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Quel rôle l'expérience sensible joue-t-elle dans la connaissance ?

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« L'expérience est toujours singulière et ne se partage pas.

C'est en cela que Kant a pu parler d'expérience sensible en lui donnant le sens de "perception".

La perception en effet est toujours perception d'une chose singulière, alors que la connaissance se veut universelle. Comment passer du triangle singulier que je vois devant moi aux propriétés universelles valant pour tous les triangles ? C'est là pour Kant le travail de l'entendement : l'expérience sensible est la matière de la connaissance, mais elle n'est pas d'elle-même connaissance.

Pour connaître, il faut que l'entendement donne à cette matière la forme universelle d'un concept à l'aide des catégories a priori. On peut identifier deux sources de la connaissance : les sens et la raison.

Elles semblent à la fois distinctes et inséparables.

Distinctes car elles sont contraires par un aspect essentiel : les sens saisissent immédiatement leur objet, alors que la raison ne peut saisir un objet qu'à travers des médiations, de façon indirecte.

Mais en même temps inséparables, car il est tout aussi difficile de comprendre ce que serait une raison pure – un raisonnement sans objet donné – que de comprendre ce que serait une perception pure – une sensation à laquelle ne se mêlerait aucun raisonnement, ni aucune pensée.

L'expérience de l'attention, par exemple, nous montre comment nous ne percevons parfois que ce que nous voulons bien percevoir.

La raison se distingue à la fois de l'intuition et de la sensation par son aspect volontaire, conscient et donc libre. La raison et la sensibilité ayant été clairement reconnues comme deux facultés distinctes, il reste à penser leur liaison, à les articuler entre elles.

Ce qui suppose qu'on découvre ce qu'elles ont de commun, malgré leurs différences et interférences diverses.

On tente de trouver une relation dans l'idée d'une interaction, d'une causalité réciproque, d'abord.

L'idée empirique semble dominer : la raison dériverait des sens, ses erreurs ou sa capacité à découvrir le vrai dépendant d'eux.

Ce qui pose le problème d'une possible autonomie de la raison.

Mais le fait qu'elle puisse se tromper dans les opérations qui lui appartiennent en propre, tels la logique ou le raisonnement en général, tend à confirmer cette autonomie. Le mot expérience est utilisé dans des situations très différentes : « faire l'expérience de quelque chose », « homme d'expérience », « expérience scientifique, esthétique, mystique », etc.

Comment comprendre le lien entre cette multiplicité et l'unité de sens du mot « expérience » ? Etymologiquement, experire signifie éprouver.

Toute expérience est épreuve. Le sujet qui vit une expérience est confronté à une réalité extérieure à lui, ou intérieure, intime.

Ce rapport à la réalité conduit à l'enrichissement de la représentation que le sujet a du monde, des autres et de lui-même.

Ainsi, l'expérience conduit à l'élaboration de connaissances diverses et d'un savoir qui les regroupe.

Cependant, cette expérience subjective ne doit-elle pas être critiquée pour élaborer une connaissance objective et véritable ? Dès lors, la connaissance n'est-elle pas fondée sur la raison, et non sur l'expérience ? L'expérience, source de connaissances Chacun fait sa propre expérience, en fonction des rencontres vécues et des leçons qu'il est capable d'en tirer.

Cet aspect de l'expérience renvoie à l'existence en général. Ainsi, l'expérience est une source de connaissances : progrès empirique où se mêlent et s'organisent perception, mémoire, habitude.

Il y a une mise en rapport des situations, par comparaison, ressemblance, association, séparation.

Et, par induction, l'esprit passe de la multiplicité des faits divers à l'unité d'une règle générale.

De plus, un savoir faire, fruit de ce vécu, est constitué et intégré.

Ceci concerne aussi bien l'individu (ontogenèse) que l'espèce (phylogenèse).

Les mythes, dans les récits de l'origine du monde, représentent une forme de connaissance que l'on « vit ». La technique humaine atteste bien ces « essais et tâtonnements » de la pensée appliquée à l'action, dit Alain.

Dans ce cadre, l'expérience mène aux vérités générales d'un savoir empirique et à l'art (savoir-faire, technè).

Et, au-delà du métier de l'artisan, il faut ici penser à l'art médical ou politique par exemple.

« L'homme de l'art » a un bon diagnostic et il sait quoi faire, comment (moyens) et pourquoi (fins).

Sa pratique est mesurée par la règle et adaptée à la situation, donc efficace. Toutefois, si l'expérience est individuelle et subjective, comment en faire une source objective de connaissance vraie universellement ? Et si chacun doit faire sa propre expérience, cela veut-il dire que l'expérience, liée au vécu, ne peut être transmise ? Mais alors, une telle connaissance peut-elle être considérée comme une véritable connaissance ? Raison, expérience et connaissance Reprenons : un phénomène expérimenté est, par nature, singulier et contingent.

La répétition des coïncidences, des similitudes, peut nourrir une observation utile, entraîne des habitudes, mais ne suffit pas à donner une connaissance certaine : l'épreuve des faits n'a pas la force d'une démonstration et d'une preuve par la raison.

Il faut passer du contingent au nécessaire, de la généralité des règles à l'universalité des lois.

Pour connaître la vérité d'un objet, il faut faire abstraction de ce qui est subjectif.

L'expérience scientifique, construction rationnelle, n'est pas de même nature que celle que chacun fait par son vécu.

Sensation et opinion sont des « obstacles épistémologiques » (Bachelard).. »

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