Quelle est la nature de l'oeuvre d'art ?

« « Nature » a deux sens en français, puisqu'on parle aussi de la « nature » d'une chose.

En fait, ces deux sens ont la même origine : nature vient du latin nascor, naître.

La nature d'une chose, c'est ce qu'elle était en quelque sorte « à la naissance », avant toute modification. Aristote définit la nature comme ce qui est à l'origine de son propre mouvement : contrairement à l'horloge qu'on doit remonter, la plante semble pousser « toute seule ».

En ce sens, la nature s'oppose aussi bien à la technique qu'à la culture, qui désignent les différents produits de l'action humaine. A.

Artiste et artisan • L'activité artistique est l'une des premières manifestations de la culture humaine.

Le mot art désigne, traditionnellement, toute technique qui résulte d'un apprentissage et permet de produire un résultat.

L'art du tailleur de pierre, du menuisier, de l'architecte ou du poète renvoie toujours à la maîtrise talentueuse d'un métier qui se donne à voir dans une production : une maison, une table, un poème par exemple. • Mais, chez les Grecs et les Romains, toute activité manuelle était dépréciée et réservée la plupart du temps aux esclaves.

De là vient la distinction entre les « arts mécaniques » qui visent l'utile, et les « arts libéraux », arts des hommes libres, comme l'étude de la philosophie, de la logique, de la musique, de la mathématique, etc. • Depuis le xviiie siècle, l'art relève de l'esthétique, science qui traite du beau et du sentiment que le beau fait naître en nous, et désigne ce qu'on nommait, à la Renaissance, les «beaux-arts ».

Dès lors, l'art apparaît comme un domaine particulier de l'activité humaine.

Les oeuvres d'art, uniques, se démarquent des productions artisanales et industrielles dont la finalité reste utilitaire. B.

Pourquoi l'activité artistique nous importe-t-elle ? • La création artistique nous importe car elle montre l'homme capable de se détacher de l'utilitaire pour créer « autre chose » – que certains appellent superflu – et cela dès l'origine de l'humanité.

On trouve des témoignages artistiques dans les grottes préhistoriques (les fresques des grottes de Lascaux, par exemple), et la façon dont les outils les plus anciens étaient taillés atteste d'un souci esthétique évident. • Les oeuvres d'art laissées par les civilisations sont ainsi des traces qui nous permettent de mieux appréhender ces cultures de l'intérieur.

Quelles étaient les préoccupations spirituelles de ces hommes ? Quelle était leur vision du monde ? Et pourquoi l'art concerne-t-il la philosophie ? L'art n'est pas une simple trace de l'histoire humaine mais il est aussi la manifestation d'aspirations métaphysiques. C.

Le besoin d'art • L'homme, en tant qu'être vivant, existe simplement, immédiatement, comme les choses de la nature.

Mais il est aussi un être conscient, capable de se donner une représentation de lui-même.

L'oeuvre d'art est un moyen par lequel l'homme extériorise ce qu'il est.

L'art apparaît comme l'expression d'un besoin essentiellement humain et universellement partagé, puisque nous avons vu qu'il est présent dès l'origine de l'humanité. • Grâce à ses productions artistiques, au sens étymologique, l'homme va transformer son environnement : le travail sur la matière va modifier la réalité extérieure.

Il laisse de cette façon sa marque, son empreinte, sur cette matière étrangère.

C'est pourquoi les oeuvres d'art sont le signe donné par certains hommes à d'autres hommes, à travers l'espace et le temps, signe que le superflu semble nécessaire.. »