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Peut-on parler de nature humaine identique en tout temps ?

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« La nature est au sens étymologique du terme( natus du verbe latin nascor : naître) l'état dans lequel naissent les hommes.

La nature désigne l'ensemble des caractéristiques d'un être, mais aussi tout ce qui, dans une réalité, est inné.

Parler de nature humaine, c'est donc faire référence à une essence qui, en nous, serait inné et donné, et non pas acquise.

De plus, il s'agit ici de savoir si cette essence, ces caractéristiques sont immuables, non susceptibles de transformation à travers l'évolution de l'humanité et le passage du temps.

Le problème se pose alors de savoir s'il existe une liberté humaine et si la culture peut agir sur les données innées.

Il semble indéniable qu'il existe des caractères fondamentaux de l'être humain, ne serait-ce que dans sa constitution physique. La nature humaine est l'essence universelle de l'homme, sa raison Le premier sens de nature du mot nature est celui du cadre physique.

La nature est cet environnement végétal qui nous entoure.

Mais en deuxième acceptation, celle qui s'applique ici, l'idée de nature désigne une essence universelle de l'homme, un ensemble de caractère permanents, identiques, permettant de la définir en tout temps et en tout lieu.

Ainsi l'homme serait un exemplaire particulier d'une "nature" ou d'une "essence".

Tous les individus en toutes civilisations relèveraient alors d'une même définition de base et possèderaient un même noyau. Toute la tradition philosophique depuis l'antiquité a essayé de distinguer le propre de l'homme et de ce fait essayer de lui trouver une nature commune et intemporelle.

En fait, le fond humain universel a souvent été identifié à la ratio, à la raison conçue comme identique chez tous les hommes.

Ainsi Schopenhauer affirme que les hommes et les animaux possèdent tous deux l'intelligence mais que seul l'homme est doté de raison, ce qui lui permet de voir le passé et l'avenir, alors que les animaux sont cantonnés au présent. Descartes, avant lui, aussi voyait dans l'homme le seul à être une substance pensante, la raison, la pensée. Pourtant n'existe-t-il pas des formes de raison et de pensée fort différentes? L'homme est ce qu'il fait Comparée à l'espèce animal, l'homme paraît inachevée, tant du point de vue anatomique( à la naissance les deux côtés du coeur ne sont pas séparés) que relativement aux comportements qui lui sont possibles.

L'animal naît avec des instincts qui programment ses réponses vitales.

Il n'existe rien de tel chez l'homme : pas même par exemple l'instinct maternel qui varie selon les sociétés.

C'est pour cela que l'homme doit tout acquérir, par la culture. La pensée contemporaine a remis en question les pouvoirs de la raison et son universalité.

Sartre a souligné qu'il y a, au moins, un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini : l'homme.

Ce dernier est indéfinissable et ne peut être enfermé dans un concept.

Sartre, dans l'existentialisme est un humanisme, souligne que quand je conçois un objet particulier, l'essence, c'est-à-dire ses caractéristiques et sa finalité sont connues de moi.

Mais, en ce qui concerne l'homme, on ne saurait parler de nature humaine puisqu'il n'y a pas de Dieu pour la concevoir.

En effet, si dieu n'existe pas, il n'y a pas de nature humaine donnée préalablement à l'existence. "L'homme est seulement tel qu'il se conçoit, mais tel qu'il se veut[...] l'homme n'est rein d'autre que ce qu'il fait." Une philosophie existentialiste se définit par le fait qu'elle pose l'existence avant l'essence et de la sorte définit la condition humaine.

Les objets matériels dérivent d'un concept, répondent à une finalité — ce à quoi l'objet va servir — et à un ensemble de règles techniques.

Pour tout ustensile, l'essence précède l'existence, et son existence ne vaut que dans la mesure où elle réalise l'essence, c'est-à-dire par rapport à l'idée qui a permis de la concevoir et de la produire. Dans la théologie traditionnelle, on voit en Dieu une sorte d'artisan supérieur qui a créé le monde et les hommes à partir d'une idée, d'un projet.

Lorsque Dieu crée, il sait au préalable ce qu'il crée.

Chaque individu réalise un certain concept contenu dans l'entendement divin.

Au xviiie siècle, au concept de Dieu a succédé le concept de nature humaine, chaque homme étant un exemplaire particulier d'un concept universel : l'Homme.

Du point de vue de l'idée ou de l'essence, c'est-à-dire dans le fond, tous les hommes sont semblables, quels que soient leur culture, leur époque ou leur statut social.

Pour l'existentialisme athée tel que l'a pensé Sartre, Dieu n'existe pas, il n'y a pas d'origine unique au monde, ni de référent suprême.

Il y a un donné d'origine : la réalité humaine, soit des individus qui d'abord existent avant de se définir par concepts.

On surgit dans le monde et l'on se pense ensuite.

Si l'homme est a priori indéfinissable, c'est qu'a priori il n'est rien tant qu'il ne s'est pas fait lui-même par un engagement dans le monde : "L'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait." La nature humaine comme base biologique est modelée par la culture Cependant l'existentialisme distingue nature et liberté radicalement.

L'idée de nature humaine n'est pourtant pas dépourvue de toute signification.

Elle ne renvoie plus de nos jours à une base biologique rendant compte de l'unité de l'homme, qu'à une forme de raison commune.

" Croire qu'on ne peut parler de l'homme qu'en excluant son être biologique est un délire." Edgar Morin L'idée de nature humaine est celle d'une essence biologique de l'homme, mais il nous faut concevoir cette nature de manière ouverte et non réductrice : c'est la culture qui actualise ces virtualités biologiques. En effet, pour Edgar Morin, l'homme a bien une base biologique mais tout ce qui fait de notre essence biologique s'accomplit par la voie de la culture.

Et il est impossible de dissocier ce qui relève de la nature de l'homme et de la culture.

Il faut dès lors concevoir que les deux s'entremêlent et évoluent. De même, si on revient sur la nature humaine comme raison, cette dernière a de multiples fonctions et donne à l'homme de multiples potentialités, possibilités.

Puisqu'elle n'est pas destinée à une seule tâche mais à de multiples, l'homme de par sa nature raisonnable et biologique, est donc libre d'accomplir de multiples projets différents. Il existe donc bien une nature humaine comprise comme base bio-anthropologique, mais il faut la concevoir de manière nonréductrice, comme une base modelée par la culture.

Dès lors, on ne peut pas dire que la nature humaine est identique en tout temps, elle est en effet susceptible d'évolution.

La nature humaine n'est pas un destin prédéterminé comme l'instinct animal, elle lui permet au contraire de construire sa vie comme il l'entend.. »

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