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Une violence légale est-elle une violence ?

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« Il s'agit d'expliciter le paradoxe que constitue cette question, car comment une violence pourrait-elle n'être pas une violence ? Il faut donc distinguer le fait physique de la violence et le fait moral, et c'est ce fait moral qu'il convient de mettre en relation avec le droit : dès lors que la violence physique est autorisée par le droit, cette violence peut-elle être encore pensée du point de vue moral comme violence ? La réflexion pourra s'engager dans diverses directions selon que l'on entend par « légal » ce que la loi autorise en général (et donc les violences que la loi autorise, si elle en autorise, quiconque à commettre), ou, comme nous le ferons ici, ce qui est régi par la loi (c'est-à-dire la violence exercée par les instances légales chargées d'appliquer la loi). Introduction Il y a violence lorsqu'on agit sur quelqu'un ou qu'on le fait agir contre sa volonté en employant la force.

La violence est ainsi l'exercice de la force.

Par ailleurs, l'idée de violence enveloppe souvent une idée d'illégitimité : on dira ainsi qu'une autorité légale, la police, par exemple, a le droit d'employer la force, mais non pas d'exercer la violence.

C'est pourquoi, en un sens, on peut considérer qu'une violence légale, c'est-à-dire l'exercice, autorisé par la loi, de la force, n'est plus véritablement une violence. Le problème central lorsqu'on demande si une violence légale est bien une violence, est donc celui du rapport entre le droit et la force, car de lui dépend la réponse à cette question.

Deux conceptions opposées s'affrontent ici : ou bien l'on fait de la force, de la violence, ce qui constitue le droit, ou bien l'on fait de la force, de la violence, non ce qui constitue le droit, mais ce qui est au service du droit positif. Dans le premier cas, toute violence, dès lors qu'elle est légale, c'est-à-dire qu'elle émane de l'Autorité souveraine qui est la seule source du droit, est légitime, et n'est donc plus, en ce sens, une violence. Dans le second cas, le droit positif ne constitue pas le droit en soi, mais trouve sa source dans un droit idéal qui le dépasse et le légitime, tel que la justice divine ou le droit naturel ; dans ces conditions, n'importe quelle violence ne peut être légale, mais seulement celle qui permet de faire régner le droit positif, dans la mesure où il ne contrevient pas au droit idéal: dès lors qu'une violence, même « légale » contredit les principes du droit idéal, elle reste une violence. Il apparaît donc que faire respecter le droit par la force ou la violence est tout autre chose que de fonder le droit sur la force et la violence. 1.

Hobbes : la force constitue le droit Le droit naturel c'est-à-dire la guerre Hobbes redoute par-dessus tout le retour à l'état de nature, c'est-à-dire un état sans État où le droit naturel, liberté sans limite, engendre une guerre incessante de chacun contre chacun.

Dans sa nature, en effet, l'individu n'a aucun instinct de sociabilité, mais un désir de puissance qui le pousse à considérer les autres comme des concurrents. Ses passions (la crainte de la mort) ou sa raison donnent bien à l'homme naturel l'idée d'un état de paix, mais cette idée reste sans effet tant qu'il n'a pas cédé à une puissance supérieure la totalité de ses droits et de sa liberté naturels (pacte ou contrat constitutif de l'État).

C'est finalement ce qu'il fait, par calcul.

Ainsi s'explique l'État, auquel Hobbes donne le nom d'un monstre biblique dont la puissance dépasse celle de tous les autres êtres : Le Léviathan. La force de l'État fonde et garantit le droit L'État juste, selon Hobbes, est donc celui dont la puissance sans limite assure paix et sécurité.

Son Souverain cumule pouvoir exécutif et pouvoir législatif.

Il définit la totalité des lois positives qui rendent possible l'existence sociale.

L'individu ne peut jamais se prévaloir d'un droit naturel quelconque, puisqu'il y a précisément renoncé pour assurer sa propre conservation. Selon la formule de R.

Polin, pour Hobbes, « pactes sans sabres ne sont que palabres ».

Le Souverain, qui a reçu de ses sujets la totalité de leurs forces pour leur propre conservation, ne constitue pas seulement le droit : il le fait naturellement respecter, puisqu'il concentre en sa personne toute la puissance de l'État.

Dans cette philosophie politique, la force du Souverain fonde et fait respecter le droit. Critique de la force comme fondement du droit Rousseau : « On dira [c'est la thèse de Hobbes] que le despote assure à ses sujets la tranquillité civile, soit ; mais qu'y gagnent-ils, si les guerres que son ambition leur attire, si son insatiable avidité, et les vexations de son ministère les désolent plus que ne feraient leurs dissensions ? Qu'y gagnent-ils, si cette tranquillité même est une de leur misère ? On vit tranquille aussi dans les cachots : en est-ce assez pour s'y trouver bien ? Les Grecs enfermés dans l'antre du Cyclope y vivaient tranquilles, en attendant que leur tour vînt d'être dévorés » (Contrat social, 1762, I, 4). On comprend que Rousseau refuse de fonder le droit sur la force : ce serait le détruire.

« Où règne la seule force, l'État est détruit » : il n'a en effet aucune légitimité.. »

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