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somme nous maître de nos penser

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« Se demander si nous sommes maîtres de nos pensées exige de s'interroger sur le type de maîtrise en question ainsi que sur ce qu'il faut entendre par le concept de « pensées ».

En effet, remarquons d'abord que la maîtrise peut concerner à la fois la formation des pensées (je peux penser ce que je veux), le maniement des pensées (je ne pense pas ce que je veux, mais à la limite j'en dispose librement) ou à leur expression (j'arrive à exprimer adéquatement mes pensées).

Les pensées sont elles-mêmes source de questionnement : pour Descartes, en effet, doute, volonté, conception de l'intelligence relèvent tous du domaine de la pensée.

Avec Freud, ce domaine s'étend aux pulsions et aux désirs qui hantent la conscience.

Afin de répondre à notre question, il est donc nécessaire de commencer par démêler cet écheveau conceptuel et de clarifier les termes du débat. I – Descartes : clarté et distinction de l'idée Dans les Méditations Métaphysiques, Descartes propose une certaine image de la conscience.

D'une part, la pensée est l'essence même de notre être : je suis, dit-il, une substance pensante.

Toutes les opérations qu'effectue la conscience – doute, volition, imagination, réflexion – relèvent du domaine de la pensée.

Or, la pensée ne souffre aucune obscurité et elle conduit in fine à la vérité. En effet, Descartes cherche à reconstruire l'édifice de son savoir sur des bases stables et vraies.

Pour cela, il remet toute chose en doute, la réalité extérieure, les enseignements des sens, son propre corps, etc.

Or, si une chose n'est pas douteuse dans l'expérience du doute, c'est le doute luimême.

Douter que l'on doute, c'est encore douter.

Dès lors, si quelqu'un doute, autrement dit pense, c'est qu'il existe une substance pensante : d'où le fameux « je pense donc je suis ». La pensée se trouve alors propulsée au premier rang : elle fonde le savoir lui-même dans son exercice.

Transparente, elle permet d'atteindre la vérité sans aucune place pour le doute.

En effet, elle seule met un terme au doute généralisé des Méditations.

Une fois atteinte, la vérité se montre d'ellemême.

Exemple typique, Descartes prendra pour critère du vrai la clarté et la distinction des idées : est vrai, ce que je conçois clairement et distinctement. Autrement dit, la maîtrise des idées est totale pour un sujet qui se définit d'abord comme substance pensante.

Cependant, qu'implique véritablement la démarche cartésienne ? II – Les déterminismes de la pensée La figure du cogito – cette conscience qui dit « je pense donc je suis » – est anhistorique et épistémologique.

Qu'est-ce que cela veut dire ? D'une part, qu'elle n'a pas de rapport avec l'histoire : chacun pourrait, selon Descartes, entreprendre de reconstruire son savoir sans se soucier de ce qui a eu lieu avant lui.

Cela veut dire, d'autre part, que le souci cartésien est celui d'une construction d'un savoir vrai (souci épistémologique), indépendant de ce qui l'a précédé. L'idée est de remarquer que la maîtrise des idées vraies provient d'une exigence d'auto-fondation : le sujet cherche en lui un germe de vérité, afin de garantir son savoir.

Cependant, peut-on si facilement évacuer la dimension propre à l'histoire, c'est-à-dire la tradition, mais aussi l'éducation.

Mes idées ne me sont-elles pas léguées d'une certaine manière par mes attaches socioculturelles ? On peut étendre la remarque en faisant appel à la pensée du psychanalyste Carl Gustav Jung.

Alors que pour Descartes mes idées sont pleinement maîtrisées, fruit de ma propre activité de réflexion en ma qualité de sujet pensant, Jung montre que la conscience humaine est traversée de part en part par ce qu'il appelle des archétypes. Les archétypes constituent une sorte d'imaginaire collectif, propre à une culture par exemple, et qui ne dépend pas des individus eux-mêmes.

Ils sont formés au sein d'une tradition et reçus à travers elle.

Ils constituent le fond de la conscience humaine avant même que celle-ci s'en rende compte. L'idée reprise est celle de l'inconscient mise en avant par Freud.

Ce qu'elle a d'original, c'est qu'elle permet d'insérer l'homme dans une culture, une tradition, c'est-à-dire un monde qui n'est pas neutre.

Alors que Descartes méditait et se retirait du monde, Jung nous permet de comprendre que nous sommes toujours déjà dans le monde. Cependant, l'idée subsiste que, si mes pensées puisent leur substance dans l'inconscient, je pourrais toutefois les maîtriser pleinement.

Est-ce le cas ?. »

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