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Que faut-il penser de cette affirmation: "Nous savons que nous sommes mortels, mais nous ne le croyons pas" ?

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« VOCABULAIRE: MORT: Du latin mors, «mort».

Cessation complète et définitive de la vie.

Seul parmi les animaux, l'homme se sait mortel: cruelle certitude qui limite son horizon et l'oblige à composer avec sa propre disparition, comme avec celle des êtres auxquels il est attaché.

Pour Platon, la mort est un «beau risque à courir».

Dans le Phédon, Socrate définit la mort comme la séparation de l'âme et du corps; délivrée de sa prison charnelle, l'âme immortelle peut librement regagner le ciel des Idées, patrie du philosophe.

Épicure tient la mort pour un non-événement, puisque jamais nous ne la rencontrons.

Tant que nous sommes en vie, la mort n'est pas; et quand la mort est là, c'est nous qui ne sommes plus.

Pour Heidegger au contraire, la vie humaine s'inscrit dans la finitude: «Dès qu'un humain vient à la vie, il est déjà assez vieux pour mourir». Nous savons que nous sommes mortels L'homme, remarque Rousseau, dans son Discours sur l'origine de l'inégalité (1755) est le seul animal qui se connaisse comme mortel. Certaines philosophies, telle celle de Platon, nous promettent l'au-delà, à l'instar des religions ; mais les penseurs matérialistes tiennent la mort pour un anéantissement du moi personnel. «On devient fou en y songeant !» (Maupassant, La Tombe, 1884).

Peut-être ce savoir nous serait-il insupportable, si nous ne pouvions pas l'occulter la plupart du temps... Mais, généralement, nous négligeons de penser à notre condition Les hommes, constate Montaigne (1533-1592), négligent, de penser à la mort : «ils vont, ils viennent, ils trottent, ils dansent, de mort nulles nouvelles» (Essais, I, 20). Nous sommes, disait Pascal, comme des «hommes dans les chaînes, et tous condamnés à la mort» (Pensées, frag.

199, éd.

Brunschvig). L'ennui est hautement insupportable à l'homme, parce qu'alors, l'absence de tout désir fait place à la considération de soimême et à la conscience de sa vanité.

Dès lors, on comprend que tout homme cherche à se divertir, c'est-à-dire à se détourner de la pensée affligeante de sa misère.

Nos désirs, pour autant qu'ils nous portent à croire que leur réalisation nous rendrait heureux, sont l'instrument majeur de cette stratégie.

L'imagination, qui institue des biens comme désirables, en est l'auxiliaire indispensable.

La vérité du désir n'est donc pas dans son objet mais dans l'agitation qu'il excite : « nous ne recherchons jamais les choses mais la recherche des choses » (773).

Mais le divertissement n'est qu'un cache-misère. Préférable à l'accablement de l'ennui, il s'avère sur le fond tout aussi nuisible.

Faire obstacle à la considération de sa misère, c'est se priver des moyens de la dépasser. "Quand je m'y suis mis quelquefois, à considérer les diverses agitations des hommes, et les périls et les peines où ils s'exposent, dans la cour, dans la guerre, d'où naissent tant de querelles, de passions, d'entreprises hardies et souvent mauvaises, etc., j'ai découvert que tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos, dans une chambre.

Un homme qui a assez de bien pour vivre, s'il savait demeurer chez soi avec plaisir, n'en sortirait pas pour aller sur la mer ou au siège d'une place.

On n'achètera une charge à l'armée si cher, que parce qu'on trouverait insupportable de ne bouger de la ville; et on ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que parce qu'on ne peut demeurer chez soi avec plaisir.

Mais quand j'ai pensé de plus près, et qu'après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs, j'ai voulu découvrir la raison, j'ai trouvé qu'il y en a une bien effective, qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable, que rien ne peut nous consoler, lorsque nous y pensons de près." PASCAL Ce texte, extrait des Pensées, se rapporte au thème, central chez Pascal, du divertissement, conçu comme ce qui nous détourne de la vue de la condition humaine et de son néant.

Le problème est de savoir comment l'homme est en mesure d'échapper au spectacle de sa misère métaphysique et morale. Quelle est l'idée directrice du texte ? C'est par la fuite, en nous détournant de nousmêmes, que nous sommes en mesure d'échapper à la vision de notre véritable condition : le divertissement est notre lot car l'homme ne supporte pas de demeurer seul face à lui-même. On saisit l' enjeu du texte : il nous fait gagner une vision très « dure » de la condition humaine; les hommes cherchent plutôt à oublier leur misère existentielle qu'à se mettre à la recherche du vrai bonheur.

C'est par le divertissement qu'ils s'étourdissent: l'activité humaine représente un véritable étourdissement.

L'enjeu nous dirige vers l'intérêt philosophique d'un texte admirable de perspicacité.. »

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