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Y a-t-il des degrés de vérité ?

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« Définition des termes du sujet La question « y a-t-il » porte sur l'existence ou la non-existenc e d'un objet. L'objet en ques tion ici, ce sont des « degrés de vérité ».

C 'est un concept proprement philosophique.

On peut c onsidérer que la vérité, en un sens large, est l'adéquation de la c onnaissance que l'on a de la réalité, ou disc ours que l'on tient sur elle, à la réalité elle-même, que ce soit dans un sens courant – comme dans l'expression « dire la vérité » par exemple, qui désigne le fait de dire des choses qui ne sont pas différentes de la r é a l i t é – o u d a n s u n s e n s philos ophique – on se tourne alors plutôt du côté de la philosophie de la connaissanc e (les degrés de vérité seraient des degrés que l'on atteint dans les procédures de connaissance du réel), ou du côté de la métaphysique, et les degrés de vérité pourraient peut-être correspondre alors à des degrés de réalité. P arler de degrés de vérité suppose que la vérité n'est pas unique, ou plutôt qu'elle s e laisse c onnaître par niveaux succes sifs – c'est le sens ici du mot « degré » -, ces différents niveaux pouvant marquer des niveaux de connaissance possibles ou des niveaux d'intens ité possibles. I l y a différents moyens de concevoir cela, et c e s o n t c es différents moyens qu'il faudra examiner, afin de déterminer s'il est pertinent - ou à quelles conditions il est pertinent – de parler de degrés de vérité, et de voir ce que cela apporte à la compréhens ion du concept de vérité, puisque ce sujet semble s'insérer dans le cadre général d'une réflexion sur la nature de la vérité elle-même. Proposition de plan I.

Les degrés de la vérité prise au sens courant Il est ass ez facile de concevoir des degrés de vérité si on prend la vérité en son sens courant : on peut par exemple considérer que la vérité des faits est supérieure à la vérité des paroles , que moins il y a d'intermédiaires entre les faits et nous , plus le degré de vérité est élevé.

V oltaire propose un exemple judiciaire de cela. V oltaire, Dictionnaire philosophique, article « V érité » « Des degrés de vérité suivant lesquels on juge les accusés.

— O n peut être traduit en justic e, ou pour des faits, ou pour des paroles. Si pour des faits, il faut qu'ils soient aussi c ertains que le sera le supplice auquel vous condamnerez le coupable: c ar si vous n'avez, par exemple, que vingt probabilités contre lui, ces vingt probabilités ne peuvent équivaloir à la certitude de sa mort, s i vous voulez avoir autant de probabilités qu'il vous en faut pour être sûr que vous ne répandez point le sang innocent, il faut qu'elles naiss ent de témoignages unanimes de déposants qui n'aient auc un intérêt à dépos er.

De ce concours de probabilités, il s e formera une opinion très forte qui pourra servir à excus er votre jugement.

M ais comme vous n'aurez jamais de certitude entière, vous ne pourrez vous flatter de connaître parfaitement la vérité.

P ar cons équent vous devez toujours penc her vers la clémence plus que vers la rigueur. S'il ne s'agit que de faits dont il n'ait résulté ni mort d'homme ni mutilation, il est évident que vous ne devez faire mourir ni mutiler l'accusé. S'il n'est question que de paroles, il es t encore plus évident que vous ne devez point faire pendre un de vos s emblables pour la manière dont il a remué la langue; car toutes les paroles du monde n'étant que de l'air battu, à moins que ces paroles n'aient excité au meurtre, il est ridicule de condamner un homme à mourir pour avoir battu l'air.

M ettez dans une balance toutes les paroles oiseuses qu'on ait jamais dites, et dans l'autre balanc e le sang d'un homme, ce sang l'emportera.

O r celui qu'on a traduit devant vous n'étant accusé que de quelques paroles que ses ennemis ont prises en un certain s ens, tout ce que vous pourriez faire serait aussi de lui dire des paroles qu'il prendra dans le sens qu'il voudra; mais livrer un innocent au plus cruel et au plus ignominieux supplice pour des mots que ses ennemis ne comprennent pas, cela est trop barbare.

V ous ne faites pas plus de cas de la vie d'un homme que de celle d'un lézard, et trop de juges vous ressemblent.

» Transition : l'expérience courante donne à conc evoir quelque chose comme des degrés de vérité, c ompris comme des possibilités de manifes tation de la vérité avec des intensités différentes, donc distingués selon des critères quantitatifs.

C ela ouvre à une réflexion sur la possibilité de distinguer des degrés de vérité selon des critères qualitatifs, qu'un examen de la question des degrés de vérité d a n s la philosophie de la connaissanc e pourrait permettre d'interroger. II.

Degrés de vérité et degrés de connaissance Si l'on considère l'existence de degrés de vérité concernant notre connaiss ance du monde, comment comprendre ces degrés ? On peut distinguer divers modes de connaissance, qui correspondent à divers niveaux d'intensité de l'adéquation au réel.

C es divers niveaux n'influent pas sur notre connaissance seulement par la quantité d'informations qu'ils nous offrent, mais aussi par les différents modes de rapport au monde qu'ils induisent.

Les degrés de vérité apparaiss ent alors comme autant de degrés dans notre rapport réflexif au monde, et la notion de degrés de vérité acquiert une nouvelle forme de validité. Locke « Il y a différents états dans lesquels l'esprit se trouve imbu de la vérité, et auxquels on donne le nom de connais sance.

Il y a une connaissance actuelle, qui es t la perception présente que l'es prit a de la convenance ou de la disconvenance de quelqu'une de s es idées, ou du rapport qu'elles ont l'une à l'autre. O n dit, en second lieu, qu'un homme connaît une proposition, lorsque cette proposition ayant été une fois présente à son es prit, il a aperç u évidemment la convenance ou la disconvenance des idées dont elle est composée, et qu'il l'a placée de telle manière dans sa mémoire, que toutes les fois qu'il vient à réfléc hir sur cette propos ition, il la voit par le bon côté sans doute ni hés iter le moins du monde, l'approuve, et est assuré de la vérité qu'elle contient.

C 'est ce qu'on peut appeler, à mon avis, connaissance habituelle.

Suivant cela, on peut dire qu'un homme, qui connaît toutes les vérités qu'il a dans sa mémoire, en vertu d'une pleine et évidente perception qu'il en a eue auparavant, et sur laquelle l'esprit le repose hardiment sans avoir le moindre doute, toutes les fois qu'il a l'occasion de réfléchir sur ces vérités.

C ar un entendement aussi borné que le nôtre, n'étant capable de penser clairement et distinc tement qu'à une seule chose à la fois, si les hommes ne connaissent que ce qui es t l'objet actuel de leurs pens ées, ils s eraient tous extrêmement ignorants ; et celui qui connaîtrait le plus, ne connaîtrait qu'une seule vérité, l'esprit de l'homme n'étant capable de c onsidérer qu'une s eule à la fois.

Il y a aus si, vulgairement parlant, deux degrés de connaiss ance habituelle.

L'un regarde ces V érités mises comme en réserve dans la mémoire, qui ne s e présentent pas plutôt à l'esprit qu'il voit le rapport qui es t entre ces idées.

C e qui se rencontre dans toutes les vérités dont nous avons une connaissance intuitive, où les idées mêmes font connaître par une vue immédiate la convenance ou la disconvenance qu'il y a entre elles.

Le second degré de connaissanc e habituelle appartient à ces vérités, dont l'esprit ayant été une fois convaincu, il conserve le souvenir de la conviction sans en retenir les preuves.

A insi, un homme qui s e souvient certainement qu'il a vu une fois d'une manière démonstrative, que les trois angles d'un triangle sont égaux à deux droits, est assuré qu'il connaît la vérité de cette propos ition, parce qu'il ne saurait en douter.

Q uoiqu'un homme puisse s'imaginer qu'en adhérant ainsi à une vérité dont la démonstration qui la lui a fait premièrement connaître, lui a échappé de l'esprit, il croit plutôt sa mémoire, qu'il ne connaît réellement la vérité en question ; et quoique cette manière de retenir une vérité m'ait paru autrefois quelque c h o s e qui tient le milieu entre l'opinion et l a c onnaissance, une espèce d'assurance qui est au-des s u s d'une simple croyance fondée s ur le témoignage d'autrui, c ependant je trouve après y avoir bien pensé, q u e c e t t e connaissance renferme une parfaite certitude, et est en effet une véritable connaissanc e.

» Transition : Dans les deux premières parties c ' e s t l e rapport de l'homme à la vérité qui a été envisagé, ce qui a permis de valider la pertinence de l'expression « degrés de vérité ».

Q u'en es t-il c ependant si l'on envisage la vérité non du point de vue de l'homme, mais du point de vue de la vérité ellem ê m e ? La notion de vérité résiste-t-elle à l'affirmation de l'existenc e d e d e g r é s e n e l l e ? O u le recours à la notion de degrés n'est-il pas plutôt le symptôme d'une incapac ité de l'homme à la connaître adéquatement ?. »

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