Viser l'égalité ne signifierait-il pas contraindre les plus forts ?
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AIDE FOURNIE PAR L'ELEVE: Remarquez tout d'abord ici que le fait de viser l'égalité relève d'une fin politique : il
s'agit d'un but que l'on peut se fixer face à une communauté ou une société dont les membres sont inégaux.
Montrez donc que l'inégalité consiste d'abord en une opposition entre des faibles et des forts : la loi du plus fort
n'est-elle pas la première des lois de la nature ? Viser l'égalité ce serait donc bien contraindre les plus forts puisque
cela consisterait à compenser leurs privilèges ou leurs avantages naturels en favorisant les plus faibles.
Montrez
alors cependant qu'un tel but revient à restreindre la liberté de ceux que l'on a nommé les plus forts.
Demandezvous alors s'il n'y a pas là un risque d'uniformisation : viser l'égalité à tout prix, n'est-ce pas sacrifier les différences
qui existent nécessairement entre les individus ? Viser l'égalité serait alors un but juste mais contraire à la liberté et
la diversité des êtres humains.
Demandez-vous alors ce qui doit primer, la liberté ou l'égalité.
Demandez-vous alors
pour finir si on ne pourrait pas les concilier : l'idéal d'égalité ne peut-il s'accommoder de la différence ? Ne s'agit-il
pas simplement de prévenir la domination des plus forts en garantissant une égalité de droits (non plus une égalité
de conditions mais une égalité de dignité et de traitement devant la loi) ? Faut-il pour autant s'interdire de viser
l'égalité des conditions ?
1° Viser l'égalité, c'est contraindre les forts à abdiquer face aux faibles...
Le discours de Calliclès.
" Certes, ce sont les faibles, la masse des gens, qui établissent les lois, j'en suis sûr.
C'est donc en fonction d'euxmêmes et de leur intérêt personnel que les faibles font les lois, qu'ils attribuent des louanges, qu'ils répartissent des
blâmes.
Ils veulent faire peur aux hommes plus forts qu'eux et qui peuvent leur être supérieurs.
C'est pour empêcher
que ces hommes ne leur soient supérieurs qu'ils disent qu'il est vilain, qu'il est injuste, d'avoir plus que les autres et
que l'injustice consiste justement à vouloir avoir plus.
Car, ce qui plaît aux faibles, c'est d'avoir l'air d'être égaux à
de tels hommes, alors qu'ils leur sont inférieurs.
Et quand on dit qu'il est injuste, qu'il est vilain, de vouloir avoir plus que la plupart des gens, on s'exprime en se
référant à la loi.
Or, au contraire, il est évident, selon moi, que la justice consiste en ce que le meilleur ait plus que
le moins bon et le plus fort plus que le moins fort.
Partout il en est ainsi, c'est ce que la nature enseigne, chez
toutes les espèces animales, chez toutes les races humaines et dans toutes les cités !
Si le plus fort domine le moins fort et s'il est supérieur à lui, c'est là le signe que c'est juste.
De quelle justice Xerxès s'est-il servi lorsque avec son armée il attaqua la Grèce (1), ou son père quand il fit la
guerre aux Scythes ? Et encore, ce sont là deux cas parmi des milliers d'autres à citer ! Eh bien, Xerxès et son père
ont agi, j'en suis sûr, conformément à la nature du droit - c'est-à-dire conformément à la loi, oui, par Zeus, à la loi
de la nature -, mais ils n'ont certainement pas agi en respectant la loi que nous établissons, nous !
Chez nous, les êtres les meilleurs et les plus forts, nous commençons à les façonner, dès leur plus jeune âge,
comme on fait pour dompter les lions ; avec nos formules magiques et nos tours de passe-passe, nous en faisons
des esclaves, en leur répétant qu'il faut être égal aux autres et que l'égalité est ce qui est beau et juste.
Mais, j'en
suis sûr, s'il arrivait qu'un homme eût la nature qu'il faut pour secouer tout ce fatras, le réduire en miettes et s'en
délivrer, si cet homme pouvait fouler aux pieds nos grimoires, nos tours de magie, nos enchantements, et aussi
toutes nos lois qui sont contraires à la nature - si cet homme, qui était un esclave, se redressait et nous
apparaissait comme un maître, alors, à ce moment-là, le droit de la nature brillerait de tout son éclat.
"
PLATON, Gorgias, 483b-484a, trad.
Canto, Garnier-Flammarion, 1987, pp.
212-213.
(1) allusion à la seconde guerre médique conduite par Xerxès, roi des Perses, qui envahit la Grèce en 480 av.
JC
Introduction
Calliclès entend pratiquer une critique " généalogique " des lois en débusquant le type de vie qui se dissimule derrière
leur apparente impartialité.
Les arguments de Calliclès
1.
Faite par la masse, la loi en exprime forcément les intérêts et les valeurs.
Elle n'est donc universelle qu'en
apparence.
2.
Cette loi est un instrument d'oppression non par la force mais par un mécanisme d'intériorisation.
Elle n'est
donc juste qu'en apparence.
3.
Les valeurs prônées par cette loi n'ont pas de réalité propre : elles consistent dans le retournement axiologique
de la réalité de la force, et l'égalité de droit n'est que la dénégation de l'inégalité de fait.
Elle est donc sans
consistance.
4.
Les meilleures dispositions sont laminées par l'éducation égalitariste.
5.
Le vrai droit est celui de la nature qui est foncièrement inégalitaire.
En effet, il est universel, nécessaire,.
»
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