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Faut-il avoir peur de la vérité ?

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« La vérité désigne ce qui a le caractère d'être vrai, soit que la chose en question soit un fait, soit que la chose soit une proposition.

Dans le premier cas, découvrir la vérité serait donc découvrir ce que les choses sont en elles-mêmes, dans le second cas, ce serait accéder à une adéquation de la pensée et de la réalité.

D'un point de vue théorique, la vérité ne peut représenter aucun danger, puisque ce que l'on cherche à connaître ce n'est jamais le faux mais toujours le vrai.

Mais d'un point de vue pratique, c'est-à-dire relativement à la manière dont nous réglons nos vies, la vérité peut-elle représenter un danger dont il faudrait avoir peur ? A première vue on serait tenté de dire que non, puisque l'homme qui se représente bien ce que sont les choses sera mieux s'adapter que celui qui est dans l'illusion à leur endroit.

De plus la vérité produit un accord universel entre les esprits, de sorte que l'on peut penser que d'un point de vue social elle permet aux hommes de trouver un terrain d'entente pour vivre en harmonie.

Mais il y a pourtant des choses que l'on préfèrerait ne pas savoir pour ne pas souffrir (qu'un ami ou femme aimée nous ont trompé par exemple).

Pourtant dans ce cas est-ce la vérité en tant que telle qui fait peur, ou bien la souffrance qui est attachée à cette vérité ? Et lorsque nous croyons avoir peur de la vérité, n'est-ce pas toujours en réalité non pas de la vérité, mais de la souffrance que nous avons peur ? I.

Il ne faut pas avoir peur de la vérité, car seule la vérité permet de choisir ce qui est le plus profitable pour nous Celui qui connaît la vérité peut choisir en connaissance de cause, mais celui qui ne la connaît pas ne peut pas véritablement choisir, parce qu'il n'a pas les éléments pour le faire.

Dans ce sens, ce dont on doit avoir peur, ce n'est pas de la vérité mais de la fausseté.

Dans le Protagoras, Platon explique bien en quoi c'est bien de la fausseté que nous devons avoir peur.

Les sophistes sont comparés à ces négociants qui vendent de la nourriture sans s'y connaître, et risquent d'empoisonner ceux qui en achètent.

En réalité les sophistes vendent une nourriture spirituelle, c'est-à-dire un savoir qui permet de réussir dans les affaires de la cité.

Ainsi ils enseignent à faire de beaux discours pour gagner au tribunal, ou convaincre dans toutes sortes d'affaires.

Mais ils ignorent en réalité la vérité, et ressemblent en cela aux négociants qui ne savant pas si leur nourriture est bonne.

Socrate explique qu'avec les Sophistes le danger d'empoisonnement est encore plus grand, parce que l'âme assimile tout de suite les fausses vérités que les sophistes enseignent.

Ceux qui louent les services des sophistes n'ont alors aucune marge de choix, et prennent donc un gros risque dans la conduite de leur vie.

Dès lors on voit que c'est la fausseté qu'il faut craindre.

La vérité au contraire, permet toujours de choisir ce que l'on veut faire étant donné ce qui est, il ne faut donc pas avoir peur de la vérité, car elle laisse toujours le choix à celui qui la connaît, de prendre un parti plutôt que l'autre. II.

Il faut parfois se méfier de ceux qui parlent au nom de la vérité Platon considère que la vérité est en-soi.

Par exemple ce qui rend une chose belle, c'est la beauté en soi, c'est-à-dire une forme idéale, à laquelle les réalités sensibles participent, et dont elles tirent leur caractère de belles choses.

Or on peut mettre en question ce présupposé.

Peut-être n'y a-t-il pas de vérité en soi, mais seulement des manières différentes de voir les choses.

Par exemple, quand il y a une dispute entre deux amis, il se pourrait que personne n'ait raison, mais que chacun a sa manière de voir les choses.

Mais alors pourquoi se préoccuper de la vérité ? Nietzsche considère que ceux qui prétendent chercher la vérité et l'imposer aux autres sont au fond des gens qui ont peur de vivre.

La volonté de vérité serait même une volonté de mort.

Ainsi pour Nietzsche les idées platoniciennes n'existent pas.

Ce sont de pures inventions destinées à faire en sorte que ceux qui aiment la vie soient convaincus de s'en détourner, pour se tourner vers des abstractions qui n'ont pas d'autres sens que de dévaloriser la vie (on prétend par exemple que seule l'âme est bonne dans l'homme, parce qu'elle est éternelle et peut contempler les vérités en-soi, alors que l'homme est foncièrement et avant tout un corps vivant, et qu'il devrait s'accepter comme tel).

C'est ce qui fait dire à Nietzsche dans La généalogie de la morale que la volonté de vérité est en réalité une volonté de mort.

En ce sens quand on aime la vie, on doit avoir peut de la vérité, et s'en méfier. III.

Il y a une vérité subjective qui peut faire peur, mais qu'il faut avoir le courage d'affronter Pour Nietzsche, si la vérité doit faire peur, c'est qu'elle est une invention liée à l'idée qu'il y aurait des choses en soi, plus vraies et meilleures que notre monde.

Or la vérité n'est pas nécessairement solidaire d'une telle conception.

Dans le Post-scriptum définitif et non scientifique aux miettes philosophiques, Kierkegaard oppose deux conceptions de la vérité : 1) la vérité objective 2) la vérité subjective.

Dans la vérité objective, un homme est dans le vrai lorsqu'il croit à une chose qui est effectivement vraie (par exemple s'il croit qu'un verre est sur la table, et qu'un verre est vraiment sur la table, il est dans le vrai).

Ainsi c'est de l'objet que vient la vérité.

Au contraire, dans la vérité subjective la vérité ne vient plus de l'objet, mais de l'intériorité du sujet.

Or Kierkegaard considère que c'est cette deuxième vérité qui est fondamentale pour l'homme.

En effet l'homme est un être qui est à la fois existant dans le temps, c'est-à-dire fini, mais qui a également un rapport à l'infini parce qu'étant doué d'une intériorité qui lui permet de se rapporter à lui-même, il ne peut pas se contenter des choses finies, mais aspire à les dépasser dans un rapport à l'absolu.

Mais entre les deux sens de la vérité, il y a alors un conflit.

En tant que c'est un être rationnel, l'homme voudrait accorder sa raison et les choses, et donc croire à une vérité objective.

Mais en tant qu'il aspire à l'absolu, il doit choisir la vérité subjective.

Ainsi, croire en Dieu parce que dieu existerait, ce ne serait pas avoir la foi.

En réalité, croire vraiment en Dieu, c'est choisir la vérité subjective contre la vérité objective (car il n'y a pas de raisons objectives qui nous permettent d'être certains que Dieu existe).

Ce choix de la vérité subjective peut faire peur, car il nous ouvre sur l'inconnu, mais Kierkegaard pense que l'homme doit avoir le courage de le faire. Conclusion Il ne faut pas avoir peur de la vérité, au sens où la vérité contrairement à la fausseté, nous donne toujours la possibilité de choisir ce que l'on veut en connaissance de cause.

Mais on peut parfois avoir peur de la volonté de vérité.

Ainsi, les gens qui prétendent parfois qu'il faut croire ceci ou cela parce que c'est la vérité, sont simplement intolérants, et ne sont pas capables d'accepter un point de vue différent du leur.

Mais il y a aussi une vérité subjective, qui consiste ressentir une chose comme vraie parce que l'on a choisit d'y croire.

Cette vérité n'est pas susceptible d'erreur (si l'on démontrait à un croyant que Dieu n'existe pas, cela ne changerait peut être rien à sa foi, parce qu'il ne croit par parce que Dieu existe, mais parce qu'en lui-même il sent qu'il veut croire). Cette vérité subjective peut faire peur, mais on ne doit pas en avoir peur, c'est-à-dire donner du crédit à cette peur.. »

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