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Quelle est la part du social dans la vie psychologique ?

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Auguste Comte a dit que l'individu séparé de la société est une abstraction ; la société est en effet le milieu naturel de l'homme, et il est devenu banal de rappeler la formule d'Aristote : « l'homme est un animal social », mais cette formule garde tout son sens et vaut pour tous les moments et toutes les manifestations de notre vie. Il est cependant assez difficile de discerner ce qui en nous est purement individuel et à partir de quel point nous sommes marqués de l'empreinte sociale ; mais il reste que tout en nous n'est pas réaction organique ou simple retentissement d'une telle réaction : tout ce qui est détermination proprement dite - sentiment ou idée - n'a pu venir enrichir notre individualité, incapable elle-même de se dépasser, que par la »vertu des influences sociales. Ce sont ces influences que nous allons chercher à montrer, par une rapide revue des principales fonctions de la vie psychologique.

« Quelle est la part du social dans la vie psychologique ? Auguste Comte a dit que l'individu séparé de la société est une abstraction ; la société est en effet le milieu naturel de l'homme, et il est devenu banal de rappeler la formule d'Aristote : « l'homme est un animal social », mais cette formule garde tout son sens et vaut pour tous les moments et toutes les manifestations de notre vie. Il est cependant assez difficile de discerner ce qui en nous est purement individuel et à partir de quel point nous sommes marqués de l'empreinte sociale ; mais il reste que tout en nous n'est pas réaction organique ou simple retentissement d'une telle réaction : tout ce qui est détermination proprement dite — sentiment ou idée — n'a pu venir enrichir notre individualité, incapable elle-même de se dépasser, que par la »vertu des influences sociales.

Ce sont ces influences que nous allons chercher à montrer, par une rapide revue des principales fonctions de la vie psychologique. Les psychologues eux-mêmes ont très bien vu que la vie affective avait pour ainsi dire deux plans, l'un individuel et l'autre social, qu'il était impossible de les discerner l'un de l'autre et que la psychologie des sentiments ne pouvait être vraiment explicative sans faire appel à des considérations sociologiques. La plupart de nos sentiments et de nos tendances sont susceptibles de se socialiser, c'est-à-dire de subir une adaptation sociale qui implique, selon Paulhan, « la régularisation des rapports de ces tendances avec les éléments sociaux, avec les individus, les groupes, les formes différentes de la vie sociale, l'ensemble même de cette vie et les éléments directeurs qui représentent cet ensemble ».

C'est ainsi, par exemple, que la tendance nutritive peut se socialiser dans les repas en commun, pour le plus grand profit de la sympathie, de l'amitié, de la politesse, de l'esprit de conversation et de la civilisation tout entière. De même l'instinct sexuel, qui, à son degré le plus bas est purement physiologique et se présente sous la forme d'un besoin ou d'un désir plus ou moins conscient, se transforme chez l'homme sous l'influence des oppositions de toutes natures qu'il a rencontrées dans, la vie civilisée.

« Des considérations de religion, de morale, d'hygiène, de convenance, d'utilité sociale, des habitudes, des traditions, des préjugés restreignent l'expression du désir, en arrêtent les manifestations, en suspendent même ou en refoulent l'aveu ». C'est encore la société qui développe les sentiments complexes les plus élevés, entre autres le sentiment sympathique au sens général de ce terme, c'est-à-dire la capacité de sentir à l'unisson d'une autre sensibilité.

Bien plus, si l'on accepte la thèse de Durkheim, la religion elle-même, dans son essence primitive, se confondrait avec le sentiment social ; elle ne serait rien d'autre, au point de départ, que l'aspect sous lequel la collectivité prendrait conscience de sa propre réalité comme telle.

Enfin le sentiment 'artistique, et le sentiment moral, avec toutes les notions qu'il implique (obligation, responsabilité, sanction), sont eux aussi façonnés et développés par la vie sociale. D'ailleurs les sociologues ne sont pas les seuls à proclamer la nécessité de telles explications, les psychologues, et Ribot en particulier, leur ont pour ainsi dire tendu la main.

Ainsi, dans sa Logique des sentiments, Ribot dit de son livre qu'il y traite « une question de psychologie, individuelle en apparence, mais tout autant collective, puisque les groupes humains se forment et se maintiennent par la communauté de croyances, d'opinions, de préjugés, et que c'est la logique des sentiments qui sert à les créer et à les défendre ».

De cet état d'esprit Durkheim tire la conclusion suivante : « M.

Ribot a démontré que les formes Complexes de la vie psychique de l'individu sont inexplicables en dehors de leurs conditions sociales, c'est-à-dire que la psychologie, quand elle est parvenue à un certain moment de son développement, est inséparable de la sociologie ». Tant qu'il s'agit d'expliquer par le social les sentiments plus ou moins apparentés à la solidarité, la tentative n'est point paradoxale ; mais les sociologues contemporains ont été plus loin et se sont attachés à donner une explication sociologique des opérations de la vie ,intellectuelle et des lois de l'intelligence abstraite elle-même, c'est-à-dire de ce qui semble le plus individuel en même temps que le plus objectif et le plus universel.

Pour eux, les notions fondamentales de l'intelligence, comme les idées générales, les classifications, le langage, les principes rationnels eux-mêmes, sont des créations de la société. 1] D'après les sociologues, la simple considération du concept suffirait à révéler son origine sociale : s'il est fixé, immuable, impersonnel et p.ar conséquent universalisable, c'est qu'il vient de la société : « s'il est commun à tous, dit Durkheim, c'est qu'il est l'oeuvre de la communauté.

Puisqu'il ne porte l'empreinte d'aucune intelligence particulière, c'est qu'il est élaboré par une intelligence unique où toutes les autres se rencontrent et viennent en quelque sorte s'alimenter.

S'il a plus de stabilité que les sensations et que les images, c'est que les représentations collectives sont plus stables que les représentations individuelles...

Toutes les fois que nous sommes en présence d'un type de pensée ou d'action qui s'impose uniformément aux volontés ou aux intelligences particulières, cette pression exercée sur l'individu décèle l'intervention de la collectivité ». 2° De même des classifications, la division par genres, la formation même des genres, est d'origine sociale.

L'individu en serait incapable, et la nature ne l'y sollicite pas, car les choses ne se présentent pas d'elles-mêmes groupées, elles offrent simplement des ressemblances que la conscience perçoit plus ou moins vaguement.

De plus la classification implique un ordre hiérarchique dont le monde ni notre conscience ne nous présentent le modèle : c'est donc sur un modèle fourni par la société que les idées sont organisées : « c'est parce que les hommes étaient groupés et se pensaient sous forme de groupes, qu'ils ont groupé idéalement les autres êtres » (Durkheim et Mauss) ; c'est parce que les groupes humains (tribus, clans, sous-clans) s'emboîtent les uns dans les autres que les groupes des choses se disposent suivant le même ordre : la hiérarchie est exclusivement une chose sociale. 3] Même origine sociale pour le langage.

Le rôle considérable de l'imitation nous montre l'influence prépondérante de l'entourage, du milieu social dans la formation du langage enfantin.

Peut-être un langage rudimentaire apparaîtrait-il spontanément chez l'enfant isolé, mais l'enfant vit en société, et c'est grâce à la société que le langage de l'enfant a un développement prématuré. D'autre part, les mots eux-mêmes changent de sens sous l'influence sociale ; ainsi nous appelons plume un morceau. »

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