Science sans conscience est-elle ruine de l'âme?
Extrait du document
«
[La science n'a pas de morale.
L'objectivité de la science ne se soucie pas des valeurs qui fondent
l'humanité.]
La science ne pense pas
Heidegger (1889-1976) fut l'assistant de Husserl à l'université de Fribourg.
Il
prolonge, à sa manière, la nouvelle forme de philosophie fondée par celui-ci:
la phénoménologie.
Dans Être et temps (1927) il expose la différence
fondamentale entre l'être et l'étant, et explique que toute la métaphysique
occidentale s'est construite en privilégiant l'étant et en oubliant l'être.
C'est
dans ce cadre qu'il faut comprendre la phrase «la science ne pense pas».
«Il faut le reconnaître, ce qui précède et tout l'examen qui va suivre n'ont
rien de commun avec la science: à savoir, là précisément où notre exposé
pourrait prétendre à être une pensée.
La raison de cette situation est que la
science ne pense pas.
Elle ne pense pas parce que sa démarche et ses
moyens auxiliaires sont tels qu'elle ne peut pas penser - nous voulons dire
penser à la manière des penseurs.
Que la science ne puisse pas penser, il ne
faut voir là aucun défaut mais bien un avantage.
Seul cet avantage assure à
la science un accès possible à des domaines d'objets répondant à ses modes
de recherche; seul il lui permet de s'y établir».
(Que veut dire «penser» ?
1954.)
Si Heidegger dit que la science ne pense pas, c'est parce qu'il attribue un
sens spécifique au mot «penser».
Ce sens n'est d'ailleurs pas facile à saisir, et
il reste, pour Heidegger, plutôt l'objet d'un questionnement que d'une
définition.
Car «définir», ce serait encore rester dans un mode de pensée
conforme à la métaphysique et à la science occidentale, et donc encore manquer le «penser» que vise Heidegger.
«Je ne peux pas dire, par exemple, dit Heidegger, avec les méthodes de la physique ce qu'est la physique.
Ce qu'est
la physique, je ne peux que le penser à la manière d'une interrogation philosophique».
Il faut donc distinguer lorsque
l'on est à l'intérieur de la science, avec ses méthodes et son langage propre, qui permet un certain type
d'appréhension du réel (les étants), doué notamment d'une grande efficacité technique.
Et une «pensée» qui
consiste justement en un effort pour sortir des catégories de pensée établies par la science - mais aussi par la
philosophie - et qui permet de revenir à la question de l'être.
La passion de savoir est dangereuse
La science est, en elle-même, étrangère aux valeurs morales et doit être placée sous l'égide de la sagesse.
Doit-on
cloner des individus juste parce qu'on sait le faire, sans réfléchir aux problèmes d'ordre éthique et aux dangers que
cela peut poser?
"Les questions que la science exclut par principe sont précisément les questions qui sont les plus brûlantes à notre
époque malheureuse pour une humanité abandonnée aux bouleversements du destin : ce sont les questions qui
portent sur le sens ou l'absence de sens de toute existence humaine (...) La vérité scientifique, objective, est
exclusivement la constatation de ce que le monde — qu'il s'agisse du monde physique ou du monde spirituel — est
en fait.
Mais est-il possible que le monde et l'être humain en lui aient véritablement un sens si les sciences ne
laissent valoir comme vrai que ce qui est constatable dans une objectivité de ce type, si l'histoire n'a rien de plus à
nous apprendre que le fait que toutes les formes du monde de l'esprit, toutes les règles de vie, tous les idéaux,
toutes les normes qui donnèrent à chaque époque aux hommes leur tenue, se forment comme les ondes fugitives et
comme elles à nouveau se défont, qu'il en a toujours été ainsi et qu'il en sera toujours ainsi, que toujours à nouveau
la raison se changera en déraison et toujours les bienfaits en fléaux ?" HUSSERL
L'homme est animé du désir de savoir.
II est le seul être qui s'interroge sur lui-même et sur l'univers qui l'entoure.
Il
ne se contente pas d'être au monde, de vivre ce monde, il lui faut l'expliquer, le comprendre.
Certes, il veut
comprendre pour pouvoir agir, découvrir les lois de la nature qui lui permettront de s'en rendre « maître et
possesseur », selon les mots de Descartes, mais aussi et, dirons-nous, surtout pour satisfaire à une interrogation
singulière, surgie du plus profond de lui-même et qu'il ne peut réprimer, source d'inquiétude ou d'angoisse : «
Pourquoi existons-nous ? » Ce qui revient à poser la question du sens du monde en général et de l'homme en
particulier.
Afin d'y répondre, l'homme invente des mythes et des religions: Toutefois, ceux-ci sont inaptes à
_expliquer les lois de la nature.
L'homme se tourne alors vers la science qui l'instruit en effet, mais, de manière
paradoxale, en augmentant son désarroi.
Car la science se construit contre les mythes et les croyances, contre les.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Une science sans conscience n'est-elle que ruine de l'âme ?
- Dissertation philosophie Bertrand Russell in Science et Religion: la conscience
- ARISTOTE: «Il appartient au naturaliste de parler de l'âme et d'en avoir la science, et, sinon de toute l'âme, du moins de ce qui fait de l'animal ce qu'il est.»
- Freud: La conscience et l'inconscient de l'âme humaine
- « À cet égard, la raison a fait preuve d'une impuissance totale, explicable par le fait que ses arguments agissent sur la conscience, mais sur la conscience seule, sans avoir la moindre prise avec l'inconscient. » Jung, L'Homme à la découverte de son âme