Aide en Philo

Rousseau: La nature est-elle égalitaire ?

Extrait du document

[...] il est aisé de voir qu'entre les différences qui distinguent les hommes, plusieurs passent pour naturelles qui sont uniquement l'ouvrage de l'habitude et des divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société. Ainsi un tempérament robuste ou délicat, la force ou la faiblesse qui en dépend, viennent souvent plus de la manière dure ou efféminée dont on a été élevé, que de la constitution primitive des corps. Il en est de même des forces de l'esprit, et non seulement l'éducation met de la différence entre les esprits cultivés et ceux qui ne le sont pas, mais elle augmente celle qui se trouve entre les premiers à proportion de la culture ; car qu'un géant et un nain marchent sur la même route, chaque pas qu'ils feront l'un et l'autre donnera un nouvel avantage au géant. Or, si l'on compare la diversité prodigieuse d'éducations et de genres de vie qui règnent dans les différents ordres de l'état civil avec la simplicité et l'uniformité de la vie animale et sauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la même manière et font exactement les mêmes choses, on comprendra combien la différence d'homme à homme doit être moindre dans l'état de nature que dans celui de société, et combien l'inégalité naturelle doit augmenter dans l'espèce humaine par l'inégalité d'institution.

« " [...] il est aisé de voir qu'entre les différences qui distinguent les hommes, plusieurs passent pour naturelles qui sont uniquement l'ouvrage de l'habitude et des divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société. Ainsi un tempérament robuste ou délicat, la force ou la faiblesse qui en dépend, viennent souvent plus de la manière dure ou efféminée dont on a été élevé, que de la constitution primitive des corps.

Il en est de même des forces de l'esprit, et non seulement l'éducation met de la différence entre les esprits cultivés et ceux qui ne le sont pas, mais elle augmente celle qui se trouve entre les premiers à proportion de la culture ; car qu'un géant et un nain marchent sur la même route, chaque pas qu'ils feront l'un et l'autre donnera un nouvel avantage au géant.

Or, si l'on compare la diversité prodigieuse d'éducations et de genres de vie qui règnent dans les différents ordres de l'état civil avec la simplicité et l'uniformité de la vie animale et sauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la même manière et font exactement les mêmes choses, on comprendra combien la différence d'homme à homme doit être moindre dans l'état de nature que dans celui de société, et combien l'inégalité naturelle doit augmenter dans l'espèce humaine par l'inégalité d'institution.

" Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes (1754) DIRECTIONS DE RECHERCHE • Quel est ici le but de Rousseau ? — Se demander si les inégalités entre les hommes sont dues uniquement à « la nature » ou à « la culture ». — Se demander si ses inégalités sont plus à mettre au compte de la culture que de la nature. — Se demander si l'inégalité s'accroît ou se résorbe par la « culture ». — Établir que l'inégalité était moindre à l'« état de nature » qu'elle n'est dans l'état de société. • Que signifie ici « l'état civil » ? • Quelles réflexions faites-vous à propos de l'argumentation de Rousseau ? — Etablit-il ce qu'il en était lors de l'état de nature à partir d'éléments empiriques datant de « ce temps-là » ? — Que pensez-vous de ses comparaisons ? (On dit que comparaison n'est pas raison) — Que pensez -vous de l'articulation entre ce qui est dit à la première phrase et ce qui est dit dans les deux phrases suivantes ? (remarquez notamment « uniquement » et « viennent souvent plus » alors que les deux phrases sont reliées par « ainsi » ). • Que pensez-vous de la thèse de Rousseau ? • En quoi ce texte présente-t-il un intérêt philosophique ? Expliquez la distinction entre l'inégalité naturelle et l'inégalité d'institution. Dans ce texte, Rousseau distingue très nettement inégalité naturelle et inégalité d'institution. Les inégalités sont naturelles lorsqu'elles viennent de la « constitution primitive » du corps ou de l'esprit, lorsqu'elles ont pour origine des traits innés, héréditaires, par opposition à ceux qui sont acquis en société.

Au contraire, les inégalités d'institution sont acquises, constituées ou transmises dans le cadre d'une éducation qui change selon les époques, les sociétés, les milieux sociaux. Rousseau souligne que les inégalités sont plus ou moins importantes selon leur origine.

Les inégalités naturelles sont limitées.

Les animaux et les hommes proches de l'état de nature ne connaissent pas les différences parfois considérables qui séparent les individus dans certaines sociétés (différences entre les riches et les pauvres, les savants et les ignorants, ceux qui commandent et ceux qui obéissent, etc.). Pour l'essentiel, les inégalités les plus importantes apparaissent au cours de l'histoire des sociétés humaines, et c'est là qu'elles peuvent s'amplifier de plus en plus.

Rousseau l'exprime par la métaphore du géant et du nain qui marchent sur une même route dans la même direction : la distance entre eux augmente toujours.

Le développement historique des sociétés amplifierait ainsi les différences et les inégalités entre leurs membres. Propositions pour orienter votre recherche 1.

• Les inégalités sociales ne trouvent pas leur origine dans la nature mais bien dans la société : milieu social, éducation. • Rousseau constate, explique, introduit des exemples et tire les conséquences de la véritable source des différences entre les hommes. - Il constate les inégalités physiques et intellectuelles entre les hommes. — Il explique que ces inégalités sont dues à l'éducation. • Il montre que plus on est cultivé plus on s'éloigne de celui qui ne l'est pas (métaphore du géant et du nain). • Il en conclut que : • Lorsque l'on vit de la même façon, les différences s'estompent jusqu'à devenir presque invisibles. • A l'inverse, les inégalités s'aggravent lorsque les modes de vie diffèrent.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles