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Le jugement appartient-il uniquement à la conscience individuelle, ou bien dépend-il aussi de conditions sociales ?

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« Le jugement appartient-il uniquement à la conscience individuelle ou bien dépend-il aussi des conditions sociales ? INTRODUCTION A) — Le jugement et l'esprit critique (c'est à dire étymologiquement l'esprit de jugement) semblent la suprême ressource et comme la forteresse inexpugnable de la liberté individuelle, la seule qu'Épictète menacé et torturé par une brute conserve intacte ; b) à cet égard le jugement apparaît comme un principe d'affranchissement de l'individu à l'égard des deux menaces d'obscurantisme qui pèsent toujours sur lui et qu'on peut appeler les raisons du coeur et les raisons du Prince. B) — Pourtant il tient par deux cotés à des conditions sociales a) par sa direction ; b) par sa liberté même, fruits d'un affranchissement dont le progrès social est le principal artisan. I — SA DIRECTION A) — Tout jugement se réclamant de la raison peut être envisagé a) comme la conclusion d'un raisonnement tacite ; b) la contrainte sociale peut peser de deux manières sur ce raisonnement : soit en faussant le rapport de conséquence par des conclusions préconçues, et c'est la mort de l'esprit : lier par exemple l'honneur d'une caste à une décision judiciaire et trouver des raisons de condamner un innocent (ou d'innocenter un coupable) soit en dirigeant seulement l'attention sur un sujet d'études intéressant, la conclusion devant être infirmée ou confirmée impartialement. B) — Il faut donc distinguer deux sortes de présuppositions du jugement (selon l'expression de W.

James), a) les unes interfèrent avec le jugement lui-même et en brouillent l'objectivité, donc en détruisent l'esprit même : à cet égard le « pragmatisme » n'est autre chose que la philosophie de l'idée obscure et confuse ; b) les autres président seulement au choix des concepts lequel dépend de conditions sociales : nous réagissons en face des choses par une désignation verbale qui recouvre une définition latente, fruit de l'expérience du groupe ; c) et d'une façon plus générale nous situons notre propre expérience dans les cadres (espace, temps, ordre causal) que la civilisation nous a légués. II — SA LIBERTÉ A) — Elle n'est pas menacée par la socialisation des concepts mais par celle des conclusions : justifier systématiquement un ordre économique, par exemple, en, imaginant à cette fin un système de lois pseudonaturelles. B) — Elle est donc, a) en raison directe de l'objectivité c'est à dire de l'impartialité b) définition : être partial c'est juger selon ses partis pris, être impartial C'est prendre parti selon son jugement, être neutre c'est n'oser point prendre parti.

L'impartialité consiste donc à reconnaître au-dessus du pour et du contre, la souveraineté du vrai. C) — Parmi les- conditions qui la favorisent a) figure au premier rang l'évolution sociale elle-même, b) qui met en évidence la loi suivante : l'individu gagne en liberté ce que le cercle social dont il fait partie gagne en extension : l'État par exemple l'émancipe des servitudes familiales, c) à la limite l'humanité ne serait pas comme la concevait Aug.

Comte, le tombeau des droits individuels, mais au contraire le lieu géométrique des libertés de ses membres, l'état rêvé par Kant ou chacun serait tout à la fois législateur et sujet. CONCLUSION « Travailler à bien penser » on aime ici à citer Pascal.

Bien penser ce n'est pas juger selon le groupe, mais selon le vrai, tâche à laquelle le groupe collabore.. »

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