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Quel savoir doit posséder l'homme au pouvoir ?

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« Oublions momentanément les dirigeants politiques tels qu'ils sont, négligeons un instant les inévitables lacunes que recèlent leurs connaissances et cherchons ce que serait le dirigeant politique idéal.

Ne devrait-il pas être tout à la fois un scientifique de haut niveau, un économiste distingué, un historien érudit, un ingénieur compétent et un grand orateur? Le meilleur des gouvernants ne devrait-il pas être en quelque sorte omniscient, puisque sa mission s'exerce dans des domaines extrêmement variés? Certes, trouver un homme réunissant toutes ces compétences paraît bien difficile.

Mais tout l'enjeu de notre question est de savoir si un savoir immense est nécessairement requis pour bien gouverner.

Exigeons-nous avant tout de l'homme au pouvoir la possession d'un vaste savoir? N'attendons-nous pas de lui des capacités d'action et de décision plutôt que des connaissances ? On peut même se demander si le choix des dirigeants en fonction de leur savoir est souhaitable du point de vue du régime démocratique. Le pouvoir politique a en charge non seulement la plupart des affaires de la cité, mais surtout les plus importantes.

Il doit veiller à la sécurité des personnes et des biens, à l'éducation des enfants, à la répartition des ressources entre les citoyens, ou encore à l'application des lois.

Il est donc impossible de confier la direction des affaires publiques à des ignorants ou à des hommes incompétents.

Lorsque nous devons faire des choix dans un domaine particulier, pour acheter une voiture par exemple, nous nous adressons à des spécialistes dans ce domaine.

Pourquoi ne pas adopter la même méthode en politique? Comme le montre Platon dans Le Politique, gouverner, cela suppose des connaissances précises et sûres.

Et c'est pour cette raison qu'il compare l'homme politique à un tisserand.

Pour produire un tissu social solide et harmonieux, l'homme politique doit connaître les différents fils » (les différents types d'hommes) qu'il doit unir.

Il doit apprendre à les unir par des lois adaptées et justes.

Il doit progressivement dominer son métier. Notons toutefois que la métaphore du tisserand est partiellement inadaptée aux yeux de Platon lui-même : le savoir que doit posséder l'homme au pouvoir est bien plus ardu à maîtriser que celui de l'artisan.

Le bon exercice du pouvoir politique requiert en effet à la fois des connaissances abstraites et des aptitudes à l'action.

Selon la Lettre VII de Platon, l'homme au pouvoir doit être plutôt comme un médecin.

Ce dernier doit assimiler des disciplines théoriques comme la physiologie et l'anatomie.

Mais il se familiarise également, par la pratique, avec les différents symptômes et avec les maladies du corps social.

Il doit connaître l'âme des hommes, la nature et l'évolution des différents régimes, la façon d'organiser un appareil d'État ou encore les subtilités de la stratégie.

Il doit même, selon Platon, connaître les « lois secrètes qui président aux mariages » réussis.

Il subsiste néanmoins une grande différence entre le gouvernant et le médecin.

La médecine est un savoir spécialisé, elle ne concerne que les affections du corps de l'homme.

La science du gouvernement doit, au contraire, comprendre et connaître tous les aspects de la vie des hommes. La seule façon d'instaurer un pouvoir à la fois efficace et juste, aux yeux de Socrate dans la République, est de confier la direction de la cité à des « rois philosophes » ou à des « philosophes rois ». Ainsi que le rappelle Léo Strauss en tête de son ouvrage « La cité et l'homme », la tradition tient Socrate pour le fondateur véritable de la philosophie politique.

Cicéron aurait dit de lui qu'il « fut le premier à faire descendre la philosophie du ciel pour l'établir dans les cités, pour l'introduire également dans les foyers, et pour l'obliger à faire des recherches sur la vie et les manières des hommes aussi bien que sur le bien et le mal ».

en ce sens, il n'est pas d'histoire de la pensée politique qui ne doive commencer avec ce livre majeur que constitue la « République ». Rédigé par Platon, ce livre expose la conception de la justice de Socrate.

Tout y est présenté sous la forme habituelle mais hautement complexe du dialogue.

Répondant aux questions de ses interlocuteurs, Socrate développe une image de la cité idéale.

Socrate n'est-il que le porte-parole de Platon, un simple personnage dont le philosophe se sert pour exprimer ses propres idées tout en restant masqué ? A l'inverse, Platon n'est-il rien d'autre que le fidèle secrétaire du maître dont il se contente de noter scrupuleusement la pensée ? Et dans ce jeu mobile et contradictoire où s'enchaînent et s'entraînent questions et réponses sans que l'ironie soit jamais totalement absente, est-il seulement légitime de dégager une doctrine ? Derrière la fausse simplicité d'une conversation entre philosophes, l'art du dialogue soulève d'insurmontables difficultés qu'il nous faudra ici ignorer pour tenter de cerner l'image du politique qui se dégage de la « République ». Dans cet ouvrage, Socrate présente donc l'idée qu'il se fait de la cité idéale.

Il décrit une société fortement hiérarchisée au sein de laquelle les « gardiens » forment une classe dans laquelle règne une communauté parfaite. Au livre V, Glaucon, qui est l‘un de ses principaux interlocuteurs, demande à Socrate si une cité aussi parfaite que celle qu'il a décrite peut exister dans la réalité.

Avec beaucoup de prudence, car il sait ce que sa réponse peut avoir de ridicule et de scandaleux, Socrate répond qu'une seule réforme est nécessaire à qui veut changer radicalement la société: il suffit que se conjuguent le pouvoir politique et la philosophie.

Socrate déclare : « Tant que les philosophes ne seront pas rois dans les cités, ou que ceux qu'on appelle aujourd'hui rois et souverains ne seront pas vraiment et sérieusement philosophes ; tant que la puissance politique et la philosophie ne se rencontreront pas dans le même sujet ; tant que les nombreuses natures qui poursuivent actuellement l'un ou l'autre de ces buts de façon exclusive ne seront pas mises dans l'impossibilité d'agir ainsi, il n'y aura de cesse, mon cher Glaucon, aux maux des cités, ni, ce me semble, à ceux du genre humain, et jamais la cité que nous avons décrite tantôt ne sera réalisée, autant qu'elle peut l'être, et ne verra la lumière du jour. Voilà ce que j'hésitais depuis longtemps à dire, prévoyant combien ces paroles heurteraient l'opinion commune.

Il est en effet difficile de concevoir qu'il n'y ait pas de bonheur possible autrement, pour l'Etat et pour les particuliers.

» Socrate va s'attacher à justifier une proposition qui, aux yeux de ses interlocuteurs, ne peut être reçue que comme. »

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