La connaissance scientifique est-elle limitée ?
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APPROCHE: Si la connaissance scientifique est limitée, est-ce par un mouvement que l'on imposerait de
l'extérieur à la science ? Les progrès de la connaissance scientifique seraient limités par des considérations
techniques (on ne peut pas, et on n'est pas près, de faire des expériences sur Mars ou à l'autre bout de la galaxie,
par exemple).
Les exigences morales limitent cette connaissance.
Mais le véritable enjeu concerne des limites
internes à la science : des limites extérieures, ce sont des limites qu'on pourra toujours dépasser (on pourra
toujours progresser sur le plan technique et éventuellement, en droit, faire des expériences un jour sur Mars, etc.,
ce n'est pas contradictoire en soi) ou transgresser (on peut toujours ne pas tenir compte des interdits moraux ou
même de la loi pour faire des expériences interdites, c'est possible).
Autrement dit, les limites de fait ne sont pas
suffisantes ; et le vrai problème philosophique, c'est de déterminer s'il y a oui ou non des limites de droit (inhérentes
à la science, constitutives de ce qu'est la connaissance scientifique, constitutives par exemple des conditions de
l'expérience, puisque la connaissance scientifique se définit entre autres par la possibilité d'expérimentation) de la
science.
Ce serait des limites qu'on ne pourrait jamais dépasser parce qu'elles seraient constitutives de ce que doit
respecter la connaissance scientifique pour être ce qu'elle est.
Quelles pourraient être ces limites ? La connaissance
scientifique suppose la possibilité d'une expérimentation.
Or n'y a-t-il pas des phénomènes dont on ne peut faire
l'expérience, pour des raisons non externes mais constitutives de ce qu'est une expérience ?
Introduction
Les connaissances dites scientifiques sont censées être certaines.
La science ne traite pas de l'opinion ou de
la croyance, mais de la vérité.
Elle doit démontrer, expérimenter.
Pourtant, le progrès des sciences manifeste bien
leur incomplétude : si nous en savons plus aujourd'hui que nous n'en savions hier, c'est que les théories élaborées
hier étaient soit fausses, soit, et c'est ce qui arrive la plupart du temps, incomplètes.
Mais ce progrès effectivement
constatable de la science n'est-il pas en contradiction avec sa visée première, qui est d'atteindre la vérité ? Ces
deux caractéristiques sont-elles compatibles ? On pourrait alors répondre au paradoxe en disant qu'une
connaissance scientifique a effectivement des limites, puisqu'elle n'est valable qu'au regard de ce qui est connu au
moment où elle est tenue pour vraie, et dépend également des observations ou expérimentations que l'on est en
mesure de faire.
Autrement dit, une connaissance est toujours lacunaire ou imparfaite parce qu'elle est relative aux
données qui sont à sa disposition, et qu'elle ne peut se donner pour vraie indépendamment de ces données.
Pour
autant, le progrès nous montre que les connaissances scientifiques en tant que telles se perfectionnent : ne faut-il
donc pas entendre alors le terme limite en un sens mathématique, auquel cas les connaissances scientifiques
tendraient à la vérité sans jamais pouvoir l'atteindre définitivement ?
I.
Les connaissances scientifiques sont limitées par l'expérience de laquelle elles sont
tributaires
Pascal, dans la préface au Traité du vide établit une distinction entre les matières fondée sur l'autorité (la
théologie et l'histoire) et celles fondées sur l'expérience et le raisonnement (la
physique par exemple).
Pour ce qui est des premières, elles sont entièrement
finies, puisqu'elles sont déjà écrites, il ne reste qu'à apprendre ce qui a été
fait par d'autres.
Par contre, pour ce qui est des matières fondées sur le
raisonnement, l'autorité des Anciens n'y a aucune place.
En effet, si les
anciens disent qu'il n'y a pas de vide dans la nature, c'est parce qu'ils n'en ont
effectivement pas observé.
Leur théorie n'est pas fausse relativement à leurs
expérience.
Mais nous qui avons pu en constater, nous ne pouvons nier
l'expérience au nom d'une théorie.
Une théorie scientifique n'est donc jamais vraie absolument, mais
uniquement relativement aux observations et expérimentations qui peuvent
être faites.
C'est pourquoi une connaissance ne peut être achevée ni vraie de
manière illimitée.
Exemple : pour le vide, c'est le fait que les hauteurs de
Florence aient dû être habitée (en raison d'une augmentation de population)
et que l'on tente d'y construire des fontaines en puisant l'eau qui a permis de
se rendre compte qu'une partie du tube n'était jamais remplie et qu'lors on a
pu en déduire qu'il y a peut-être du vide.
Pour Pascal, en physique, le seul
axiome, c'est l'expérience.
Elle prime et dirige la science, mais la science
demeure donc dépendante d'elle.
Karl Popper se sert même de cette dépendance pour distinguer la connaissance scientifique de toute autre
connaissance : selon lui, pour être scientifique, une théorie doit pouvoir être réfutée par l'expérience.
Il exclut ainsi
la psychanalyse du champ des sciences, justement parce qu'elle n'est incapable de fournir la moindre expérience
probante de la validité de ses théories.
Pour être scientifique, une théorie doit pouvoir énoncer des prédictions
susceptibles d'être vérifiées et ainsi d'être confirmées ou infirmées par l'expérience.
Les connaissances scientifique
sont donc limitées en deux sens : dans un premier sens, elles sont limitées parce qu'elles ne sont vraies qu'à une
période donnée, mais sont toujours susceptibles d'être déclarées fausses, et limitées enfin parce qu'elles ne peuvent
porter que sur certains objets déterminés : ceux dont on peut faire l'expérience.
L'histoire des sciences physiques est celle de leur révolution permanente.
Les théories n'ont qu'une valeur
provisoire.
Des faits « polémiques » surgissent qui les contredisent, qui obligent à des révisions.
Tout succès.
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