Faut-il respecter en autrui le semblable ou bien l'être différent de nous ?
Extrait du document
«
Respecter est le fait d'accepter l'existence de quelque chose, sans vouloir la modifier.
Si l'on ne respecte pas, on
a tendance à vouloir transformer, détruire ce qui nous dérange.
Le semblable est l'ensemble des points communs
physiques et psychologiques, ou seulement les similitudes que l'on partage avec autrui, le différent étant l'ensemble
des divergences physiques et psychologiques que l'on a avec le ou les autres.
Comment articuler ces deux
acceptions de ressemblance et de différence par rapport au respect ? Pourquoi est-ce une obligation ou un devoir
("faut-il") ? Au nom de quelle idée de l'homme ? de la culture ? Qu'est-ce que le respect de ce qui n'est pas moi ?
Qu'est-ce que je respecte en l'autre qui n'est pas moi ? Puis-je respecter ce que je ne suis pas ? Vis-à-vis de soimême, n'y a-t-il pas un devoir de respecter ce qui est semblable ? Respecter l'autre alors est se respecter soi.
Par
rapport à une cohésion de groupe, le respect de la différence est-il nécessaire ou au contraire est-il une source de
conflit ? Comment peut-on poser une alternative ("ou") ? N'est-il pas nécessaire de savoir concilier les deux ? Est-ce
impossible ? Peut-on respecter un être dans son entier ? Le respect de ce qui est semblable exclut-il le respect de
la différence ? Pour Kant, je respecte une "personne" en qui je reconnais l'humanité tout entière.
Elle ne peut qu'être
fin de mon action morale, jamais un moyen.
Or être une personne, c'est être semblable du point de vue de la loi
morale, pas du tout d'une quelconque ressemblance au sens vulgaire, au sens physique ou psychologique (on
respecte autrui sans qu'il soit pour autant un ami, sans affinité particulière entre lui et moi).
Il va de soi que l'autre est toujours à la fois mon semblable et un être différent.
Il semble donc inévitable d'affirmer
également l'unité de l'espèce humaine que l'idée que les individus sont à chaque fois uniques, c'est-à-dire tous
différents les uns des autres.
Le problème posé concerne non pas la nécessité du respect (ce serait cette questionci: faut-il respecter l'autre? question à laquelle il est ici implicitement répondu par l'affirmative) mais la détermination
de son principe, de telle sorte que nous devons examiner ce que nous respectons en autrui et comparer les
conséquences et la possibilité des deux termes de l'alternative: est-ce la similitude ou la différence qui doit être
posé au principe du respect? L'alternative est-elle complète? Faut-il choisir entre les deux termes de l'alternative,
comme si, faisant l'un je ne pouvais plus faire l'autre? Préalablement, afin de pouvoir répondre à ces questions, il
faut se demander ce que signifie respecter autrui.
Que le respect s'adresse à autrui indique que le domaine de la
recherche est l'intersubjectivité, où certains problèmes se posent.
Ce domaine, éthique par excellence, exige une
exploration factuelle et une analyse éthique.
Nous devons connaître les faits, la réalité de nos relations avec autrui;
mais aussi en tirer ce qui doit être fait.
Aussi il ne faut pas oublier que cette double analyse pratique, de l'action et
pour l'action, qui constate ce qui est et qui détermine ce qui doit être, influe sur notre manière de penser l'objet.
Qu'est-ce que le respect? La question se pose dans la mesure où il présente une certaine diversité.
Il faut d'abord
en construire le concept.
Le sens commun en fait une attitude de soumission à quelqu'un d'autre à qui il s'agit
d'obéir ou qu'il s'agit d'admirer, ou même les deux à la fois.
La soumission à une autre personne suppose que je la
respecte sans qu'elle me respecte.
L'admiration présente une structure analogue: j'admire un tel non pas parce qu'il
est en soi admirable mais parce que je ne crois pas posséder des qualités définies.
Donc la soumission et l'admiration
se laissent caractériser par l'attribution à autrui de caractères que je me refuse à moi-même.
Donc le respect ne
peut être identique à la soumission et à l'admiration car il implique que pour respecter autrui je doive renoncer à
l'exigence de respect pour moi-même.
aussi faut-il rejeter la conception courante du respect dans la mesure où elle
n'implique pas la réciprocité.
La réciprocité est donc un caractère nécessaire du concept de respect.
Il faut sans doute faire le même sort à l'idée de respectabilité sociale ou de notabilité dans la mesure où elle repose
sur l'arbitraire et l'absence de réciprocité.
En effet la notabilité ou la respectabilité est un prédicat typiquement
attribué aux membres d'une certaine classe sociale à l'exclusion de ceux qui ne lui appartiennent pas.
Il implique
donc à l'évidence l'absence de réciprocité, qui nous conduit à exclure du concept de respect la respectabilité
sociale..
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