Peut-on vaincre un préjugé ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
La question ici posée porte non pas sur l'existence de préjugés en général.
Elle pose cette existence de fait et elle
pose la question de la possibilité d'en vaincre au moins un seul.
En effet la question porte sur le comment de la lutte
contre les préjugés et surtout de la possibilité d'en vaincre un – autrement dit sur les moyens à mettre en oeuvre
dans la lutte des préjugés.
C'est bel et bien une interrogation modale.Cette interrogation contient en son sein une
notion majeure, celle de préjugé une notion plus mineure mais pas inintéressante qui est celle de la victoire contre
l'un d'eux.
Revenons sur ces deux concepts.
Le préjugé
Le préjugé à proprement parler est un jugement d'avant le jugement vrai.
S'intéresser au pré-jugé, c'est donc par
conséquent s'intéresser à la notion de jugement dès lors que le préjugé est une forme de jugement.
Le jugement en
tant que faculté de juger est d'abord une puissange qui permet de distinguer le vrai et le faux qui s'exerce bien ou
mal selon l'usage qu'on en fait.
Un préjugé c'est donc une idée reçue, une opinion qu'on croit fondée, réfléchie mais
qui ne l'est pas.
Le préjugé sous-tend souvent une coloration négative.
Ainsi l'on dira, « il est bourré de préjugés.
»
Cependant, il semble nécessaire pour vivre de s'appuyer au moins un temps sur les préjugés.
Pensons ainsi à l'enfant
qui ne peut faire l'économie de préjugés dès lors que la faculté de juger est en cours de formation.
On jugerait ainsi
nécessairement à partir de préjugés.
La question de la lutte des préjugés apparaît comme nécessaire dès lors qu'elle
serait constitutive du jugement.
Vaincre
L'emporter sur quelqu'un par les armes
Remporter par les armes un avantage décisif sur un ennemi (singulier ou collectif) qui attaque ou se défend,
dans un combat, dans une bataille, à la guerre.
Dominer quelqu'un qui résiste, le soumettre à son emprise pour lui imposer sa volonté.
Être plus fort qu'une réalité intérieure ou extérieure à soi-même.
Surmonter par sa volonté, par sa ténacité (une force, une réalité puissante, hostile, nuisible ou déroutante).
Venir à bout de, faire reculer une réalité puissante hostile ou nuisible
Problématisation :
La question, nous le soulignions, porte sur la possibilité de la victoire sur les préjugés.
Ceci implique une conception
du préjugé négatif qu'il va donc falloir expliciter.
Cependant le sujet fait problème à plusieurs niveaux.
Il apparaît
difficile de lutter contre qqch qui est constitutif de notre faculté de juger.
En effet, le préjugé est constitutif de la
nature humaine.
Il va être nécessaire de distinguer préjugés et préjugés, ceux qu'il faut combattre, et ceux qu'il
faut conserver.
Autrement dit, dans la mesure où l'on ne peut réellement parler de préjugé au singulier et qu'il en
existe différentes sortes, quelles sont les modalités de la lutte ; et est-il nécessaire et légitime d'entreprendre une
lutte généralisée contre les préjugés ? En filigrane se pose toujours la question de peut-on faire l'économie de tous
les préjugés ? Dans quelle mesure si l'on peut vaincre un préjugé, est-il nécessaire de ne pas tous les vaincre ?
I.
Source, nature et diversité des préjugés
II.
Pourquoi veut-on vaincre les préjugés
III.
Une impossible lutte totale contre les préjugés – un préjugé : de vouloir éradiquer tous les préjugés ?
I.
Source, nature et diversité des préjugés
1.
Le préjugé est une forme d'illusion
Platon, République VII : le mythe de la caverne
Platon distingue ce que les commentateurs après lui ont appelé « le monde intelligible », le monde des Idées
et « le monde sensible » - le monde sensible étant une image imparfaite du monde intelligible, monde réel
pour Platon.
Ainsi tout ce qui a trait à la connaissance du sensible relève de l'illusion.
Illusion qui recouvre
l'erreur, l'opinion, et le préjugé.
En effet seul le mode de connaissance correspondant à l'intelligible,
autrement dit l'intellection à l'issue de l'observation des Idées, est un jugement vrai.
Ainsi l'on peut
considérer l'illusion comme un pré-jugement, un jugement d'avant le jugement vrai, celui qui porte sur les
Idées.
Les prisonniers de la caverne étant dans l'illusion, dans le préjugement le plus total.
« Considère maintenant ce qui leur (prisonniers) arrivera naturellement si on les délivre de leurs chaînes et
qu'on les guérisse de leur ignorance.
Qu'on détache l'un de ses prisonniers, qu'on le force à se dresser
immédiatement, à tourner le cou, à marcher, à lever les yeux vers la lumière : en faisant tous ces
mouvements il souffrira, et l'éblouissement l'empêchera de dis, et l'éblouissement l'empêchera de distinguer
ces objets dont tout à l'heure il voyait les ombres.
Que crois-tu donc qu'il répondra si quelqu'un lui vient dire
que jusqu'alors il n'a vu que de vains fantômes, mais qu'à présent, plus près de la réalité et tourné vers des
objets plus réels, il voit plus juste ? »
[Clé du mythe / allégorie de la caverne : ici on peut comprendre que la lumière correspond à l'Idée du bien,
les choses réels aux autres Idées, les fantômes seraient les objets du quotidien du monde sensible, et le
prisonnier serait le sujet de la connaissance.].
»
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