Faut-il vouloir penser par soi-même?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
La forme de notre sujet est une question fermée : il s'agira d'y répondre par « oui » ou « non » en conclusion,
au terme de l'argumentation qui fait l'objet du corps de la dissertation.
L'argumentation est toujours la défense
d'une thèse, c'est-à-dire, une prise de position par rapport à un problème qu'il s'agit de mettre au jour dans
l'introduction.
Pour faire surgir le problème qui sommeille dans le sujet, il convient d'analyser les termes qui
composent celui-ci :
Nous relevons trois termes essentiels qui composent le sujet : « faut-il », qui se rapporte à la notion de devoir,
d'obligation, « vouloir », qui se rapporte à la notion de volonté, et « penser par soi-même ».
C'est sur ce
troisième terme qu'il faudra d'abord concentrer notre attention.
« penser par soi-même » semble indiquer une autonomie de la pensée.
Il faudra se demander jusqu'à quel point
elle est possible.
La volonté s'articule toujours avec deux termes : l'objet sur lequel elle porte (nous voulons toujours quelque
chose), et le motif qui fait se porter la volonté sur son objet (nous voulons quelque chose pour une raison
particulière).
Notre sujet nous demande si il faut vouloir penser par soi-même, autrement dit, si il existe un motif qui serait
en même temps un devoir qui justifierait que l'on dirige notre volonté vers l'autonomie de la pensée.
Si nous
trouvons un motif, il faudra alors se demander s'il peut être élevé au rang de devoir, c'est-à-dire d'un motif
inconditionné, qui s'impose à nous.
Un simple motif ne s'impose en effet pas directement : il entre en
concurrence avec d'autres motifs qui nous invitent à diriger autrement notre volonté.
Préférer tel ou tel motif
résulte donc d'une délibération, alors qu'on ne délibère pas sur un devoir puisqu'il s'impose.
Problématisation :
Rappelons que la problématique est l'ensemble des problèmes qui gisent sous le sujet, hiérarchisés en vue de leur
résolution dans le corps de la dissertation.
Pour qu'il faille vouloir penser par soi-même, il faut déjà que ça soit
possible.
Le premier problème que nous devons résoudre pour pouvoir répondre à la question du sujet peut donc se
formuler sous la forme de la question suivante :
1.
Dans quelle mesure peut-on penser par soi-même ?
Répondre à cette première question limitera déjà le champ de la pensée autonome.
Il faudra alors trouver un motif
qui nous fera vouloir penser par nous-même, puis nous demander s'il est aussi un devoir.
D'où les questions :
2.
Y a-t-il des raisons de vouloir penser par soi-même ?
3.
Ces raisons, s'il y en a, sont-elles des devoirs ?
Proposition de plan :
I – Dans quelle mesure peut-on penser par soi-même ?
Supposons que sommes en train de lire Les pensées de Pascal.
Qui pense à ce moment ? C'est bien moi qui perçoit
et comprend les signes (les lettres) écrits sur les pages su livre.
Le phénomène de pensée m'appartient en propre.
Cependant, je ne peux penser que par l'intermédiaire de quelque chose qui m'est totalement extérieur, à savoir le
livre.
Je ne pense donc pas entièrement par moi-même dans cet exemple.
Demandons alors : à quelle condition doit
satisfaire une pensée qui se constituerait par elle-même ? L'exemple précédent nous fournit un élément de réponse :
elle ne pourra pas se porter sur ce qui lui est extérieure.
La pensée absolument autonome est donc celle qui se
prend elle-même pour objet.
Référence : Descartes, méditations métaphysiques, (seconde méditation)
« Mais que sais-je s'il n'y a point quelque autre chose différente de celles que je viens de juger incertaines,
de laquelle on ne puisse avoir le moindre doute? N'y a-t-il point quelque Dieu, ou quelque autre puissance, qui me
met en l'esprit ces pensées ? Cela n'est pas nécessaire; car peut-être que je suis capable de les produire de moimême.
Moi donc à tout le moins ne suis-je pas quelque chose ? Mais j'ai déjà nié que j'eusse aucun sens ni aucun
corps.
J'hésite néanmoins, car que s'ensuit-il de là ? Suis-je tellement dépendant du corps et des sens, que je ne
puisse être sans eux ? Mais je me suis persuadé qu'il n'y avait rien du tout dans le monde, qu'il n'y avait aucun ciel,
aucune terre, aucuns esprits, ni aucuns corps; ne me suis-je donc pas aussi persuadé que je n'étais point ? Non
certes, j'étais sans doute, si je me suis persuadé, ou seulement si j'ai pensé quelque chose.
Mais il y a un je ne sais
quel trompeur très puissant et très rusé, qui emploie toute son industrie à me tromper toujours.
Il n'y a donc point
de doute que je suis, s'il me trompe; et qu'il me trompe tant qu'il voudra, il ne saurait jamais faire que je ne sois
rien, tant que je penserai être quelque chose.
De sorte qu'après y avoir bien pensé, et avoir soigneusement examiné
toutes choses enfin il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition: Je suis, j'existe, est
nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce, ou que je la conçois en mon esprit.
»
Lorsque nous nous pensons penser, nous nous assurons de ce dont rien d'autre (rien d'extérieur à notre pensée, pas.
»
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