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La conscience historique est-elle un anti-destin ?

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« L'objet focalisant cet énoncé est la notion de " conscience historique ".

Mise en relation avec l'idée de liberté, dont la possibilité est supposée par l' " anti-destin ", le thème de l'énoncé s'articule autour des questions de l'histoire et du déterminisme, c'est-à-dire porte implicitement sur la manière dont le déploiement de l'histoire se trouve conditionné, et s'interroge sur la possibilité de s'affranchir (" anti-destin ") dudit conditionnement par la conscience (historique). Le problème de l'énoncé peut se construire à partir de l'ambiguïté définitionnelle de la notion de " conscience " dans l'expression de " conscience historique ".

L'ambiguïté relative à l'acception du terme de " conscience " tient au fait qu'elle peut tantôt signifier l'idée d'une présence à soi dans la réflexivité (con-science) assurant alors la possibilité d'une prise de distance en laquelle se constitue un espace critique (être conscient signifiant alors l'esprit critique) ; tantôt se comprendre comme savoir du passé, c'est-à-dire contenu de connaissance opposé l'oubli qui serait alors in-conscience.

Dans les deux cas, la conscience semble se caractériser par la connaissance de ce qui est déterminé (l'histoire est histoire en tant qu'elle à un sens, autrement dit se définit par sa rationalité – Hegel] : s'étant déjà passé dans le cas de la conscience comme souvenir ou se passant et pouvant se passer (dans le cas de la prise de distance qui permet de saisir les relations de déterminations opérant dans tout processus historique). En conséquence, il s'agit de penser si et comment la conscience du déterminisme de l'histoire peut-elle conduire à, ou plutôt produire de la liberté, c'est-à-dire " être un anti-destin " ? L'enjeu du développement est double car constitué en relation à l'ambiguïté définitionnelle de la notion de " conscience " (comme acte ou contenu). I.

La conscience historique comme acte Une première acception de la notion de conscience la considère comme acte réflexif de présence à soi (con-).

Dans cette dynamique réflexive, ou de retour sur soi, est engendré l'espace d'une prise de distance critique.

Ainsi la conscience peut être comprise comme mise en perspective, et dans le contexte de l'histoire, mise à distance des événements historiques, mise en contexte, re-contextualisation.

Une fois assurée cette prise de distance critique relativement au déploiement du contenu historique (les faits et autres événements resitués dans un contexte), il est enfin possible d'en saisir la logique, le sens, le processus causal de détermination (des événements).

La " conscience historique " est par là historiciste ou historicisante, autrement dit elle contextualise le réseau de déterminations relativement auquel se déploie l'histoire.

La " conscience historique " est donc également relativiste puisqu'affirmant que tout historique est contextuel (c'est là le sens de l'historicisme).

En conséquence, la " conscience historique " s'oppose à tous passivité et fatalisme en tant qu'elle est prise de conscience (réflexive) de la détermination, ou encore du déterminisme relatif histoire. L'historicisme propre à la conscience historique ainsi définie consiste en le savoir du déterminisme de l'histoire, c'est-à-dire en la connaissance des causes de la nécessité, ou " destin ".

La connaissance des causes de la nécessité (ou " destin "), en tant que cette dernière est relative parce que contextuelle (l'historicisme), est facteur de liberté – une telle conception de liberté est proche de celle de Spinoza pour qui la liberté consiste en la conscience d'être déterminé.

Si la conscience historique comprise comme conscience du déterminisme historique, c'est-à-dire du destin, produit la liberté, est-ce là pour autant un " anti-destin " ? Pensée comme " anti-destin ", la " conscience historique " aurait à opérer comme un remède, un antidote au phénomène à la nécessité historique.

Mais si la liberté de la " conscience historique " consiste en la conscience de l'aspect déterminé de l'histoire, l'historicisme étant une structure statique et rétrospective, alors, plus qu'un " anti-destin ", la " conscience historique " serait un " anti-histoire ".

Telle est l'ambivalence de l'antidote qui de remède peut devenir poison.

Une hyperconscience du déterminisme historique conduirait à l'abolition de l'action, autrement dit de la possibilité de l'histoire. II.

La conscience historique comme contenu Dans sa seconde dimension, la " conscience historique " se caractérise par sa forme, le fait d'être contenant.

Ainsi comprise, elle consiste en la possession de souvenirs devenus savoirs et assurant la connaissance (des faits) du passé, en opposition à leur ignorance qui caractériserait alors l'inconscience historique.

Pouvant revêtir une dimension éthique ou morale, la " conscience historique " est ici la condition de la constitution (du contenu) de l'histoire comme suite d'événements connus et répertoriés. Dans un tel rapport rétrospectif à l'historique, la savoir (du contenu de l'histoire) permet d'éviter le retour aveugle du même, la répétition à l'identique du passé : autrement dit la fatalité de la répétition du passé à l'avenir (telle est la fonction du devoir de mémoire).

Le caractère d' " anti-destin " propre à la " conscience historique " dans cette seconde acception réside dans l'évitement de la fatalité pensée comme reproduction.

Mais avoir pour fonction d'éviter la répétition du même, n'est pas là une nouvelle forme de détermination, de nécessité, voire de destin ? De plus, se déterminer négativement à l'agir (se souvenir pour ne pas reproduire) ne risque-ce pas de générer à nouveau l'improductivité ? En conséquence, si l'histoire se définit par son déploiement dans le temps comme devenir, autrement dit comme advenir de la nouveauté, alors elle ne peut se fonder en la " conscience historique " comprise comme contenu de connaissance relative au passé, car tout autant qu' " anti-destin ", cette dernière est anti-historique (la peur de la reproduction du même, le spectre du passé rend impuissant l'à venir du futur).

Ainsi, l'histoire, pour se réaliser, c'est-à-dire devenir, exige l'oubli, cette part d'inconscience (historique) permet de s'extraire de la fatalité statique de la " conscience historique ". Conclusion - La " conscience historique " permet, dans les deux sens de son acception (comme acte ou comme contenu), de s'extraire du déterminisme de l'histoire, c'est-à-dire du destin, par la prise de distance critique ou par la rétention cognitive (le souvenir).

Mais plus que devenir un " anti-destin ", elle se fait anti-devenir car elle cause la staticité rétrospective (dans le premier cas) ou l'impuissance à l'à venir (dans le second cas).

Ainsi, si elle est un " anti-destin ", c'est en tant qu'anti-devenir, ou encore anti-historique.

Raison pour laquelle est doit être pondérée (éviter l'excès de l'hyper-conscience) – ce qui ne peut se faire que par l'octroi d'une autre fonction que l'extraction de la fatalité, par l'abandon de la notion d' "anti-destin ".. »

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