne nous apprend quelque chose que dans le cadre d'une théorie efficace.

La physique expérimentale met aujourd'hui en évidence des phénomènes prédits par la théorie il y a plus de cinquante ans. • L'expérience fait-elle autre chose que confirmer la théorie ? Et pourtant l'expérience n'a pas qu'une fonction passive de confirmation de ce que prédit la théorie.

Bien souvent elle permet de redresser ou d'affiner cette dernière, ou d'en réviser certaines parties : la connaissance progresse non seulement par l'organisation systématique d'un grand nombre de données au sein d'un système valide, mais également par le travail de révision imposé par les réponses surprenantes de l'expérience ou par la mise en évidence de phénomènes que la théorie actuelle ne permet pas d'expliquer.. »

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