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Peut-on définir ce qu'est la nature ?

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« Pour les Grecs, la nature n'est pas créée par un Dieu, elle est la source de son propre mouvement.

Cette interprétation est remise en cause par la philosophie chrétienne: la nature étant créée par Dieu, elle n'a aucune autonomie ; c'est en quelque sorte une mécanique dont Dieu est l'horloger (Voltaire). Cette conception remonte à Descartes et à la doctrine de la création continuée : la nature n'a pas été créée une fois pour toutes, Dieu est obligé à chaque instant d'y réintroduire du mouvement.

Cette doctrine a pour conséquence de mécaniser la nature ; elle devient prévisible : une science de la nature devient possible, alors qu'elle était impensable pour les Grecs. Les difficultés rencontrées par la plupart des hommes, pour parvenir à dégager une définition rationnelle et cohérente du concept de Nature et de la réalité qui s'y trouve impliquée, semblent tenir avant tout à l'extrême généralité du terme lui-même, ainsi qu'aux multiples points de vue auxquels il est possible et légitime de l'envisager. Pour ne prendre qu'un exemple classique mais particulièrement éloquent à cet égard, comment dont-on concevoir les rapports entre la notion de « nature », entendue dans son sens le plus étendu, et la notion de « nature humaine » ? En effet, c'est ce dernier aspect de la nature qui, en un sens, nous concerne le plus directement, puisqu'il est celui qui définit notre condition et dans lequel se développe toute notre existence. En d'autres termes encore et afin de s'en tenir pour l'instant à cet exemple dont il restera à approfondir l'analyse philosophique, doit-on envisager la « nature » comme une sorte de principe universel dont dériveraient toutes les « natures » particulières, parmi lesquelles nous devrions alors compter aussi la nôtre ? Entendue en ce sens, la nature peut alors définir l'ensemble de tout ce qui existe, où chaque espèce, telle que l'espèce humaine, ne constitue plus qu'un élément particulier et déterminé par un certain nombre de conditions propres à chacune. D'un autre côté, ne pouvons-nous pas également considérer que ce que nous appelons habituellement la nature, n'est après tout qu'une conception particulière de notre raison ? Dans ce cas, et contrairement à la première hypothèse, c'est la « nature humaine » qui se trouverait alors définir la « nature », en s'en formant en quelque sorte une image résultant des diverses lois, psychologiques ou mentales, qui régissent notre espèce. Lequel de ces deux points de vue est-il philosophiquement le plus vrai, et n'est-il pas possible de les envisager comme complémentaires l'un de l'autre, plutôt que comme opposés ? Le second cas pourrait en un sens se référer à la distinction bien connue entre la « nature » et la « culture », tandis que le premier trouverait plutôt son illustration dans la célèbre conception de Rousseau sur « l'état de nature », qui paraît bien suggérer une tentative pour réconcilier la nature et la nature humaine, ainsi qu'il restera à l'expliquer davantage par la suite. Quoi qu'il en soit, de telles difficultés qui, au demeurant, sont peut-être plus apparentes que réelles, ne constituent nullement une raison suffisante pour décourager un véritable travail de réflexion philosophique à ce propos.

Elles exigent seulement de savoir mettre chaque chose à la place qui lui revient, afin de nous permettre d'analyser ultérieurement les rapports qui les réunissent et qui, en définitive, leur confèrent peut-être au contraire toute leur vérité.

C'est donc à la mise en évidence de cette idée qu'il convient à présent de s'attacher dans la suite de ce chapitre. Il est encore un autre point dont il n'a pas été question dans les considérations ci-dessus, alors qu'il constitue pourtant un des éléments de la difficulté à parvenir à une définition claire de la notion de nature.

Peut-être même contribue-t-il dans une certaine mesure à accroître encore les confusions ordinaires dont ce terme fait le plus souvent l'objet.

En effet, il existe une tendance en quelque sorte « naturelle » à n'envisager la nature que sous ces aspects les plus immédiatement perceptibles ou saisissables, c'est-à-dire à un point de vue exclusivement « sensible » ou « physique » ; et c'est notamment dans ce cas que la nature représente surtout ce que Platon (428-347 av. J.-C), par exemple, appelle le « monde sensible », par opposition au « monde intelligible ». Pourtant, si cette vision des choses est tout à fait légitime au point de vue philosophique, on peut cependant se demander également si une séparation aussi radicale (qu'on retrouve, appliquée alors à la nature humaine, dans la distinction absolue de l'âme et du corps) n'accentue pas excessivement les difficultés évoquées plus haut.. »

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