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Peut on etre libre sans exercer sa citoyenneté ?

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« Que gagne-t-on à exercer sa citoyenneté" ? L'obéissance aux lois peut apparaître, dans un premier temps, comme une contrainte, une limittation.

La Cité restreint le champ de mes possibles en m'interdisant ce que, physiquement, je pourrais faire (tuer, violer, voler...).

Certains philosophes ont inventé le terme d'« état de nature » pour désigner la condition qui serait celle des hommes s'ils vivaient sans aucune loi commune.

N'est-ce pas à l'état de nature que l'homme pourrait connaître le maximum de liberté ? Vivre sous des lois politiques, c'est, semble-t-il, renoncer à une grande part de libertés.

N'est-ce pas en vertu d'un mauvais calcul que nous obéissons aux lois ? Ne vaudrait-il pas mieux, si c'était possible, vivre loin des lois et des États ? Il est vrai que l'État protège et garantit un certain nombre d% libertés fondamentales.

À l'état de nature, chacun est à la merci de la violence des autres.

Le champ des libertés est considérablement rétréci par le bon vouloir des plus forts.

Que puis-je entreprendre quand ma vie est dominée par la crainte d'autrui ? Ce n'est pas à l'état de nature que je peux goûter au plus haut point le sentiment de ma liberté.

En revanche, en échange du respect des obligations qu'implique ma condition de citoyen, mes propres droits, donc mes libertés, sont garantis par la communauté des autres et le cas échéant par la force publique.

Fautil en conclure que l'obéissance civile assure toujours l'existence des libertés ? Évidemment non.

Obéir à un pouvoir tyrannique, respecter un droit qui opprime, c'est au contraire cautionner la servitude.

Mais, en toute rigueur, l'obéissance à un pouvoir injuste ne consiste pas en l'« exercice de la citoyenneté ».

Il nous faut préciser cette expression.

La « citoyenneté » désigne tout d'abord une condition.

Un citoyen est le membre d'une Cité.

Mais il ne s'agit pas d'une appartenance passive, au sens par exemple où un individu appartient à une nation ou à une culture. L'idée, d'origine grecque, de « citoyenneté » implique une participation active aux affaires de la Cité : elle représente avant tout un certain nombre de devoirs civiques (participation aux suffrages, obligation de servir sa patrie contre l'ennemi, respect des lois...).

Mais surtout, l'idée profondément démocratique de la citoyenneté grecque, dont la Révolution française s'inspirera librement, est que les citoyens n'ont à obéir qu'à eux-mêmes : il n'existe pas d'autorité supérieure à celle de leur assemblée.

Exercer sa citoyenneté revient donc à obéir à des lois qui n'expriment pas le bon vouloir d'un Prince mais qui traduisent la volonté générale des citoyens.

Certes tous les citoyens ne participent pas à l'élaboration des lois et des décrets par lesquels le pouvoir exécutif gouverne.

Mais, dans un État démocratique, un gouvernement se doit d'exercer son pouvoir dans le cadre d'une Constitution qui a été soumise elle-même au suffrage de tous les citoyens (par référendum par exemple). Les États de droit ne parviennent pas toujours à faire respecter les libertés reconnues par leur Constitution.

Faut-il en conclure que la liberté des citoyens y est mal défendue ? Il serait sans doute plus raisonnable de conclure à la nécessité, dans ces États, de renforcer l'état de droit, en particulier par l'amélioration des institutions (comme l'École) par lesquelles l'État parvient à entretenir les vertus civiques et à faire respecter sa loi républicaine.

Le défaut de citoyenneté menace les libertés de chacun.

Mais l'État démocratique est-il le seul mode d'organisation sociale qui préserve la liberté ? Il est probable, mais difficile à établir, que les hommes se sont sentis plus libres dans d'autres sociétés, sans État par exemple.

Il existe aussi sans doute d'autres voies sur lesquelles les sociétés humaines pourraient s'engager un jour pour assurer plus efficacement encore les libertés individuelles.

Peut-on, raisonnablement, tenter l'expérience ? La raison des citoyens peut difficilement raisonner autrement, en démocratie, qu'à partir des institutions existantes.

Elle peut vouloir les réformer mais elle ne peut faire le choix de l'inconnu, de l'aventure révolutionnaire.

La raison ne calcule, n'anticipe que dans le cadre de ce qui existe.

Elle est par essence conservatrice.

La raison démocrate a du mal à se représenter l'existence de la liberté en dehors du cadre démocratique de la citoyenneté.

Mais l'histoire inventera peut-être demain ce que la raison est incapable d'entrevoir aujourd'hui.. »

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