Aide en Philo

« Les propriétés des animaux et leurs divers caractères y sont exprimés ; par conséquent les nôtres aussi, puisque nous sommes l'abrégé de ce qu'il y a de bon et de mauvais dans les créatures irraisonnables », écrit La Fontaine dans sa Préface au premier

Extrait du document

 

La citation expose une conviction du fabuliste, fortement argumentée («par conséquent»). Bien dépeindre les animaux équivaut à bien dépeindre les hommes. De fait les fables illustrent en permanence le «passage de l'animal à l'homme». C'est à la fois un artifice poétique et une conviction philosophique.

 

I.                   De l'animal à l'homme

 

La Fontaine peint les animaux pour eux-mêmes et pour leur ressemblance avec les hommes.

 

Des animaux décrits pour eux-mêmes

Dans la fable ésopique, les animaux étaient des créatures conventionnelles chargées de véhiculer une moralité. C'étaient en fait des hommes sous des masques d'animaux. La Fontaine s'intéresse à l'animal lui-même. Il nous le montre vivant dans son aspect extérieur, dans son activité et dans son caractère.

En une formule souvent pittoresque, le fabuliste évoque la physionomie, la démarche ou la silhouette des animaux (Le Héron, VII, 4 ou L'Éléphant, VIII, 15). Leurs mouvements sont rendus avec précision. L'Hirondelle vole par exemple gracieusement en «caracolant, frisant l'air et les eaux» (X, 6). Quelques mots suggèrent enfin leur fonction principale. La Pie «jacasse» (XII, 1) ; le Rat devient un «ronge-maille» (VIII, 22 ; XII, 15).

 

 

« La citation expose une conviction du fabuliste, fortement argumentée («par conséquent»).

Bien dépeindre les animaux équivaut à bien dépeindre les hommes.

De fait les fables illustrent en permanence le «passage de l'animal à l'homme».

C'est à la fois un artifice poétique et une conviction philosophique. I. De l'animal à l'homme La Fontaine peint les animaux pour eux-mêmes et pour leur ressemblance avec les hommes. Des animaux décrits pour eux-mêmes Dans la fable ésopique, les animaux étaient des créatures conventionnelles chargées de véhiculer une moralité. C'étaient en fait des hommes sous des masques d'animaux.

La Fontaine s'intéresse à l'animal lui-même.

Il nous le montre vivant dans son aspect extérieur, dans son activité et dans son caractère. En une formule souvent pittoresque, le fabuliste évoque la physionomie, la démarche ou la silhouette des animaux (Le Héron, VII, 4 ou L'Éléphant, VIII, 15).

Leurs mouvements sont rendus avec précision.

L'Hirondelle vole par exemple gracieusement en «caracolant, frisant l'air et les eaux» (X, 6).

Quelques mots suggèrent enfin leur fonction principale.

La Pie «jacasse» (XII, 1) ; le Rat devient un «ronge-maille» (VIII, 22 ; XII, 15). Des animaux ressemblant aux hommes De surcroît, hommes et animaux partagent effectivement les mêmes réactions : les premiers parce qu'ils ne se laissent pas toujours guider par la raison ; les seconds parce qu'ils sont incapables de raison.

L'égalité s'établit ainsi entre eux par défaut.

Le Discours à Monsieur le duc de La Rochefoucauld (X, 14) en apporte la preuve.

« Un intérêt de biens, de grandeur, et de gloire» conduit les humains, comme «un intérêt de gueule» motive les chiens.

L'Homme et la Couleuvre (X, 1) et Les Compagnons d'Ulysse (XII, 1) montent que lorsque les hommes abdiquent toute sagesse et qu'ils deviennent donc « irraisonnables », ils agissent tels des animaux, de manière instinctive. II.

Un artifice poétique En fait cette identité des comportements animal et humain procède d'une fiction poétique.

Elle est un effet de l'imagination, comme le montrent l'organisation de la société animale et la symbolique des types humains. Une société imaginaire La Fontaine organise le monde animal sur le modèle humain.

Les bêtes portent des noms, bénéficient d'un état civil. Entre elles existent des liens de parenté; elles exercent en outre une activité professionnelle. Couronnement suprême de cette animation progressive, les animaux vivent dans une société dont la structure et le fonctionnement reproduisent ceux de la société française du XVIIIe siècle.

Leur régime est monarchique, et les mêmes classes (noblesse, bourgeoisie, peuple) la composent. Une symbolique des types humains La symbolisation des types humains par les animaux constitue une autre forme de fiction.

Le Renard par exemple représente tour à tour le courtisan et l'hypocrite.

Il défend le plaisir du roi (VII, I); prudent, il se garde de lui proposer un quelconque remède contre la vieillesse (VOL 3) ; cruel, il élimine ses rivaux par la calomnie ; hypocrite, il justifie son absence à la cour par un pseudo-pèlerinage effectué pour la santé du roi (VIII, 3). Or aucun de ces défauts n'est propre au renard.

Le fabuliste l'admet dans Le Loup et le Renard (XI, 6, v.

3). Pourquoi cet animal passe-t-il pour un maître de la ruse? «J'en cherche la raison, dit-il, et ne la trouve point.» La similitude des comportements provient donc d'une volonté de projeter sur le monde animal les principaux traits des humains. III. Une conviction philosophique La fiction poétique ne saurait toutefois se réduire à un simple artifice.

Elle rejoint les convictions de La Fontaine sur l'unité du vivant et l'interdépendance des espèces. L'unité du vivant Chez les hommes comme chez les bêtes, «Un esprit vit en nous et meut tous nos ressorts» (Discours à Madame de La Sablière, IX, v.

166).

C'est que réfutant la théorie des «animaux-machines» de Descartes, La Fontaine accorde aux animaux une sensibilité.

Il croit même en leur intelligence et en l'existence de leur âme. À défaut d'une «raison» raisonnante, les bêtes possèdent un «esprit», certes imparfait, mais à peu près semblable à celui des tout jeunes enfants (Discours à Madame de La Sablière, IX).

Cet «esprit» n'est pas développé, mais il existe et il les rend capables de juger et de sentir.

Ainsi les animaux peuvent-ils servir à dépeindre les hommes puisqu'ils ont en commun certaines caractéristiques minimales. L'interdépendance des espèces Pour La Fontaine, un même et immense principe vital parcourt et anime la nature, selon une hiérarchie et des degrés qui vont du plus élémentaire au plus élaboré (VIII, 26).

Au sommet de cette hiérarchie se trouve l'homme.

Mais, bien qu'il en occupe la place supérieure, celui-ci n'en demeure pas moins un chaînon de l'ensemble.

Parce qu'il participe, comme les plantes et les animaux, d'une « âme universelle», il leur doit respect et protection». De l'animal à l'homme, de l'homme à l'animal, toutes les liaisons, tous les rapports deviennent donc possibles.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles