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Peut-il y avoir une pensée sans images ?

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« Peut-il y avoir une pensée sans images ? Introduction.

— « Toute notre dignité consiste, dit /Pascal, en 'la pensée.

» Mais en quoi consiste cette pensée qui fait la grandeur et la puissance de l'homme ? Dans l'esprit de celui qui pense, on observe ordinairement une foule d'images.

Ces images sont-elles essentielles à la pensée ou peut-on penser sans images ? I.

— POSITION DU PROBLÈME Reprenons cette question pour en examiner tous les termes. A.

Peut-il y avoir...

? — Cette question est posée sans spécification aucune.

On ne nous demande pas si l'homme peut penser sans images, mais si la pensée est possible sans images.

A la question ainsi formulée, on pourrait répondre que ce mode de pensée est possible et même le seul possible pour le pur esprit.

Il n'y a lieu d'hésiter que pour l'homme ; c'est donc à la possibilité pour l'homme de penser sans images que nous nous arrêterons. En disant : » peut-il y avoir » et non « y a-t-il », on nous insinue que le problème déborde le cadre de la psychologie et empiète sur celui de ta métaphysique.

Le psychologue se cantonne dans le domaine des faits : observe-t-on, dans toute pensée un accompagnement 'd'images ou bien y a-t-il des pensées pures ou sans images ? En demandant : « peut-il y avoir une pensée sans images », on met en question la possibilité même de la pensée pure, on suppose que l'image est un élément essentiel de la pensée, en sorte que la notion même de pensée pure serait contradictoire.

Ce n'est donc pas seulement à une question psychologique de fait que nous avons à répondre, mais à une question métaphysique de nature. B.

...

une pensée.

— Au sens large, qui est courant chez Descartes, le mot pensée » désigne tous les faits de connaissance, depuis la perception et le souvenir jusqu'au jugement et au raisonnement.

Mais, au sens strict, les philosophes réservent ce mot aux opérations proprement intellectuelles, dont la forme élémentaire est le jugement et qui consistent essentiellement dans la perception de rapports.

C'est bien de la pensée au sens strict qu'il est ici question, puisqu'à la pensée on oppose les images, élément principal de la pensée au sens large. C.

...

sans images ? — A première vue, la signification de ce mot est parfaitement claire.

C'est à la réflexion que peuvent apparaître des difficultés d'interprétation. Au sens premier, l'image est 'la représentation mentale d'un objet perçu par la vue.

Effectivement, l'homme est surtout visuel, et ce sont les images visuelles qui prédominent dans sa pensée. Mais, au sens dérivé, toute représentation mentale d'un objet concret ne tombant pas actuellement sous les sens est appelée image : il est des images auditives et même des images kinesthésiques ou tactiles. Enfin, dans le cas particulier de la pensée, les mots constituent des images, ou plutôt des complexes d'images ou même d'images et de sensations, qui jouent un rôle important dans l'activité de l'esprit.

Il y a d'abord les mots lus ou entendus mentalement (images visuelles ou auditives) ; mais à cela s'ajoutent, plus nets chez les verbo-moteurs, des mouvements de phonation imaginés et même esquissés, et c'est là que de faibles sensations viennent renforcer les images. Par « images », nous entendons ici, non seulement les images visuelles, mais encore toutes les images sensorielles, y compris et surtout les images de mots avec les ébauches de mouvements de phonation, dont celui qui pense a une sensation vague.

Peut-il y avoir une pensée sans rien de tout cela ? II.

— SOLUTION PROPOSEE A.

Le rôle de l'image dans la pensée.

— Tout d'abord, l'image ne suffit pas à constituer la pensée ; la pensée ne se réduit pas à l'image.

La valeur de la pensée n'est nullement proportionnelle à la richesse des images, et le foisonnement de celles-ci empêche plutôt de l'élever au niveau de la pensée véritable.

La pensée, avons-nous dit, est essentiellement intuition de rapports ; or, de multiples images peuvent être présentés à l'esprit sans que soit perçu le rapport qui relie certaines d'entre elles. Qu'apporte donc l'image — au sens large qui englobe les mots — à l'activité intellectuelle ? La matière de la pensée pu son contenu, la pensée elle-même constituant la forme ou la structure ? Penser, dit-on, c'est juger, c'est-à-dire affirmer/ un rapport.

Mais un rapport suppose des choses en rapport ; ces choses peuvent être des mots ou même des signes algébriques ; mais ce sont là des images qui, si nous passons par-dessus elles jusqu'à l'objet qu'elles représentent, nous renvoient à d'autres images, qui sont elles-mêmes des substituts de sensations. On peut comparer l'image mentale à l'encre avec laquelle nous traçons lettre par lettre les mots qui expriment notre pensée, ou encore à ces lettres mêmes.

Ces lettres et moins encore ces traces d'encre ne peuvent pas être regardées comme constitutives de la phrase qui exprime notre pensée, et cependant c'est bien par leur moyen que notre pensée s'exprime ; elles constituent la matière même de cette expression. B.

La nécessité de l'image dans la pensée.

— Il suit de là que images et mots ne sont pas, ainsi qu'on semble souvent le croire, un simple accompagnement de la pensée.

Ils en constituent un élément essentiel, en sorte que, sans image et sans mots, l'esprit serait vide de toute pensée, tout comme une forme - qu'on songe à une forme de chapelier ou de bottier — n'informe rien tant qu'on ne lui donne pas une réalité matérielle à. »

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