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Peut-on vaincre la peur de l'autre ?

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« Introduction • Est-il possible – et même légitime, si l'on tient compte du double sens de l'expression « peut-on » – de dominer et de réduire, au terme d'une lutte – car l'idée de « vaincre » implique celle de combat – le phénomène affectif marqué par la prise de conscience du danger lié à l'altérité, à ce qui n'est pas moi, à ce qui diffère de moi ? L'identité doitelle s'imposer à la conscience, privilégiant uniquement le même, ce qui est constitutif d'elle-même et de sa propre essence ? • L'autre s'oppose-t-il irréductiblement au moi ? Désigne-t-il quelque enfer en ce monde et symbolise-t-il le mal ou l'échec existentiel ? Le problème est, en définitive, de savoir si la « guerre des consciences » est un irréductible, si nous sommes voués à l'entre-déchirement.

D'où l'enjeu de la question, son poids existentiel, son importance décisive, car cette question nous interroge sur notre situation dans le monde et enveloppe l'idée de modes d'être fort différents, selon la réponse apportée. Discussion A.

On ne peut vaincre la peur de l'autre A priori, la peur de l'autre, pris en son sens originel comme le différent, comme ce qui se distingue de moi et m'est étranger, semble si ancrée au plus profond de moi-même qu'il paraît impossible de la vaincre.

L'autre, ce n'est pas originellement le prochain, mais l'éloigné et l'inconnu : une présence opaque et angoissante, qui m'arrache à mes certitudes premières. La différence caractéristique de l'être-autre, pris en son sens le plus général, je la repousse.

Elle m'angoisse et m'inquiète, elle me fait peur car eut me décentre, m'oblige à relativiser mon point de vue personnel.

Bien plus, je tends à projeter dans l'altérité tout le négatif que je ressens et expérimente : l'autre, c'est le mal, le négatif, l'étranger à moi que je refoule parce qu'il n'est pas moi, tout simplement.

« Habitudes de sauvage », « Ça n'est pas de chez nous », etc.

: tous ces exemples linguistiques nous signalent que la peur de ce qui diffère de moi s'enracine au plus profond de moi-même.

l'humain, c'est moi ; quant à l'autre, il se donne à moi comme un négatif que je répudie.

J éprouve une angoisse ou une peur irraisonnée devant le différent, angoisse ou peur qu'il semble fort difficile de vaincre.

L'autre, c'est le barbare par excellence.

Le barbare, dans notre langue immédiate, ne s'oppose-t-il pas linguistiquement à tout ce qui est civilisé, policé, raffiné et, tout simplement, humain ? Les Grecs distinguaient, pour leur part, les « Hellènes » et les autres peuples, « les Barbares ».

Nous avons donc affaire à un type d'exclusion constitutif de l'humain, quasi originel.

D'un côté, ceux qui détiennent la « culture », de l'autre, toute « l'inhumanité » rejetée en bloc et sans nuances. Cette peur est en profondeur celle de l'inconnu, dont on ne peut par avance connaître les intentions et les possibilités et cette peur est analogue à la réaction du corps devant toute invasion d'un élément qui n'en fait pas naturellement partie ; peut-être s'enracine-t-elle dans ce fondement biologique essentiel à la survie.

Il me faut défendre mon intégrité devant toute menace étrangère.

Tout corps constitué, biologique ou social, repousse une menace possible. Quant à l'autre conçu comme autre que moi, comme autrui, il semble, lui aussi, engendrer en moi une peur difficile à exorciser.

Comment pourrait-on vaincre la peur de cet autre qui me destitue de ma liberté originelle, comme le montre Sartre ? En me transformant en quasi-objet, l'autre ne peut que m'angoisser ou me faire peur.

L'Autre comme Autrui est indice d'un danger. Comment donc dominer la peur qu'il m'inspire à juste titre ? C'est ma liberté qu'il dépasse : il fait de moi une « transcendance transcendée ».

L'agression du regard d'autrui est telle qu'elle entraîne ma dépendance par rapport à l'autre.

Son regard ne me dépouille-t-il pas de moi-même et de ma libre transcendance ? Si autrui me met en danger, si je me découvre en position d'objet, cela signifie que la situation m'échappe et qu'il n'est pas possible de vaincre la peur de l'autre.

« Ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre » (Sartre, L'Être et le Néant). Transition Si l'on ne peut vaincre la peur de l'autre, cela signifie que l'univers humain est tout entier pénétré par l'angoisse, tout entier fissuré.

Car l'altérité est partout : dans cette complainte que je perçois, dans ce vêtement étrange, dans la présence d'autrui.

Pour échapper à l'angoisse ou à la peur omniprésente, il me faut donc progresser.

Je ne puis vivre en étant de part en part « fissuré » par l'autre, blessé par sa présence même, par ce « bloc » opaque qui m'est étranger.. »

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