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Le loisir est-il le but véritable du travail ?

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« Le terme travail dans notre époque désigne toute activité dès l'instant où elle est socialement rentable.

Ainsi l'ouvrier, l'employé, l'enfant qui apprend à l'école travaillent.

Mais il faut rappeler que ce mot vient du terme latin "tripalium" qui signifie instrument de torture.

Le travail est en effet plus subi comme une contrainte.

Il semble alors paradoxal de lier travail et loisir, le loisir se définissant comme une activité libre et gratuite visant le plaisir, la distraction.

Et pourtant pourquoi travailler si ce n'est pour se dégager des espaces de loisirs? Mais le travail ne transforme-t-il pas le loisir lui-même? L'humain peut-il vraiment s'accomplir sans travailler? I Le travail permet à l'homme de se défaire de la nécessité Pour Arendt, le travail dans l'antiquité était l'asservissement à l'a nécessité et cet asservissement est inhérent aux conditions de vie humaine.

L'institution de l'esclavage était alors une tentative d'éliminer des conditions de vie, le travail. Ainsi, dans nos sociétés, travailler c'est assurer ses conditions de vie pour pouvoir une fois le travail terminer, s'adonner aux activités non productives et qui nous procurent du plaisir.

Nous pouvons donc dire à l'instar de Rousseau que "c'est pour parvenir au repos que chacun travaille." "Ajoutons encore que le bonheur parfait consiste également dans le loisir.

Nous ne nous privons de loisirs qu'en vue d'en obtenir et c'est pour vivre en paix que nous faisons la guerre." Aristote, Éthique de Nicomaque, X. La fin suprême de l'homme est d'accomplir sa propre nature.

Or sa nature n'est pas le travail nécessaire qu'il a en commun avec les hommes mais les actions accomplies sans obligation.

En effet, le loisir par définition est un ensemble d'activités choisies par les individus pour épanouir leurs facultés physiques et intellectuelles.

Le travail serait alors que la condition pour accéder aux loisirs. "Il n'y a de vraie joie dans le repos, le loisir, que si le travail joyeux le précède." A.

Gide II Le travail aliène le loisir même Pourtant, il semble trop idyllique d'affirmer que le travail libère une partie de la vie pour les loisirs. Pour Nietzsche, la glorification du travail était une volonté sourde de capter des forces créatrices, de les détourner de leur vocation naturelle- la pensée, le plaisir, pour les investir dans des activités socialement utiles.

Le travail "consume une extraordinaire quantité de force nerveuse et la soustrait à la réflexion, à la méditation, à la rêverie, aux soucis, à l'amour." (Aurore, 1880) C'est ce que veut dire Marx quand il affirme que "plus l'ouvrier se dépense dans son travail, plus le monde [...] qu'il crée en face de lui devient puissant, et plus il s'appauvrit en lui-même, plus son monde intérieur devient pauvre." (Manuscrit de 1844) Ainsi, le travailleur perd toute force et toute faculté créatrice, ce qui l'empêche de profiter pleinement de ses temps de loisir pour se construire et s'épanouir. Jean Baudrillard va d'ailleurs plus loin en affirmant que même les loisirs sont investis de la même valeur marchande que le travail. Tout d'abord, le loisir est considéré comme "le temps nécessaire à la reconstitution de la force de travail".

En effet, la productivité d'un travailleur sans temps de repos est beaucoup plus faible.

D'autre part, et de manière plus profonde, l'aliénation du loisir tient à ce que le temps est devenu une valeur marchande.

L'aliénation est "liée à l'impossibilité même de perdre son temps." III Le travail comme affirmation et développement de soi Pourtant il convient de réinterroger la valeur actuelle du travail.

En effet, dans nos sociétés la vision purement nécessaire du travail tend à être remise en question.

Dans le livre Bonjour paresse de Corinne Maier sorti en 2004, l'auteur, par une analyse sociologique, met en évidence la volonté des individus de trouver un emploi qui est un sens, pour eux et pour la société.

Il ne s'agit plus uniquement de produire mais d'accomplir des actions intelligentes et épanouissantes, c'est-à-dire de faire vivre le travail sur le mode du loisir. Pour Hegel, déjà, il fallait considérer le travail comme un moyen d'extériorisation et d'objectivation de soi.

Dans la nature maîtrisée par le travail, l'homme se reconnaît et s'affirme. De même, pour Simone Weil, le travail doit être pensé comme activité qui ne sépare pas la pensée de l'action, le "travail intellectuel" et "le travail manuel".

Il donne à l'homme la mesure de sa liberté dans le sens qu'il lui montre ce qu'il peut fasse à la nécessité des choses. Il est important donc de redonner une valeur positive au travail, comme oeuvre, activité créatrice.

C'est pourquoi Valéry affirme dans la France travaille qu'il "importe de reconnaître et de faire connaître les vertus spécifiques de ces artisans de qualité". Ainsi le travail est d'abord ce qui nous dégage de la nécessité pour nous assurer un temps d'épanouissement et de développement de soi même, qui est l'activité gratuite qu'on accomplit pour le plaisir.

Mais l'industrialisation a donné au travail une dimension aliénante qui atteint le travailleur dans toute sa personnalité et l'empêche de s'épanouir dans un temps de loisir lui-même investit par la valeur marchande.

Le travail devient alors captation des forces de créations et d'inventions humaines.

Pourtant, dans une société où le travail a perdu toute sa valeur, il devient urgent d'essayer de renverser la tendance en redonnant au travail la possibilité d'épanouissement de l'individu.

Pour cela, il faut faire valoir la dimension créatrice et originale de tout travail et toute existence. Nous pouvons néanmoins nous demander si une telle évolution est possible dans un monde où comme dit Valéry les patrons et les technocrates semblent être les "seuls hommes complets" qui concentrent à eux seuls l'initiative, la volonté et l'intelligence.. »

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