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Un problème moral admet-il une solution certaine ?

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« O n parle de désobéissance civile lorsque des citoyens, mus par des motivations éthiques, transgressent délibérément, d e manière publique, concertée et n o n violente, une loi en vigueur, pour exercer une pression visant à faire abroger o u a m e n d e r ladite loi par le législateur (désobéissance civile directe) ou à faire changer une décision politique prise par le pouvoir exécutif (désobéissance civile indirecte).

La désobéissance est souvent civile dans la mesure où c'est le citoyen qui désobéi aux lois, à des lois qu'il juge incompatible avec des valeurs morales ou religieuses, constitutionnelles.

Mais est-ce que ce droit d e ne p a s respecter le droit doit être écrit et officialisé, inscrit dans un code ou une constitution, n'est-ce pas contradictoire, puisque s' il y a désobéissance, il y a rupture avec le droit établie ? 1) La désobéissance civile. La désobéissance est dite « civile », d'abord, parce qu'elle est le fait de « citoyens » : ce n'est pas une rupture de citoyenneté, ni un acte insurrectionnel.

Il s'agit d'une manifestation de « civisme » au sens fort : volonté d'œuvrer pour l'intérêt général, même au prix de risques personnels.

Le fait que la désobéissance civile soit nécessairement publique, et recherche même la médiatisation la plus forte (ce qui la distingue nettement de l'infraction criminelle), s'inscrit dans ce même registre du civisme : l'acte vise à éveiller la conscience des autres citoyens, à susciter un débat.

La désobéissance civile s e d o n n e pour objectif d'obtenir des changements dans la loi ou la politique contestée, elle doit exercer une certaine force de pression sur les décideurs.

Pour celui qui participe à une campagne de désobéissance civile, l'objectif premier est moins de rester fidèle à sa conscience que de faire changer, pour la société entière, la loi réputée injuste.

La désobéissance civile est une objection de conscience qui se donne des objectifs et des moyens politiques. 2)La désobéissance civile selon Thoreau. Dans la Désobéissance civile d e Thoreau (1817-1862) écrit« Le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins », c'est lorsqu'il se m ê l e le moins d e la vie des gouvernés qu'il est le plus utile ; ce qui revient à dire s'il on est conséquent que « Le gouvernement le meilleur est celui qui ne gouverne pas du tout ».

Le commerce, les affaires, s'ils n'avaient pas leur propre dynamisme, n'arriveraient jamais à franchir les obstacles q u e les législateurs leur suscitent continuellement.

Thoreau ne veut toutefois pas être assimilé à un anarchiste : « je ne d e m a n d e p a s d ' e m b l é e “point de gouvernement”, mais d'emblée, un meilleure gouvernement ».

Si dans une démocratie c'est la majorité qui règne, ce n'est certainement pas en raison d'une vérité qu'elle incarnerait, n i e n raison du respect qu'elle pourrait inspirer à l a minorité.

En outre, « un gouvernement où la majorité tranche de tous les problèmes ne peut être fondé sur la justice, telle que les hommes l'entendent », à savoir l'équité, la justice distributive, par opposition à la justice commutative. « Je crois que nous devrions être hommes d'abord et sujets ensuite.

Il n'est pas souhaitable de cultiver le même respect pour la loi et pour le bien.

La seule obligation que je dois assumer est de faire à tout moment ce que j'estime juste (…).

La loi n'a jamais rendu les hommes un brin plus justes ; et, de par le respect qu'ils lui portent, les gens les mieux intentionnés deviennent chaque jour les agents de l'injustice » (p.8).

« J'appelle de mes vœux un être qui soit véritablement un homme, un homme et non pas une girouette » (p.16).

« Il y a des milliers de gens qui par principe sont opposés à la guerre et à l'esclavage, mais qui en fait ne font rien pour y mettre un terme ; (…) [ils] restent assis les mains dans les poches à dire qu'ils ne savent que faire, et ne font rien (…).

On attend, avec bienveillance, que d'autres remédient au mal afin de n'avoir plus à le déplorer (…).

Pour un seul homme vertueux, il y a 999 défenseurs de la vertu » (p.14). « Il est applaudi le soldat qui refuse d e servir dans une guerre injuste, par ceux-là m ê m e qui ne refusent pas d e financer le gouvernement injuste qui mène la guerre ».

Pourquoi ne refusent-ils pas de verser leur quote-part au trésor public ? Voilà la question que lance Thoreau.

« Comment peut-on s e satisfaire d'avoir u n e opinion, et puis en rester là ? (…).

L'action fondée sur un principe, la perception et l'accomplissement de ce qui est juste, voilà qui change les choses et les relations ; elle est essentiellement révolutionnaire, et n'a pas de véritable précédent » (p.18-19 ).

« Donnez toute votre voix, pas seulement un bout de papier, mais toute votre influence. Une minorité est sans pouvoir tant qu'elle se conforme à la majorité (…) ; mais elle est irrésistible lorsqu'elle fait obstruction de tout son poids » (p.24).

Thoreau propose donc à titre de « révolution pacifique » pour s'opposer au gouvernement lorsque celui-ci s'engage dans des actions iniques (esclavage, guerre expansionniste, etc.), de s'abstenir de payer ses impôts.

Lui-même a été jeté en prison une nuit pour l'avoir fait.

« Je m'étonnais de la conclusion à laquelle elle [ i.e.

l'institution] avait finalement abouti, que c'était là le meilleur usage qu'elle pût faire de moi ; il ne lui était jamais venu à l'idée de bénéficier de mes services de quelque manière » (p.29).

« Il n'y aura jamais d'Etat réellement libre et éclairé tant que l'Etat n'en viendra pas à reconnaître l'individu comme u n e puissance supérieure et indépendante dont découle tout son propre pouvoir et toute son autorité, et tant qu'il ne le traitera pas en conséquence » (p.45). Un droit de désobéir dans nos démocraties ? Dans son remarquable essai sur la désobéissance civile (Essai sur la révolution, 1963), Hannah Arendt s'interroge : est-il possible de « faire une place à la désobéissance civile dans le fonctionnement de nos institutions publiques » ? Elle répond par l'affirmative, de même que Rawls, Habermas, et la plupart des auteurs qui ont abordé cette question.

Certes, ils n'admettent la désobéissance civile qu'à titre d'exception.

Mais d e telles exceptions existent.

D'abord parce que la démocratie suppose q u e soient respectés quelques principes fondamentaux.

Même une majorité régulièrement élue ne saurait être obéie si elle adopte une disposition contraire à la Déclaration des droits de l'homme, aux grands principes constitutionnels, aux conventions internationales signées par un pays, etc.

On est alors dans le cas, évoqué plus haut, d'une désobéissance civile entreprise dans un esprit plus juridique qu'éthique : une sorte de procédure d'appel, contre la décision prise à un niveau, à u n e juridiction d e niveau supérieur.

Une autre justification invoque les imperfections des fonctionnements démocratiques.

Certaines décisions, prises par des élus dans les formes légales, peuvent résulter de jeux d'influences occultes (corruption, groupes de pression manipulateurs) ou de l'habileté de technocrates sachant présenter des dossiers complexes à des élus peu compétents.

Quand il s'agit de décisions aux effets graves et irréversibles, on peut admettre que des citoyens estiment ne pas pouvoir attendre les prochaines élections pour poser le problème devant l'opinion publique.

Ainsi, loin d e contester la démocratie, la désobéissance civile viserait à la défendre en la protégeant de ses propres dysfonctionnements. Conclusion. Il est évident qu'on a le droit de désobéir à des lois iniques, mais il semble contradictoire que ce doit même soit inscrit dans le droit.

La désobéissance ne se pose entièrement contre tout droit mais contre un droit injuste afin de modifier le droit, de le faire évoluer, ou de le rétablir dans le droit chemin.

Pour terminer, voici des exemples d e c a m p a g n e s de désobéissance civile : pour s'en tenir aux dernières décennies, on peut évoquer l'incitation à l'insoumission lors de la guerre d'Algérie (Manifeste des 121), les campagnes de refus d'impôt et de renvois de papiers militaires en soutien aux agriculteurs du Larzac (1971-1981), diverses formes de soutien aux « sans-papiers », les « squats » d'appartements par l'association Droit au logement, etc.. »

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