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La vérité dépasse-t-elle l'individuel et le personnel ?

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« Introduction • Il nous faut, tout d'abord, définir la vérité : elle désigne ce à quoi l'esprit peut donner son assentiment — et qui consiste en un accord avec les phénomènes, ou avec un donné —.

Dépasser, c'est aller au-delà de et transcender, laisser en arrière de soi.

Quant à la notion d'individuel, elle représente ce qui concerne l'individu, c'est-à-dire l'être humain dans sa particularité, différent de tous les autres.

L'individuel ne doit pas être confondu avec le personnel, lequel se rapporte à la Personne, c'est-à-dire au sujet libre et responsable. Le sens de notre intitulé de sujet est, par conséquent, le suivant : ce à quoi l'esprit peut donner son assentiment — qui s'impose à l'intelligence et qui est en accord avec le réel — transcende-t-il la sphère de l'être humain particulier et du sujet responsable ? • Le problème est, dès lors, de comprendre si la vérité se rattache à des normes idéales et absolues ou bien s'il est possible de soutenir qu'à chacun appartient sa vérité.

Dans ce dernier cas, peut-être la vérité en son fond même disparaît-elle.

En effet, la vérité semble être objective ou n'être pas.

Dès lors, on saisit l'enjeu de la question : elle renvoie à l'immuabilité comme à l'essence profonde du vrai. 1.

Thèse : La vérité semble dépasser l'individuel et le personnel.

(Elle représente une réalité objective absolue.) Il semble, tout d'abord, possible de voir en la vérité une réalité transcendant infiniment la sphère de l'individuel et du personnel.

La vérité, dans cette perspective, ne saurait se confondre avec la subjectivité.

C'est dans la grande philosophie platonicienne que cette dimension « objective » apparaît avec netteté. a.

La vérité idéale et absolue, dépassant l'individu En effet, chez Platon, sa participation à l'Idée définit la vérité.

Le monde vrai, c'est celui de l'Idée, de la réalité idéale.

La vérité se confond avec l'Idée, paradigme intelligible des choses, type d'être idéal et non relatif, Modèle unique de chaque objet.

L'Idée est le principe purement intelligible de la pensée, l'espèce de roc idéal qui définit le vrai de manière non relative.

Dès lors, le Vrai transcende l'individuel et le personnel, le mouvement subjectif ; il s'identifie au Beau en soi, au Bon en soi, à l'Essence en tant que telle. b.

Cette vérité est immuable et éternelle Il va sans dire que ces Essences dépassant l'individuel sont immuables, soustraites au temps, incorruptibles, étrangères à la génération et à la corruption, au devenir, à la mobilité.

L'Idée, transcendant le subjectif et l'individuel, est le modèle impérissable de chaque objet, modèle existant en dehors du temps. c.

Elle est inséparable de la dialectique L'idée, en première approche, est donc ce noyau idéal, intelligible, permanent, éternel, qui définit le vrai.

Ce noyau idéal transcende infiniment l'ordre de la subjectivité et de l'individuel.

L'itinéraire vers le vrai se confond ici avec la dialectique, avec une ascension permettant de remonter de concept en concept, de proposition en proposition, jusqu'à la réalité intelligible dépassant la sphère subjective.

Dialectique, Idée et Vérité semblent donc unies, indissolublement.

Dans le monde moderne, la vérité scientifique, obtenue par une ascension perpétuelle, représente le prototype ou le substitut de cette forme éternelle du vrai, dont les mathématiques sont, dans notre culture, le modèle le plus achevé. Ainsi, la vérité transcende non seulement la sphère de la pure subjectivité, mais aussi le domaine de la Personne et du Sujet : en effet, c'est bien la Personne qui tend au vrai de toute son âme mais le vrai ne se confond ni avec la Personne ni avec le Sujet. d.

Cette conception du vrai peut engendrer le dogmatisme et même un modèle de politique autoritaire. Si la vérité dépasse infiniment la sphère de l'individuel, mais aussi de la Personne — laquelle peut seulement cheminer vers le vrai qui la transcende et appartient à un tout autre ordre — si donc le vrai est totalement objectif, nous remarquons que cette conception peut engendrer le dogmatisme et même un modèle de politique autoritaire. Le dogmatisme tout d'abord : si le vrai se situe au-delà du sujet, s'il est norme absolue, alors celui qui croit le détenir pense qu'il possède vraiment le savoir par excellence et ne peut donc admettre ni contestation ni discussion. Le risque est donc bien le dogmatisme défini comme le caractère d'une croyance se voulant incontestable.

Un modèle de pouvoir autoritaire (politique, religieux, social, etc.) peut, en second lieu, procéder de cette conception dogmatique.

C'est bien ce qui s'est passé dans la réflexion platonicienne (et aussi, il faut le reconnaître, très souvent, dans la réalité politique et sociale : cf l'Inquisition, les modèles « totalitaires », etc.).

Celui qui détient le vrai sans en douter tentera de l'imposer ou rêvera, comme le fit Platon, d'un pouvoir n'ayant rien de libéral.

Ainsi la Cité à laquelle songea Platon, dans la République, était-elle décrite, dans ce dialogue, comme un modèle autoritaire sacrifiant l'individu au bien de l'État. 2.

Antithèse : La vérité ne saurait transcender l'individuel et le personnel. a.

La mise en doute du vrai objectif et absolu Cet aboutissement autoritaire, inacceptable pour la personne et pour l'individu, nous conduit à mettre en doute la conception précédente.

La soumettre au doute signifiera suspendre le jugement jusqu'à ce que des éléments clairs se présentent à nous.

Comment, en effet, ne pas soumettre au soupçon cette vision du vrai, dogmatique et par conséquent dangereuse?. »

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