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Peut-on être libre sans prendre de risques ?

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« La liberté est-elle un risque, une sorte de pari ? Représente-t-elle par ellemême un danger ? La liberté est-elle un enjeu ? Est-on automatiquement libre, ou est-ce un devenir qui demande un investissement de soi-même, risqué en ce qu'il n'est pas évident, assuré ? En quoi consiste ce risque : est-ce la peur de ne pas bien faire ? Peut-on avoir peur d'être libre ? Cela signifie-t-il qu'agir suppose d'évaluer des conséquences en terme de réussite, ou d'évaluer moralement l'acte ? Être libre, n'est-ce pas, comme dit Kant, pouvoir causer quelque chose par soi ? Cela suppose que je ne puisse plus référer l'origine de mon acte à autre chose que moi-même, que je deviens responsable.

Je ne peux plus dire : c'est la nature, ce sont les autres, etc.

La notion de responsabilité s'oppose-t-elle à celle de prise de risques ? Jusqu'où cependant peut-on soutenir que je suis pleinement responsable (Sartre y voit une responsabilité totale) ? Que serait la liberté si elle n'impliquait aucun risque ? Que perd-on ou que gagne-t-on par la liberté ? N'est-on pas libre justement par ce que cela représente d'incertain, d'imprévu ? Dans un monde où mon action s'intégrerait parfaitement, serait quasi prévisible, plus besoin de liberté, juste d'un automatisme.

Un contre-exemple intéressant pourrait être fourni par le texte de La Boétie, Discours de la servitude volontaire. La servitude volontaire ÉTIENNE DE LA BOËTIE (1549) La soumission de la multitude à l'autorité d'un seul est une véritable énigme que La Boëtie tente d'éclairer.

Comment les hommes, alors que la liberté est inhérente à leur nature, supportent-ils la servitude ? C'est en effet la servitude volontaire qui distingue avant tout l'homme de l'animal : « Les bêtes, si les hommes ne font trop les sourds, leur crient : vive la liberté ! » Le phénomène est d'autant plus étrange que cette soumission est nécessairement volontaire.

Il serait effectivement aisé de l'abandonner, le nombre est toujours du côté des opprimés : que peuvent les autocrates contre la volonté de la foule ? Force est donc de constater un état contre nature : « La seule liberté les hommes ne la désirent point ; non point pour autre raison (ce me semble) sinon pour ce que s'ils la désiraient, ils l'auraient...

» Par nature l'homme est évidemment influençable mais il est aussi raisonnable et libre.

Comment, dans ces conditions comprendre l'incompréhensible ? La Boétie voit dans cet état de fait la conséquence d'une double dénaturation.

Les gouvernés, d'abord, par habitude, paresse et facilité abdiquent rapidement.

Ils jugent plus confortable de laisser à un tiers le soin de prendre à leur place des décisions.

Les gouvernants, quant à eux, se laissent aller à la spirale de la tyrannie.

Le pouvoir semble appeler le pouvoir et se découvre être sans limite : « Le tyran ôte tout à tous.

» La Boétie montre aussi — et ce point est probablement le plus intéressant que le tyran pour maintenir sa domination sait lui associer ceux-là même qu'il domine.

La ruse du gouvernant consiste à rendre complices ses propres sujets de leur servitude : « Ainsi le tyran asservit les sujets les uns par le moyen des autres.

» L'idée est neuve et importante, elle suggère que le principe de la servitude volontaire est peut-être à chercher du côté de cette pyramide de servitudes que construit le tyran : remettre en question la tyrannie du Prince, c'est aussi vouloir remettre en cause celle dont chacun semble jouir à un titre ou à un autre dans la société.

Chaque gouverné tient en effet à son tour le rôle du gouvernant.

Tel qui obéit à son Maître se fait aussi obéir de ceux que le Maître a su lui subordonner.

Ainsi la servitude est volontaire dans la mesure où elle paraît être la condition nécessaire aux desseins de la volonté de maîtrise.

Quel « petit chef » n'est pas prêt à payer du prix de la servilité son pouvoir, aussi dérisoire soit-il ? [Introduction] « La liberté est un de ces mots détestables qui font plus chanter que penser », se désolait Paul Valéry.

Il est vrai que cette notion philosophique essentielle n'est pas facile à définir.

Afin de mieux répondre à la question qui nous est posée, nous examinerons la liberté sous deux aspects: d'abord en tant que pouvoir de se déterminer, ensuite comme liberté au sein de la cité.

Pour chacune de ces définitions, nous nous demanderons si, en exerçant sa liberté, l'homme ne s'expose pas à certains périls.

Pourquoi y aurait-il du danger à exercer sa liberté? [I.

Si l'on définit la liberté comme la puissance qu'a l'homme de se fixer consciemment des fins, quels risques l'homme peut-il encourir à exercer sa liberté?] La condition de l'homme diffère de celle de tous les autres animaux vivants sur la Terre par le fait qu'il est dépourvu de tout instinct.

Tandis que l'animal possède dès sa naissance son plan d'action tout tracé à l'avance, l'homme, parce qu'il vient au monde privé de tout bagage instinctif, a la possibilité de se fixer librement des fins.

Ainsi toute action, parce qu'elle est consciente, participe d'un certain exercice de la liberté.

Cela ne veut pas dire que l'homme est totalement libre, mais qu'il a par rapport à l'animal une marge d'action qui constitue précisément l'exercice de sa liberté. Mais en quoi celui-ci serait-il risqué? Si l'on suit l'analyse de Sartre dans L'Être et le Néant, on remarque qu'il existe un véritable paradoxe à propos de la liberté.

On aurait tendance, en effet, à considérer que la liberté est synonyme d'absence de contrainte, mais, observe Sartre, paradoxalement la liberté est, elle-même, une contrainte: « Nous sommes condamnés à être libres », écrit-il. À la différence des choses (la carafe d'eau, le coupe-papier...) qui ont été pensées avant d'être réalisées, l'homme n'a pas d'essence prédéfinie, il existe d'abord ; ce qu'il est, il le devient chaque jour par l'ensemble des choix qu'il opère.

Nous sommes toujours contraints de nous déterminer, sans cesse contraints de choisir: « L'homme est libre,. »

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