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la conscience me fait'elle connaitre que je suis libre?

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« Introduction Le fait est que notre conscience, telle qu'elle se manifeste naturellement, nous donne régulièrement une sens ation de liberté.

Nous avons le s entiment de penser et de faire ce que nous voulons librement.

Si cet état de fait ne peut être c ontesté, on peut se demander si un tel sentiment, qui n'est pas de l'ordre de la raison, saurait fonder une connaissanc e de notre liberté.

Et si non, s'il n'est pas possible que la conscience nous fasse c onnaître autre chose que notre liberté.

Il faudra donc répondre aux questions suivantes : qu'est-ce qu'être libre pour un être humain ? Sur la base de la réponse à cette question, nous en examinerons simultanément une seconde : de quelle connaissance de cet état de liberté ou non est susceptible la consc ience ? I Sentiment de liberté et connaissance du déterminisme : l'opposition Rousseau/Spinoza -Rous seau : la conscience est fondamentalement sentiment de liberté (Émile ou de l'Éducation).

Il y a donc une prétention de la conscience à connaître sa propre liberté, et celle de mon être ; car le s entiment se présente comme évidence.

M ais il faut justement refuser cette évidence que nous tend le sentiment de liberté, pour garder à l'esprit notre question : un sentiment de liberté, est-ce une connaissanc e de liberté ? -Spinoza : dans l'Éthique, remise en question de cette primauté du s entiment.

Pour Spinoza, c'est l'effet d'une confusion : le sentiment est une illus ion humaine qui provient d'un manque de c onnaissance rationnelle, et en même temps masque ce dernier.

Il faut en revenir à une c onnaissance rationnelle de notre état ou non de liberté, c 'est-à-dire analyser la chaîne causale qui détermine notre état de conscience et notre état du corps.

Notre être est-il capable de fonder une cause en soi, indépendante du déterminisme qui régit le rapport entre les êtres créés par Dieu ? La réponse de Spinoza est non, toute connaiss ance que nous fournit notre consc ience est donc une connaiss ance d'absence de liberté. Le rationalisme cartésien nous montre déjà qu'une volonté infiniment libre, mais privée de raison, est une volonté perdue. P lus nous connaissons, plus notre liberté est grandie et fortifiée.

Si nous développons notre connaissance au point de saisir dans toute sa clarté l'enchaînement rationnel des causes et des effets , nous saisirons d'autant mieux la nécessité qui fait que telle chose arrive et telle autre n'arrive pas, que tel phénomène se produit, alors que tel autre ne viendra jamais à l'existence.

P our Spinoza, une chose est libre quand elle existe par la seule nécess ité de sa propre nature, et une chose est contrainte quand elle est déterminée par une autre à exister et à agir.

A u sens absolu, seul Dieu es t infiniment libre, puisqu'il a une connaissanc e absolue de la réalité, et qu'il la fait être et exister suivant sa propre nécessité.

P our Spinoza et à la différenc e de Descartes, la liberté n'est pas dans un libre décret, mais dans une libre néc essité, c elle qui nous fait agir en fonction de notre propre nature.

L'homme n'est pas un empire de liberté dans un empire de nécessité.

Il fait partie du monde, il dispose d'un corps, d'appétits et de passions par lesquelles la puissanc e de la Nature s'exerce et s'exprime en nous, tant pour sa propre conservation que pour la nôtre.

Bien souvent nous croyons être libres, alors que nous ne faisons qu'être mus, par l'existence de causes extérieures : la faim, la puls ion sexuelle, des goûts ou des passions qui proviennent de notre éducation, de notre pass é, de notre culture.

Nul homme n'étant coupé du milieu dans lequel il vit et se trouve plongé, nous sommes nécess airement déterminés à agir en fonction de caus e s extérieures à notre propre nature.

"Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d'avoir et qui consiste en cela seul que les hommes sont c o n s c ients de leurs désirs, et ignorants des causes qui les déterminent." II Tentative et échec d'une connaissance de notre liberté par le sentiment : Kant et Freud -Kant : D ans la Critique de la raison pratique , Kant fait le c onstat de l'impossibilité de démontrer pos itivement la liberté humaine (même conclus ion que Spinoza).

C ependant, Kant estime pouvoir prouver l'existence de cette liberté à travers le constat de l'existence d'un s entiment moral chez l'homme.

C e sentiment n'a de sens que parce que l'homme es t libre ; s 'il était complètement déterminé, le sentiment moral ne pourrait exister.

Par conséquent, la connaissance que la conscience me donne de ma liberté est de l'ordre du sentiment : mais un sentiment d'une autre nature que celui proposé par Rousseau.

C e n'est plus un sentiment contingent de liberté, c'est un s entiment moral qui est fondé néc essairement par l'existenc e de la liberté. -Le raisonnement de Kant reposait sur l'univers alité du s entiment moral, lequel s 'élevait au-dessus de toute c ontingence empirique.

Dans Le ça et le moi, Freud met à mal cette c onception, en ramenant le sentiment moral à une intériorisation des normes sociales par le M oi, sous l'autorité de l'instance du Surmoi.

Dès lors , le s entiment moral n'es t pas susceptible de faire connaître sa liberté à l'homme.

La connaiss ance rationnelle non plus : ce que l'homme déc ouvre avec Freud, c'est la détermination d e s a c o n s c i e n c e par des pulsions inconscientes.

M a i s Freud va plus loin que Spinoza : là où Spinoza pensait que connaître l'indétermination supprimait l'illusion de liberté, Freud nous prévient que cette connaissance rationnelle n'empêchera pas la production illusoire d'un sentiment de liberté. III Prendre conscience de sa détermination : un facteur de libération ? Nietzsche et Bourdieu - N o u s sommes parvenus à une vraie impasse chez Freud : l a c o n s c i e n c e ne peut connaître sa liberté, ni ressentir sa détermination ; elle ne peut que connaître son absence de liberté et ress entir tout de même cette liberté.

M ais cette impas se est due à une c onception spécifique de la liberté comme libération de tout déterminisme causal.

Nietzsche ne la conçoit pas ainsi : pour lui, la liberté c onsis te à vouloir la nécessité de ce qui m'arrive ( Le gai savoir).

Il faut devancer sa propre détermination, s'accepter comme déterminé pour utiliser pleinement les pos sibilités de vie qui nous sont ainsi offertes.

En changeant ainsi de conception de la liberté, qui ne s'oppose plus à la nécess ité, ma conscience peut connaître les déterminations qui me cons tituent sans pour autant que le sentiment de liberté qui naît de l'affirmation de s es déterminations soit c ette fois illégitime. -Pour illustrer cette doctrine, on peut penser à ce qu'explique Bourdieu dans les Questions de sociologie.

Il précise ains i qu'avoir conscience pour un individu de ses déterminations sociales, de classe par exemple, permet d'optimiser son utilisation de c es structures déterminées, et ainsi de mieux les maîtriser pour pouvoir espérer modifier l e s modalités d e c e t t e détermination.

C omme chez Nietzsche, il s 'agit ici d'explorer une connaissanc e c o n s c i e n t e de détermination pour parvenir à produire un sentiment légitime de liberté. Conclusion -La c onscience ne me connaît pas comme libre : elle me fait libre, elle me libère. - C ar toute connaissance rationnelle de la c onscience quant à la liberté parvient au constat d'un déterminisme nécessaire, auquel s'oppose un sentiment naturel de liberté. - A rtic uler les deux, c'est définir une connaissance consc iente pos sible de la liberté.

En montrant c omment la connais sance d'une détermination pouvait favoriser la marge de la liberté d'un s ujet, on en conclut que la c o n n a i s s a n c e de notre liberté qu'a notre c onscience est pratique, en acte, sans avoir forcément besoin de concevoir une liberté abstraite des déterminations empiriques du monde.

Et c'est cette dimension pratique qui est signalée par le sentiment de liberté.. »

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