Peut-on justifier le droit par la force ?
Extrait du document
«
INTRODUCTION
L'homme, disait Aristote, est « un animal politique », c'est-à-dire un animal civique qui vit par nature dans la Cité
(polis, en grec – terme difficilement traduisible car ce n'est pas la cité = ville.
C'est plutôt l'État mais à une échelle
réduite.
Athènes, du temps des Grecs antiques était une Cité, au même titre que Thèbes, Sparte).
L'homme n'est
homme que lorsqu'il vit en société.
Là seulement il peut développer toutes ses facultés.
Mais sur quoi fonder
l'association des hommes ? sur la violence ? Que vaudra alors cette association fondée sur la force qui ne contient
par définition aucune détermination morale par laquelle le pouvoir qu'un homme exerce sur un autre se maintient et
se perpétue ? Que la force se fasse appeler droit ne change pas sa nature.
La raison, qui est le contraire de la
force, assurerait-elle mieux le pacte d'association ?
1.
Fonder le droit sur la force ?
• C'est la position de Hobbes (cf.
Léviathan) qui s'oppose à la tradition
aristotélicienne de l'homme naturellement social.
A l'état de nature « l'homme est un loup pour l'homme », c'est l'état de guerre
permanente.
Voilà comment vit l'homme avant de s'associer avec les autres
hommes.
Cette association permet à l'homme d'échapper à la peur constante
de la mort, à cet état d'insécurité qui règne naturellement.
Mais à l'état de
nature, j'ai le droit de faire tout ce que ma force me permet.
Comment alors
obéir ? suivre des lois ?
• Le droit sera fondé sur la force : « La force prime le droit.
» Comment ?
Hobbes distingue droit de nature et loi de nature.
Le droit de nature est « La
liberté qu'a chacun d'user comme il le veut de son pouvoir propre, pour la
préservation de sa propre nature, autrement dit de sa propre vie.
» Une loi de
nature « est un précepte, une règle générale, découverte par la raison, par
laquelle il est interdit aux gens de faire ce qui mène à la destruction de leur
vie.
On leur enlève le moyen de la préserver, et d'omettre ce par quoi ils
pensent qu'ils peuvent être le mieux préservés » ! (Léviathan).
• « Le droit consiste de faire une chose ou de s'en abstenir, alors que la loi
vous ..
détermine, et vous lie à l'un ou à l'autre ; de sorte que la loi et le droit
diffèrent exactement comme l'obligation et la liberté qui ne sauraient
coexister sur un seul et même point.
» (Idem).
Il n'y a donc qu'un seul moyen d'échapper à la solitude, à la misère, à la mort, lots de l'état de nature : le contrat,
par lequel chacun renonce à tous ses droits qu'il remet dans les mains d'un seul qui aura alors tous les pouvoirs.
Les
citoyens sont liés par contrat mais pas le souverain.
Son pouvoir est absolu, unique, indivisible.
Sa légitimité repose
sur la force, sur sa toute-puissance.
Il est au-dessus des lois qu'il fait.
En dehors de l'Etat, les hommes jouissent d'une liberté absolue.
Mais chacun disposant de la même liberté absolue,
tous sont exposés à subir des autres ce qui leur plaît.
La constitution d'une société civile et d'un État oblige à une
nécessaire limitation de la liberté : il n'en reste que ce qu'il faut pour vivre bien et vivre en paix.
Chacun perd de sa
liberté cette part qui pouvait le rendre redoutable pour autrui.
Dans l'état de nature, chacun jouissait d'un droit
illimité sur toutes choses, mais tous disposant du même droit, nul n'était assuré de ne rien posséder durablement.
L'État garantira la sécurité d'un droit de propriété limité.
Enfin, dans l'état de nature, chacun était exposé à la
menace d'autrui : il pouvait être à tout instant dépouillé de ses biens et tué.
Dans une société civile, seul le pouvoir
de l'État s'arroge ce droit.
Un Etat capable de protéger tous les citoyens de la violence des uns et des autres, de
garantir la sécurité de leurs corps et de leurs biens, de leur assurer la jouissance des fruits de leur travail, de faire
régner la paix, la civilité, le savoir et la sociabilité ne peut être que despotique.
Pour sortir les hommes de l'empire
des passions, de la guerre, de la crainte, de la pauvreté, de la solitude, de l'ignorance et de la férocité, l'État est
une puissance absolue, instituée en vue de la paix et de la sécurité.
"Quiconque a droit à la fin, a droit aux moyens."
Chaque homme ou assemblée investis de la souveraineté sont juges absolus de tous les moyens nécessaires pour
protéger ou garantir cette fin.
"Une doctrine incompatible avec la paix ne peut pas davantage être vraie, que la paix
et la concorde ne peuvent être contraires à la loi de nature." La seule manière d'ériger un État est que tous confient
leur pouvoir et leur force à un seul souverain (homme ou assemblée).
Toutes les volontés doivent être réduites à
une seule volonté.
L'État n'est pas un consensus ou une concorde, mais une unité réelle de tous en une seule et
même personne.
• C'est seulement parce que le souverain est omnipotent qu'il peut accomplir rationnellement sa fonction : l'ordre et
la paix.
Pour échapper à l'état de guerre permanente, un seul moyen pour Hobbes : un souverain ét un état toutpuissants.
« L'État a pour but de fabriquer l'homme qui ne se crée qu'artificiellement » écrit Raymond Potin.
« Let us
make man » : faisons l'homme.
Telle est la finalité de l'État, produit de l'art humain, qui arrache l'homme à son
animalité.
II.
« La force ne fait pas droit ».
»
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