La religion exclut-elle l'usage de la raison ?
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«
[Introduction]
Selon son étymologie, la religion est un lien ou une mise en relation.
En latin, « religare » signifie relier.
La religion
relie l'homme à un être transcendant.
Une autre étymologie ferait dériver le mot « religion » de « religio » à savoir
l'intégrité, le scrupule à remplir ses devoirs.
On peut, à la lumière de ces deux hypothèses étymologiques, définir plus
précisément la religion comme système de croyances et de pratiques qui, dans le respect et la vénération, relie des
hommes entre eux et avec une ou des instance(s) non sensible(s), et donne sens à l'existence subjective.
Cette
définition présuppose la délimitation du monde en un domaine sacré et un domaine profane , qui serait le trait
universel de l'attitude religieuse : « Toutes les croyances religieuses connues présentent un même caractère
commun : la division du monde en deux domaines comprenant, l'un tout ce qui est sacré, l'autre tout ce qui est
profane, tel est le trait distinctif de la pensée religieuse » (« Les formes élémentaires de la vie religieuse »).
« On
pourrait dire que l'histoire des religions, des plus primitives aux plus élaborées, est constituée par les manifestations
des réalités sacrées.
De la plus élémentaire hiérophanie : par exemple, la manifestation du sacré dans un objet
quelconque, une pierre ou un arbre jusqu'à la hiérophanie suprême qui est, pour un chrétien, l'incarnation de Dieu
dans J.C.
C'est toujours le même acte mystérieux : la manifestation de quelque chose de « tout autre », d'une
réalité qui n'appartient pas à notre monde, dans des objets qui font partie intégrante de notre monde naturel,
profane.
» Mircéa Eliade.
Le sentiment religieux s'appuie donc sur la croyance en des êtres invisibles et puissants ou
en un Dieu personnel.
La religion est une dimension fondamentale de l'homme.
La croyance est irrationnelle, c'est-àdire qu'elle est peu ou mal fondée, alors que la réflexion exige une analyse logique, cohérente, sans sentiment.
Religion et exercice de la raison semblent donc s'exclure.
Qu'en est-il ?
[I - La raison est le domaine de la certitude, la foi celui de l'incertitude]
La réflexion est analytique et démonstrative.
La foi, au contraire, désigne une croyance qui ne s'appuie pas sur des preuves rationnelles mais sur des dogmes,
des vérités révélées.
La croyance est un assentiment à des affirmations dont la démonstration ou la preuve est insuffisante.
En
revanche, dans la foi, la question de l'insuffisance des preuves ne se pose pas.
Dans le christianisme, la vérité révélée oblige à distinguer entre croyance ordinaire, croyance religieuse et foi.
L'incertitude est balayée par la foi ; dans cette dernière, la confiance est absolue, et ce, sans recours aux
arguments rationnels ou aux preuves.
Si la croyance religieuse est encore habité par le doute, la foi l'évacue.
Aussi peut-on distinguer le « croire que »,
du « croire à » et du « croire en ».
Le « croire que » traduit-trahit une opinion, une conjecture.
Le « croire à »
exprime une implication plus personnelle.
Et enfin, le « croire en » manifeste une conviction, une confiance absolue.
Dans une perspective rationaliste, on peut dire que :
L'opinion est subjectivement et objectivement insuffisante.
La foi est subjectivement suffisante et objectivement insuffisante.
La science est subjectivement et objectivement suffisante.
Dans cette perspective, il y aurait une insuffisance de la foi par rapport à la science.
D'où, la nécessité pour le
rationalisme de tenter de prouver (par des arguments rationnels) l'existence de Dieu.
Qu'est-ce qui distingue la religion de la philosophie ? Si philosophie et religion convergent sur quelques points
(interrogation sur l'au-delà du sensible, immortalité de l'âme, destin de l'humanité et finalité de l'existence), elles ne
se fondent pas sur les mêmes sources.
LA religion admet une Révélation, la philosophie soumet toute affirmation à
la critique rationnelle.
Aussi, ne faut-il pas confondre le révélé et l'avéré.
La Bible n'est pas, pour le philosophie,
parole d'Évangile !...
Il convient de distinguer le Dieu des philosophes du Dieu de la foi chrétienne, « sensible au coeur » (Pascal) Ce Dieu
est :
• Annoncé par des prophéties dans les « Écritures ».
• Accomplit des miracles.
• Est prié et répond aux croyants.
• Fait vivre le fidèle par son amour et sa grâce.
• Les dogmes qui le concernent sont des mystères inaccessibles à la raison (Trinité, Eucharistie, Résurrection...).
Aucune de ses cinq caractéristiques du Dieu chrétien ne peut être admise par un philosophe rationaliste.
Celui-ci
limitera son Dieu à quelques principes métaphysiques : existence, statut de créateur, régulateur du monde).
Par
exemple, Voltaire refusait la notion de Dieu-Providence pour ne retenir que celle d'un suprême architecte de
l'univers, fondant par là même le déisme.
[II - La religion n'a pas besoin de raisons]
La vraie croyance religieuse est aveugle, elle se passe de preuves rationnelles : c'est un credo quia absurdum
pour saint Augustin..
»
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