Peut-on dire que la nature est bonne ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
Il s'agit d'interroger un « dire » et en particulier d'en déterminer la légitimité (« peut-on »).
Or ce dire,
l'énoncé en question, consiste à donner un qualificatif à la nature.
La difficulté vient de cette qualification : le bien est d'abord un concept moral qui désigne tout ce qui est
pourvu d'une certaine valeur, ce qui est digne d'être désiré.
Du coup, il s'agit de se demander dans quelle mesure
attribuer une telle valeur à la nature est ou n'est pas correct.
Mais peut être dite bonne une chose qui excelle, qui est vertueuse, et cela, indépendamment de toute
considération morales (un vol, bien que moralement répréhensible, peut être bon pour autant que le voleur réussit
parfaitement ses méfaits).
Auquel cas, la nature, à laquelle les Anciens attribuaient une certaine rationalité (la
nature est en ordre), surpasse de loin toute création humaine (d'ailleurs, l'art a très longtemps consisté à imiter la
nature afin de produire du beau).
Pour donner sens au sujet, il faut donc nuancer cette apparente bonté de la nature qui lui vient de
l'harmonie (à la fois rationnelle et esthétique) dont elle témoigne en soulignant la dimension morale du concept de
bonté : la nature est aussi processus de corruption (perte de la forme selon Aristote) et qui, de ce fait, est une
destruction de l'ordre qui ne semble correspondre à aucun motif moral.
Il y a dans les phénomènes naturels
(tempête, tremblement de terre, inondation …) une part d'injustice qui est difficilement compatible avec l'idée de
bonté.
Problématique : La nature semble pourvue d'une force créatrice qui dépasse de loin les productions de l'art humain.
Aussi l'esthétique a longtemps consisté à prendre modèle sur la nature : celle-ci est belle et donc bonne.
De plus,
l'ordre semblant régner dans ses productions invite à penser qu'elle est rationnelle et on peut aussi en faire un
modèle de conduite.
Toutefois, une telle représentation correspond-elle nécessairement avec les faits : pour le
scientifique, la nature est d'abord un système de lois rigide qui est étranger au concept de bonté.
Du coup, eut-on
dire que la nature est bonne ou est-ce illégitime, un abus de langage héritée de la poésie sans incidence pour la
connaissance ? Enjeu : quelle attitude devons-nous avoir vis-à-vis de la nature ? Devons-nous comme les Anciens,
la diviniser et lui vouer un culte (en raison de sa bonté-beauté) ou bien chercher à la dominer et à s'en rendre
maître et possesseur (en raison de son imperfection qui nous est nuisible) ?
1-
ON PEUT DIRE QUE LA NATURE EST BONNE,
ACHEVÉE ET PARFAITE
a)
Qu'est-ce qu'une chose bonne ?
Une chose est bonne lorsqu'elle est vertueuse, lorsqu'elle remplit sa fonction de telle sorte que rien ne doit
plus lui être ajouté.
Ainsi une chose est bonne pour autant qu'elle excelle dans le domaine qui lui est propre.
La
bonté est une forme de perfection, d'achèvement, de réussite.
Elle s'oppose moins d'emblée à la méchanceté
(volonté de faire le mal accompagnée de plaisir) qu'à la médiocrité ou à l'imperfection.
Or la nature semble être ce qui répond le mieux à cet idéal d'achèvement.
Pendant des siècle, l'art devait,
pour produire du beau, des oeuvres belles, prendre modèle sur la nature.
On peut dire que la nature est bonne
puisqu'elle donne à l'art un modèle de beauté.
b)
La nature = modèle de beauté
On peut dire que la nature est bonne puisqu'elle donne à l'art un
modèle de beauté.
En effet, Aristote, dans la poétique, fait du processus
naturel du mouvement – actualisation de la matière par une forme – le modèle
de la création artistique.
Créer de belles choses revient à présenter, dans une
matière plus simple l'action de la nature, exhiber la forme et donc l'ordre
naturel.
La nature ou phusis, désigne l'ensemble des choses ayant en ellesmêmes « un principe de mouvement et de repos » : elle est « principe de
mouvement et de repos pour la chose en laquelle elle réside immédiatement
par essence et non par accident » (Physique, II, 1, 192 b).
Or ce mouvement
est rationnel : la nature est un processus finalisé.
Du coup, l'art humain n'est
qu'une reproduction de ce mouvement et il ne tient sa beauté que de cette
ressemblance avec les processus naturels : la forme est identique, la matière
est épurée.
L'œuvre belle, l'œuvre réussie est celle qui est le plus conforme à
la forme.
c)
La nature = modèle de rationalité et de vertu
Il y a de plus, une certaine rationalité propre à la nature : ses
mouvements sont déterminés rationnellement.
Ainsi le cycle des astres est
toujours identiques.
Il y a ainsi des régularités dans la nature et celles-ci ne
peuvent être dus au hasard : la nature est aussi principe d'ordre.
Les stoïciens préconisaient ainsi de vivre en accord avec la nature pour être vertueux, et donc heureux ; ce
qui signifie à la fois prendre modèle sur elle mais aussi se conformer à ce qu'elle prescrit.
Un évènements qui nous
arrive n'est pas en soi malheureux, mais il l'est parce que nous n'usons pas du pouvoir de juger que la nature nous a
donné.
Ainsi notre bonheur réside dans la façon dont nous nous insérons dans l'ordre du monde : la nature est
suffisamment bien organisée pour que nous n'ayons à nous plaindre de rien nous dit le stoïcien..
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