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La religion comme aliénation de l’essence humaine ?

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« Termes du sujet: ESSENCE : C e qui fait qu'une chose est ce qu'elle est, sa nature.

L'essence est pensée comme éternelle ou au contraire comme en devenir. Du latin esse, « être ».

L'essence d'une chose, c'est sa nature, ce qui définit son être.

Une qualité essentielle s'oppose alors à une qualité accidentelle, c'est-à-dire non constitutive de l'être de la chose. RELIGION Étymologie discutée.

C icéron fait dériver le mot du latin relegere qui s'oppose à neglegere comme le soin et le respect s'opposent à la négligence et à l'indifférence.

D'autres font dériver le mot de religare: La religion est avant tout le lien qui rattache l'homme à la divinité : «La religion consiste dans un sentiment absolu de notre dépendance.» (Schleiermacher).

La religion c'est le sentiment que l'homme ne s'est pas donné lui-même l'existence, qu'il dépend d'un Être qui le dépasse infiniment.

Sociologiquement, les religions sont les divers cultes organisés (avec leurs dogmes et leurs rites) pour rendre hommage à Dieu. La religion s'enracine dans le sentiment du sacré.

Mais dans la société moderne, depuis le triomphe de la bourgeoisie, il semble que ce sentiment du sacré se soit évanoui ou ait été perverti. Feuerbach est l'un des premiers philosophes à avoir pris toute la mesure du caractère profane de notre société.

Il reconnaît que les hommes se sont si bien « appropriés » « le vrai », « l'humain » et « l'antisacré » que le « christianisme a perdu toute force de résistance ».

Le christianisme, écrit-il, « est nié », « nié dans l'esprit et le coeur, dans la science et la vie, dans l'art et l'industrie, radicalement, sans appel ni retour » : « L'incroyance a remplacé la foi, la raison la Bible, la politique la religion et l'Eglise, la terre a remplacé le ciel, le travail la prière, la misère matérielle l'enfer, l'homme a remplacé le chrétien ».

Et, ajoute Feuerbach, « si dans la pratique l'homme a remplacé le chrétien, il faut alors que dans la théorie aussi l'être humain remplace l'être divin ».

Ce qui signifie que la philosophie doit cesser d'être « théologie » pour devenir « anthropologie ».

Dans « L'essence du christianisme », Feuerbach montre que, dans la religion, l'homme est aliéné, cad dépossédé de lui-même, de sa propre essence.

La religion n'est jamais que le mystère de l'homme fait Dieu.

Autrement dit, ce ne sont jamais que ses propres perfections et ses propres attributs que l'homme adore en Dieu.

L'homme s'est ainsi dépouillé de son être pour l'attribuer à une réalité étrangère, Dieu : « Pour enrichir Dieu, l'homme doit s'appauvrir ; pour que Dieu soit tout, l'homme doit n'être rien » (« L'essence du christianisme ») La religion est « la première conscience de soi de l'homme, mais elle est indirecte ».

En elle, l'homme « a pour objet son propre être sous forme d'un autre être ».

La religion chrétienne est « la relation de l'homme à lui-même, ou plus exactement à son essence, mais à son essence comme à un autre être ».

Aussi la tâche de la philosophie est-elle de faire reconnaître à l'homme sa propre essence au lieu qu'il adore en un autre être, nommé Dieu.

Pour Feuerbach, il y a du divin, car le savoir ou l'amour sont choses divines mais il n'y a pas de Dieu.

Il peut donc exister une religion sans Dieu. Le véritable athée est seulement « celui pour lequel les prédicats de l'être divin, comme par exemple l'amour, la sagesse, la justice, ne sont rien, et non pas celui pour lequel seul le sujet de ces prédicats n'est rien ».

Il ne suffit donc pas de nier l'existence de Dieu ou « le sujet de ces prédicats » pou être athée, il se propose seulement de renverser la théologie en intervertissant le sujet et le prédicat : au lieu de dire « Dieu est sage et bon », il dit « l'homme est sage et bon ».

Feuerbach substitue donc à la religion de Dieu celle de l'homme.

Autrement dit, l'homme doit adorer en lui-même les qualités qu'aucun individu ne peut sans doute réaliser entièrement, mais qui sont cependant celles de l'espèce humaine.

Réaliser l'essence humaine est l'affaire de la politique.

Cette finalité est en son fond religieuse, puisqu'il s'agit d'actualiser tout ce qu'il y a de possibilité divine en l'homme : « Il nous faut redevenir religieux, il faut que la politique devienne notre religion.

» « L'opposition du divin et de l'humain est une opposition illusoire, elle n'est, autrement dit rien d'autre que l'opposition entre l'essence humaine et l'individu humain, et par suite l'objet et le contenu de la religion chrétienne sont eux aussi humains de part en part. La religion, du moins la religion chrétienne, est le rapport de l'homme avec lui-même, ou plus exactement avec son être, mais un rapport avec son être qui se présente comme un être autre que lui.

L'être divin n'est rien d'autre que l'être humain, ou plutôt, que l'être de l'homme, débarrassé des bornes de l'homme individuel, cad réel et corporel, puis objectivé, cad contemplé et adoré comme un être propre, mais autre que lui et distinct de lui : c'est pourquoi toutes les déterminations de l'être divin sont des déterminations de l'être humain » Feuerbach, « L'essence du christianisme ». Feuerbach développe une critique matérialiste du christianisme, et par-delà, de toute religion pourvue d'un ou plusieurs Dieux : le divin n'existe pas hors de l'humain, il n'est que la projection imaginaire que l'homme fait de sa propre espèce.

Tout Dieu est anthropomorphe, car c'est l'homme qui l'a créé à son image.

En Dieu l'homme se reproduit, enrichi des attributs de perfection et d'infini : « La conscience de Dieu est la conscience de soi de l'homme », mais de cela il n'en a pas conscience.

Il croit en ce Dieu illusoire.

Sa conscience est donc aliénée, cad dépossédée au profit d'un autre être, d'ailleurs imaginaire.

L'homme se pense lui-même , mais comme un être autre que lui.

Le christianisme est la plus aliénante et la dernière des religions : la religion la plus aliénante car la notion inédite de l'homme-Dieu dépouille totalement l'homme de la conscience de son statut réel, au profit d'une représentation imaginaire de lui-même ; et la dernière des religions, parce qu'elle annonce la mise au jour de la vraie nature de la religion : une nature purement et strictement humaine.

Tels sont les principes du matérialisme athée. « Le fondement de la critique irréligieuse est : c'est l'homme qui fait la religion, ce n'est pas la religion qui fait l'homme.

» Marx, Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1844. « Qu'est-ce que la religion ? — Un besoin apparu à un stade d'évolution inférieur et dont la classe supérieure s'est servie pour tenir la classe inférieure sous sa domination.

» Strindberg, Petit catéchisme à l'usage de la classe inférieure, 1886. « Peut-être n'y a-t-il rien de si vénérable dans le christianisme et le bouddhisme que leur art d'enseigner même aux plus humbles à trouver, grâce à la piété, leur place dans un ordre imaginaire et supérieur des choses; ils continuent ainsi de se satisfaire de l'ordre réel qui leur fait la vie si dure, — dureté qui est précisément nécessaire.

» Nietzsche, Par-delà le bien et le mal, 1886. « La religion est le soupir de la créature opprimée, l'âme d'un monde sans coeur, de même qu'elle est l'esprit de situations dépourvues d'esprit.

Elle est l'opium du peuple.

» Marx, Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1844. La religion, selon Marx, concourt à endormir la conscience politique du peuple, en ce qu'elle lui fait miroiter dans un illusoire au-delà des joies qu'il ne peut trouver ici-bas.

 me d'un monde sans âme, la religion masque à l'homme sa véritable condition.

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