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Peut-on reprocher à une oeuvre d'art de "ne rien vouloir dire" ?

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« Problématique: La question n'est pas seulement: "une oeuvre d'art doit-elle avoir un sens ?" mais porte sur l'intention signifiante de l'oeuvre.

L'opposition entre peintures "abstraite" et figurative est évidemment pertinente, mais non suffisante.

En effet, en s'appuyant sur la référence concrète à des oeuvres, on s'apercevra que la peinture non figurative peut "vouloir dire" quelque chose. La raison d'être d'une œuvre d'art ne semble pouvoir être définie sans donner lieu à toutes sortes de controverses, voire de malentendus — comme l'atteste, dans la critique d'art, la diversité des appréciations portées sur une même œuvre.

En fait, tout jugement porté sur une œuvre engage une certaine conception des critères distinctifs de l'activité artistique, et partant, du statut de l'art.

Les partisans de « l'art pour l'art » et ceux de « l'art engagé » développèrent en leur temps des polémiques mémorables.

Les philosophes eux-mêmes, partant de problématiques différentes, n'évaluent pas de la même manière la portée du phénomène artistique : Platon se méfiait des poètes en qui il voyait des illusionnistes peu soucieux de vérité, tandis qu'Aristote vantait le côté « thérapeutique » de l'art tragique qui permet une sorte d'extériorisation des passions (« catharsis »).

La question de la fonction de l'art, et notamment du rapport entre l'art et le langage, a connu au XXe siècle un renouvellement décisif, avec l'Art abstrait. Émancipée des exigences de la représentation figurative ou du sens explicite, la peinture abstraite provoquait souvent l'indignation ou la moquerie : « cela ne ressemble à rien » ; « cela ne veut rien dire », etc.

L'explicitation des présupposés de tels propos fournit à la réflexion l'occasion d'analyser le problème des critères distinctifs de l'œuvre d'art, de sa raison d'être.

Peut-on reprocher à une œuvre d'art de « ne rien vouloir dire » ? Introduction L'art est un domaine recélant de multiples entreprises.

En effet, chaque artiste a sa matière de prédilection, son support sur lequel il sera capable d'appliquer son exercice et ses idées.

Dès lors, en transposant dans et par l'art des conceptions (techniques et théoriques) qui lui sont propres, l'artiste peut en venir à représenter, à la lumière de son orientation, des œuvres déconcertantes, capables d'abuser le spectateur qui attend de l'artiste un minimum de sens et d'honnêteté.

On voit alors que l'art a longtemps paru comme étant la simple copie du réel, et que ses prétentions (de réalité, de sens, d'absolu) ne se justifiaient pas à travers ses productions.

Comment comprendre une œuvre d'art si toute production artistique prête à confusion au niveau de ce qu'elle interprète ? Aussi, peut-on parler d'une insignifiance de l'art ? I.

L'art ne révèle rien, ou n'affirme rien de plus sur l'existence a.

La critique de Platon par rapport à l'art s'organise dans un premier temps autour de considérations épistémiques.

Platon considère en effet que la poésie (particulièrement celle d'Homère) et que la peinture sont des arts mensongers.

Les poètes mentent sur les dieux en les représentant comme les auteurs de mauvaises actions. Les peintres mentent sur les objets en les faisant apparaître autrement qu'ils ne sont.

Dans le livre X de La République, il déploie sa critique à travers l'exemple des « trois lits ».

Si l'on prend l'exemple d'un lit on comprend (en suivant la théorie dualiste de Platon) qu'il existe en effet trois sortes de lits : 1) L'idée de lit intelligible qui se situe dans le monde intelligible et constitue le modèle de tous les lits sensibles ;2) Le lit sensible sur lequel il est possible de se coucher (qui constitue une forme dégradée par rapport au lit intelligible) ; et enfin 3) le lit peint qui n'est que l'image du lit sensible (qui est par conséquent encore plus éloigné de l'Idée de lit intelligible).

Extrêmement dévalorisé sur le plan métaphysique, le lit peint manifeste le caractère inférieur de l'art pictural par rapport aux essences intelligibles, aux Idées, ces dernières étant atteignables par la rationalité discursive, par l'expression des concepts. b.

C'est au début du vingtième siècle que le logicien et philosophe Wittgenstein a exposé un système qui propose cette fois-ci non pas de faire la critique de l'art mais de l'esthétique c'est-à-dire du discours sur l'art.

Pour Wittgenstein en effet toutes les propositions de logique sont des propositions tautologiques (cela signifie qu'elles ne renvoient à rien d'autre qu'à elles-mêmes ; elles ne désignent rien d'extérieur sur le plan empirique).

Or les propositions d'esthétique ne sont pas non plus autre chose que des propositions de logique. Tout comme ces dernières elles peuvent être ramenées à des représentations formelles (remplacées par des variables propositionnelles liées à l'aide de connecteurs logiques) et exprimées à l'aide de tableaux de vérité.

De plus elles possèdent tout comme les propositions de logique des catégories (le Beau, le Sublime) qui peuvent s'apparenter aux valeurs de vérité que sont le vrai et le faux dans les énoncés de logique formelle.

Les énoncés de l'esthétique n'ont donc pas de sens, ils sont purement autodésignatifs et ne parlent que d'eux-mêmes.

Issue d'une compréhension particulière de la logique comme système de propositions tautologiques, la critique wittgensteinienne de l'esthétique conduit à une conclusion dont il faut bien saisir la signification profonde : l'auteur du Tractatus ne dit pas que l'esthétique profère des non-sens, des énoncés contradictoires mais qu'elle est dénuée de sens parce que sur le fond elle ne désigne pas d'objet extérieur mais se contente tout comme la logique, les mathématiques et l'éthique, de s'autodésigner.

L'esthétique ne dit rien au sens fort de dire comme désigner objectivement les choses, elle ne parle que d'elle même et des valeurs qu'elle a déjà posées a priori.

L'art ainsi est plus de l'ordre de la monstration que de la démonstration. II.

Le secours de l'interprétation. »

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