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Réalité et théorie ?

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« Théorie: • Du grec theôria, « contemplation ».

La théorie, comme ensemble de connaissances, s'oppose ordinairement à la pratique, qui en est l'application.

Une théorie est un ensemble systématique de thèses. • En sciences, le problème est de déterminer si la théorie est dérivée des données expérimentales ou si elle requiert une rupture avec l'expérience et une reconstruction du réel. 1.

La théorie comme convention Dire que les théories dépendent de la sanction expérimentale laisse dans l'ombre la question de leur statut.

Qu'estce que nous soumettons à proprement parler à l'expérience ? Selon Pierre Duhem (La Théorie physique), nous ne faisons que lui soumettre des représentations conventionnelles ou commodes de la réalité.

Une théorie, dès lors, est destinée, selon l'expression antique, à sauver les phénomènes, c'est-à-dire à expliquer les apparences et non la réalité.

« L'accord avec l'expérience est, pour une théorie physique, l'unique critérium de vérité.

» Pierre Duhem, La Théorie physique, son objet, sa structure, 1906. 2.

Le réel est théorique C'est faire peu de cas des transformations que l'activité théorique fait subir au réel.

En parlant de phénoménotechnique, Bachelard (Le Matérialisme rationnel) désignait la production de phénomènes par la théorie physique.

Le monde sensible devient, non pas le modèle auquel toute théorie doit se conformer, mais l'image que nous nous en faisons au regard de notre développement théorique. Philosophe, épistémologue, critique littéraire, BACHELARD est tout autant un penseur, un savant qu'un poète.

Son oeuvre comporte deux versants : la réflexion sur les sciences et le poétique.

Pourquoi cette dualité au sein de son oeuvre ? tout simplement parce que, de l'aveu du philosophe, « un homme ne saurait être heureux dans un monde stérilisé ».

Ce qui signifie que l'esprit scientifique exige un véritable ascèse où l'esprit ne saurait trouver une satisfaction entière.

D'où le besoin de « recourir aux poètes » et de se mettre à « l'école de l'imagination ».

Ainsi, dans « La psychanalyse du feu », BACHELARD analyse de manière poétique les fantasmes liés au feu, dans leur joie brûlante.

Au même moment, dans « La formation de l'esprit scientifique : contribution à une psychanalyse de la connaissance objective » (1938), il s'applique à montrer comment les fantasmes constituent un obstacle à la connaissance scientifique.

C'est dans cet ouvrage qu'on peut lire : « En revenant sur un passé d'erreurs, on trouve la vérité en un véritable repentir intellectuel.

En fait on connaît contre une connaissance antérieure, en détruisant des connaissances mal faites, en surmontant ce qui, dans l'esprit même, fait obstacle à la spiritualisation.

» « Revenir sur un passé d'erreurs, trouver la vérité en un véritable repentir intellectuel », cela signifie d'abord que la connaissance scientifique ne se fait pas ex nihilo.

Elle se fait toujours « contre une connaissance antérieure », cad par la destruction « des connaissances mal faites » : « Face au réel, ce qu'on croit savoir clairement offusque ce qu'on devrait savoir.

Quand il se présente à la culture scientifique, l'esprit n'est jamais jeune.

Il est même très vieux, car il a l'âge de ses préjugés.

Accéder à la science, c'est spirituellement rajeunir, c'est accepter une mutation brusque qui doit contredire un passé.

» L'esprit scientifique ne peut donc se former que par une rupture radicale avec les préjugés et plus généralement avec tout ce que l'on croyait savoir. Pourquoi une rupture radicale ? Parce qu'on ne détruit pas les erreurs une à une facilement.

Elles sont solidaires, coordonnées.

L'erreur n'est pas simple privation ou manque, elle est une forme de connaissance.

L'esprit scientifique ne peut, selon une formule de BACHELARD, « se former qu'en se réformant », cad en détruisant l'esprit non scientifique. D'emblée, l'esprit scientifique est contraire à l'opinion, cad à la connaissance commune.

Fondée sur notre perception immédiate des choses ou sur l'ouï-dire, liée à notre tendance à ne retenir des choses que ce qui est utile à la vie, l'opinion est incertaine.

Elle ne peut donc qu'entraver la recherche de la vérité et le scientifique ne doit pas se contenter de la rectifier sur des points particuliers, il doit la détruire : « La science, dans son besoin d'achèvement comme dans son principe, s'oppose absolument à l'opinion.

s'il lui arrive, sur un point particulier, de légitimer l'opinion, c'est pour d'autres raisons que celles qui fondent l'opinion ; de sorte que l'opinion a, en droit, toujours tort. L'opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins en connaissances.

» Le scientifique doit même s'interdire d'avoir des opinions sur des questions qu'il ne comprend pas, sur des questions qu'il ne sait pas formuler clairement.

Car avoir une opinion, c'est déjà répondre avant même d'avoir trouvé la question.

Or ce qui caractérise avant tout l'esprit scientifique, c'est le sens du problème : « Avant tout, il faut savoir poser des problèmes.

Et quoi qu'on dise, dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'euxmêmes.

» Même une connaissance acquise par un effort scientifique n'est pas définitive et doit être questionnée.

Des manières de poser les questions, des habitudes intellectuelles qui furent utiles et saines à une époque, à un moment de l'évolution de l'esprit scientifique, peuvent, à la longue, entraver la recherche.

L'acquis ou ce qu'on croit acquis peut être un facteur d'inertie pour l'esprit. En fait, les crises de croissance de la pensée impliquent une refonte totale du système de savoir.

Il suffit, pour s'en convaincre, de citer par exemple : le passage de la théorie mécanique de Newton, qui était, pourtant, bien assise, à. »

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