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Faut-il respecter la nature ?

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« La science, la technique, l'industrie modernes ont conjugué leurs forces pour traiter la nature en objet.

Le regard, froid de la science, la violence de la technique et de l'industrie ont, pour reprendre l'expression de Max Weber, « désenchanté » le monde.

L'antique vénération que les hommes avaient pour une nature toute-puissante, vénération mêlée de crainte, a disparu avec le triomphe de la révolution industrielle.

Là où les Grecs voyaient un dieu (le Soleil), la science moderne y voit une boule de feu, là où les Indiens voyaient une déesse (l'Himalaya), la science moderne y voit un plissement de terrain.

Éventrer la terre, détourner un fleuve, raser des forêts présupposent et impliquent en même temps l'abandon de l'attitude magique et religieuse qui fut celle des hommes pendant des millénaires. Mais ce prométhéisme risque de se retrouver contre son auteur : la moderne sensibilité écologique témoigne d'une réelle inquiétude. 1) L'impossible respect. • Respecter un être ou une chose, c'est le (la) regarder digne d'être maintenu(e) dans son intégrité, c'est donc refuser toute relation de puissance - domination ou conquête - envers lui (ou elle).

Or, le développement historique de l'homme face à la nature contredit cette attitude. • On peut en effet appeler culture l'ensemble des moyens grâce auxquels l'homme nie la nature et dépasse son animalité première : la chasse, la cueillette, l'élevage, la construction, etc., sont autant de moyens pour nier la nature et la dépasser. • Rien n'est plus opposé au respect que l'exercice de la puissance.

Or, la culture est un nom pour la puissance.

À la différence de Dieu - toujours soumis à l'hypothèse de son existence - l'homme ne peut ni créer ni transformer sans détruire : bâtir une ville ou creuser une route, c'est nécessairement bouleverser un milieu naturel.

La culture (ou l'histoire) est l'ensemble des attentats que l'homme a perpétrés contre son milieu d'origine.

L'humanité de l'homme réside dans ce bouleversement. • Respectare en latin, d'où vient notre respect, signifie « regarder en arrière ».

Or, l'homme est un être qui aussi regarde en avant, qui prospecte.

Les pionniers regardent moins la forêt saccagée que la nouvelle ville construite à sa place. 2) Le respect possible est souhaitable. Nous ne pouvons, néanmoins nous comporter sans égard ni soin. • C'est d'abord une affaire d'intérêt bien compris.

La nature reste un milieu de vie nécessaire et universel : sa destruction nous menacerait dans notre survie. • C'est aussi une question de devoir que nous avons envers l'humanité future.

Un proverbe indien dit : « Nous n'avons pas hérité la terre de nos ancêtres, nous l'avons empruntée à nos enfants.

» • Certes nous ne pouvons suivre le point de vue de ces « conservationnistes » qui voudraient arrêter tout le travail de l'homme, au nom d'une pureté originelle plus fantasmatique que réelle.

Et le terme de respect ne peut pas être galvaudé. On peut élargir la notion de respect et l'appliquer à la création de celui qui est lui-même objet de respect.

Ainsi les oeuvres d'art sont-elles, parmi toutes les productions humaines, celles qui suscitent en nous le plus fort respect, parce qu'à nos yeux, elles témoignent de l'incomparable génie de l'homme.

En ce sens la nature peut être respectée : non parce qu'elle ne doit pas être touchée (ce n'est ni possible ni souhaitable) mais parce qu'en cette fin de siècle, elle est devenue aussi proche, aussi fragile et aussi petite qu'un jardin.. »

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