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Peut-on imposer la vérité ?

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« Introduction : Kant l'a remarqué, il est de la nature de l'homme de se poser inlassablement des questions, de rechercher sans cesse la connaissance, d'atteindre la vérité.

Ce goût de l'homme pour la vérité est le moteur qui permet aux scientifiques de réaliser constamment des découvertes, aux penseurs d'élaborer de nouvelles théories, aux artistes de mettre continuellement au jour des créations inédites.

Si le souhait de chacun d'entre nous est d'avoir accès à la vérité, ceux qui la détiennent peuvent-ils cependant l'imposer ? Imposer quelque chose, c'est le poser devant quelqu'un de manière à ce qu'il ne voit plus que cela.

Imposer la vérité, c'est donc livrer la vérité à autrui pour le détourner de l'erreur, de l'illusion, du mensonge.

Imposer la vérité, c'est forcer l'adhésion d'autrui en l'obligeant à accepter la vérité qu'on lui inflige.

Réfléchir sur notre pouvoir d'imposer la vérité, c'est d'une part s'interroger sur la nature de la vérité et la possibilité de sa donation, d'autre part, la question du pouvoir questionne notre capacité à imposer la vérité, et par conséquent notre faculté à s'approprier la vérité et à la communiquer à autrui, enfin, sur le consentement de chacun à recevoir une vérité imposée, et à l'admettre. 1ère partie : La vérité n'est pas toujours bien accueillie. -Nous l'expérimentons dans notre vie quotidienne, nous ne sommes pas toujours prêt à entendre la vérité.

La vérité blesse, la vérité dérange, et la perturbation qu'elle provoque peut entraîner le refus catégorique de cette vérité qu'on ne saurait tolérer.

C'est ainsi que l'homme cherche à reconquérir la femme qui l'a quitté, se persuadant qu'elle l'aime encore quand toutes les preuves sont réunies pour prouver le contraire. - Ce que l'on sait ne consiste bien souvent qu'en opinions, idées reçues et préjugés, qui sont bien loin de la vérité.

L'allégorie de la caverne racontée par Platon dans La République (livre VII) dénonce les méfaits de cette situation où l'homme se contente de croire à ce qu'il voit et pense détenir le savoir alors qu'il n'en est qu'un pâle reflet.

Les hommes sont enfermés dans une caverne, qui représente le monde des préjugés et de la confiance naïve, et ignorent que ce qu'il voient autour d'eux ne sont que les ombres projetées des réalités extérieures.

Ils pensent connaître la vérité, alors que tout leur est caché.

Mais si on contraint l'un d'entre eux à sortir de la caverne, pour l'exposer à la lumière de la vérité, alors cet homme souffrirait de cet éblouissement si vif et refuserait de prendre pour vrai ce qu'il ne reconnaît plus.

Ainsi, même si on cherche à imposer la vérité, il est difficile de convaincre ceux qui sont dans l'illusion. -Il est douloureux d'admettre la vérité et l'on préfère se consoler en se berçant d'illusion.

Si le rêve est plus doux que la réalité, c'est que le rêve est une fausse réalité où seuls nos désirs s'imposent, tandis que dans la réalité, la vérité risque de s'imposer à nous sans notre volonté. -Le philosophe empirique David Hume a compris que l'homme était naturellement enclin à croire ce qui le flatte, ce qui l'arrange et le satisfait, et que cette disposition le conduisait à accepter de fausses propositions plutôt que la vérité, lorsqu'elle va à l'encontre de ses vœux.

Ainsi, alors que Copernic à découvert que la terre tournait autour du soleil et n'était pas au centre de l'univers, les hommes ont continué à prétendre le contraire, et ne se sont pas laissés imposer cette vérité qui contrevenait à leur amour-propre. 2ème partie : On peut imposer la vérité car elle se démontre. -On peut penser que la vérité peut être imposé, dans la mesure où elle se démontre. Pour Descartes, il y a une méthode indubitable d'accéder à la vérité, et à laquelle on ne peut que se soumettre. Ainsi, pour Descartes, la seule certitude première et indubitable est « cogito ergo sum » (en latin : « je pense donc je suis »).

Ce n'est donc que sur cette certitude que l'homme peut se prononcer en toute légitimité.

Il faut faire table rase et refuser toutes les opinions ou certitudes passées car il se pourrait que tout ce que l'on pense être vrai ne soit que l'œuvre d'un malin génie qui nous ferait passer pour vrai ce qui n'est qu'illusion (ex : je peux croire avoir un corps alors que je n'en ai pas, croire qu'il y a un monde alors qu'il n'y en a pas…).

Pour toute autre affirmation, il faut pratiquer le doute.

La méthode cartésienne est en effet de considérer comme absolument faux « tout ce en quoi je pourrait imaginer le moindre doute ».

Pour Descartes, il faut que la vérité s'impose avec évidence dans notre esprit, de façon claire et distincte, sans qu'elle ne découle d'autres idées qui ne seraient pas vérifiées.

Il s'agit donc de procéder par démonstration, d'évidences en évidence, pour être certain de la légitimité de notre savoir. On est donc en mesure d'imposer la vérité lorsqu'on l'a acquise par une démonstration évidente que l'on peut reconstituer, car alors la rigueur de la démonstration force notre esprit à accepter ce qui est irréfutable. 3ème partie : La vérité s'impose d'elle-même. -On peut penser qu'il est de la nature de la vérité de s'imposer d'elle-même, et qu'alors il n'est plus de notre ressort de chercher à l'imposer. -Ainsi, pour fonder sa méthode, Descartes admet l'existence de principes premiers qui n'ont pas besoin d'être démontrés, mais apparaissent cependant dans notre esprit de façon claire et distincte, comme des évidences.

Le cogito est le paradigme de cette certitude première et indubitable qui s'impose à nous par elle-même. -De la même manière pour le philosophe et théologien Pascal, la foi du chrétien n'est pas démontrable, mais s'insère dans le cœur de l'homme comme une vérité qui le transforme complètement.

C'est parce que la foi passe par le cœur et non par la raison qu'il est impossible pour quiconque de convertir un athée, car on ne peut lui imposer une vérité qui n'est donnée que par Dieu seul.

Il établit une analogie avec les vérités géométriques, qui peuvent relever comme en religion d'un caractère indémontrable, et qui pourtant sont admises par tous. Conclusion : Admettre que l'on peut imposer la vérité ce serait refuser de voir la faiblesse de l'homme, dont l'exigence de vérité n'est pas toujours suffisante à supplanter son désir de volupté.

La vérité, quand on cherche à l'imposer, se heurte à l'illusion dans laquelle l'homme se maintient ; et la souffrance qu'elle est susceptible d'entraîner nous amène bien souvent sacrifier la vérité au principe de plaisir.

Certes, certaines vérités peuvent être imposées, quand la raison reprend ses droits et ne peut que s'incliner devant une démonstration rigoureuse et indubitable.

Finalement, d'autres vérités ne peuvent être imposées par quiconque de part leur nature même d'indémontrable, et pourtant elles s'imposent avec force à notre esprit.

Si la vérité peut s'imposer, il n'est pas en notre pouvoir de l'imposer toute entière, de celle que l'on refuse quand on la donne à celle qui ne se donne que par elle-même.. »

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