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Les oeuvres d'art sont-elles des marchandises ?

Extrait du document

« [S'il y a un marché de l'art, c'est bien parce que les oeuvres sont aussi des marchandises.

C'est souvent à la demande d'un commanditaire que les artistes créent.

Si on ne pouvait pas les vendre, il n'y aurait pas d'oeuvres d'art.] L'artiste crée sur commande C'est sur commande du pape que Michel-A nge a peint le plafond de la C hapelle Sixtine.

C'est à la demande d'un mystérieux commanditaire que Mozart a composé le Requiem.

C 'est pour gagner sa vie que Balzac a rédigé nombre de ses romans en feuilletons dans des journaux.

L'oeuvre d'art, par les conditions qui président à sa création, est aussi une marchandise. Aujourd'hui, le moindre peintre professionnel est coté sur le marché de l'art par des marchands qui ont intérêt à vendre ses oeuvres aussi cher que possible.

Les écrivains, les acteurs, les musiciens, les cinéastes ont des agents ou des producteurs qui font en sorte que leur art rapporte.

S'ils ne sont pas susceptibles de rapporter une recette minimum, les films ou les pièces de théâtre ne peuvent pas voir le jour. Les oeuvres d'art sont des objets «On expédie les comme le charbon de la Ruhr ou les troncs d'arbre de la Forêt Noire.

Les hymnes de Hölderlin étaient, pendant la guerre, emballés dans le sac du soldat comme les brosses et le cirage.

Les quatuors de Beethoven s'accumulent dans les réserves des maisons d'édition comme les pommes de terre dans la cave.» Comme le constate Heidegger dans Chemins qui ne mènent nulle part, les oeuvres d'art sont aussi des objets pourvus d'une certaine valeur. [La création artistique est par essence désintéressée.

Même si un artiste doit payer ses factures, il ne crée pas pour de l'argent, mais par nécessité intérieure.

L'exploitation marchande de l'art n'a rien à voir avec l'art lui-même.] L'art est désintéressé Ce qui fait la valeur de l'art, c'est qu'il est désintéressé, dépourvu de toute fin utilitaire.

Un artiste n'obéit pas aux mêmes motifs qu'un entrepreneur, qui «crée» avant tout pour gagner de l'argent.

Il obéit à une nécessité intérieure (Cf.

Kandinsky), il cherche à traduire dans le langage artistique une certaine forme de spiritualité, à exprimer son sens de la beauté ou son individualité.

Kant dira : « Est beau l'objet d'une satisfaction désintéressée ». La satisfaction est désintéressée, ce qui signifie que nous ne pouvons l'éprouver que si nous sommes dans un certain état d'esprit par rapport à l'objet.

Kant ne veut pas dire que la beauté ne nous intéresse pas, que nous sommes indifférents mais que le plaisir esthétique naît lorsque nous n'avons pas le souci de l'utilité (celui qui va en mer dans le seul but de pêcher, qui porte sur elle un regard de technicien, n'éprouvera pas de plaisir esthétique), de l'agréable ( celui qui porte un regard lubrique sur un Nu, éprouve une satisfaction charnelle qui est d'un autre ordre que la satisfaction esthétique), du bien ( celui qui apprécie une oeuvre engagée en raison de son caractère moral, éprouve une satisfaction morale qui n'est pas esthétique).

Le beau n'est ni l'agréable ni le Bien. Certes une satisfaction peut être morale et esthétique, les deux ne s'excluent pas mais en tant qu'esthétique, elle n'est pas morale.

A l'encontre de Platon, Boileau, Hegel, Kant affirme que le beau n'est pas le vrai.

Mais il n'est pas non plus le pur sensible puisque le beau ne se réduit pas à l'agréable bien que satisfaction esthétique et sensuelle ne s'excluent pas.

Et de cela Hume ne peut rendre compte.

De même qu'une oeuvre d'art immorale peut être belle, de même, peut l'être une oeuvre désagréable, qui nous déchire et bouleverse.

Et inversement, une musique agréable (par les sonorités, le passé qu'elle évoque) n'est pas belle pour autant bien que nous ayons tendance à confondre beauté et agrément.

Par conséquent, le plaisir esthétique est le seul plaisir libre.

Il n'est pas l'effet de la satisfaction de quelque chose, du besoin du corps ou d'une impératif de la raison.

Libre parce que désintéressé. L'argent corrompt l'art Certes, l'A rt est l'objet d'un marché.

Mais l'assimilation d'une « oeuvre d'art » à une marchandise ne rend nullement compte de son « essence », de sa « nature» ou de sa « spécificité », c'est-à-dire de ce qui la distingue de toutes les autres marchandises, dont la «valeur d'usage» se mesure à leur utilité et dont la «valeur d'échange» (c'est-à-dire le prix sur le marché) est déterminée, selon saint Thomas el selon Karl Marx, par le temps de travail socialement nécessaire à leur production.

Quand un artiste travaille sur commande, il produit rarement des chefs-d'oeuvre si son seul objectif est de toucher de l'argent.

Pour être authentique, l'art ne peut être corrompu par des préoccupations d'intérêt.

A partir du moment où le peintre Salvador Dali est devenu «Avida Dollars», selon le mot de l'un de ses ex-amis, il est devenu un artiste kitsch, un faiseur commercial et sans valeur artistique, et ce malgré son succès. L'art n'est pas le marché de l'art Certes, Léonard de Vinci était financé par François Ier, Picasso est devenu millionnaire, beaucoup d'artistes contemporains sont riches.

C ela tient à ce que l'art bénéficie d'une reconnaissance sociale et d'un grand prestige.

Si le public estime qu'une oeuvre vaut la peine d'être payée, cela est indépendant de la volonté de l'artiste.

Ce dernier ne se préoccupe que de son art.. »

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