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Sartre: Autrui représente-t-il une menace pour le sujet ?

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Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je le vis simplement, je le réalise sur le mode du pour-soi. Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là et m'a vu. Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte. Il est certain que ma honte n'est pas réflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avec l'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne. Or autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais à autrui. Et, par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moi-même comme sur un objet, car c'est comme objet que j'apparais à autrui. Mais pourtant cet objet apparu à autrui, ce n'est pas une vaine image dans l'esprit d'un autre. Cette image en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me « toucher Je pourrais ressentir de l'agacement, de la colère en face d'elle, comme devant un mauvais portrait de moi, qui me prête une laideur ou une bassesse d'expression que je n'ai pas ; mais je ne saurais être atteint jusqu'aux moelles : la honte est, par nature, reconnaissance. Je reconnais que je suis comme autrui me voit.

« ARTRE: Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je le vis simplement, je le réalise sur le mode du pour-soi.

Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là et m'a vu.

Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte.

Il est certain que ma honte n'est pas réflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avec l'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne.

Or autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais à autrui. Et, par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moimême comme sur un objet, car c'est comme objet que j'apparais à autrui. Mais pourtant cet objet apparu à autrui, ce n'est pas une vaine image dans l'esprit d'un autre.

Cette image en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me « toucher Je pourrais ressentir de l'agacement, de la colère en face d'elle, comme devant un mauvais portrait de moi, qui me prête une laideur ou une bassesse d'expression que je n'ai pas ; mais je ne saurais être atteint jusqu'aux moelles : la honte est, par nature, reconnaissance.

Je reconnais que je suis comme autrui me voit. Avez-vous compris l'essentiel ? 1 Est-ce par la réflexion que je découvre autrui ? 2 Que m'apporte au juste la présence de l'autre ? 3 Quelle menace peut présenter la présence d'autrui pour moi ? Réponses: 1 - Non, la présence d'autrui ne peut provenir d'une réflexion, celle-ci ne me mettant en relation qu'avec ma propre conscience. 2 - La possibilité de me connaître moi-même, de me prendre pour objet de ma conscience. 3 - L'autre peut certes me donner à voir ce que je suis réellement, mais il peut aussi me méconnaître, m'enfermer dans une fausse image qu'il se fait de moi. Problématique. Sartre part d'un exemple, d'une situation particulière, vécue, l'expérience de la honte.

Si l'ai honte d'un de mes actes, c'est parce que le reconnais que le regard moqueur ou méprisant d'un autre serait tout à fait légitime, et que, assistant à la même scène, je réagirais de la même manière.

Mon acte est alors effectivement "honteux", et je lui accorde une valeur objective. Enjeux. On peut utiliser les arguments développés par Sartre lui-même pour nuancer la portée de ce texte.

Car après tout, je ne puis avoir honte que si je reconnais mon acte comme honteux, et si je décide à l'avance d'accorder au point de vue des autres un caractère objectif.

Après tout, si j'ai commis cet acte (regarder par le trou d'une serrure), j'avais peutêtre de bonnes raisons, ou je sais que de telles choses peuvent se faire, qu'elles font partie de ce qui est humainement possible.

En tout cas, la honte apparaît bien comme une des figures de la servitude. Eléments d’introduction - l’homme n’est pas fait pour vivre seul.

Il a besoin des autres, non seulement dans l’entraide et la coopération, mais au moins aussi sûrement pour partager le sentiment d’exister.

C’est précisément ce que tend à montrer Sartre dans cet extrait. - Son jugement, ses découvertes, ses émotions n’ont de signification et de valeur que si d’autres peuvent aussi les éprouver ou les confirmer, si d’autres peuvent en être les témoins ou les garants.

Aussi la communication avec autrui apparaît comme le premier besoin et sens doute le plus impérieux de tous.

Qu’elle soit possible suppose qu’il existe entre les hommes quelque communauté et qu’autrui ait été reconnu comme mon semblable. - Autrui est en effet le même et l’autre ; et c’est cette double structure qui le caractérise.

Il y a par conséquent deux façons de méconnaître la relation à autrui : on peut nier qu’il soit différent, ou nier qu’il soit semblable, ce qui, au fond, revient au même.

mais autrui n’est ni autre que moi, ni identique à moi.

Il est alter ego, c’est-à-dire à la fois un autre moi et autre que moi.

Proximité et distance, familiarité et étrangeté qualifient mon rapport à l’autre.

C’est justement la définition de la relation à autrui, en tant qu’elle conditionne. »

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