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Peut-on en toute rigueur parler des "miracles" de la technique ?

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« Vocabulaire: TECHNIQUE Tout ensemble de procédés pour produire un résultat utile.

La technique moderne s'appuie sur la science; mais elle s'en distingue puisque la science est un effort pour expliquer ce qui existe tandis que la technique cherche à produire ce qu'on souhaite qui soit — qui n'est pas.

La technique peut se définir comme un vouloir, incarné en un pouvoir par l'intermédiaire d'un savoir. Comme adjectif: par opposition à esthétique, qui concerne des procédés susceptibles d'être développés et transmis, et non des dons ou capacités innées. L'idée selon laquelle la technique (il vaudrait mieux dire : les techniques) réaliserait des miracles est aujourd'hui bien banale; c'est un lieu commun journalistique, qui tend d'ailleurs depuis quelque temps à s'effacer devant la dénonciation des méfaits du progrès technique (pollution, nuisances). La banalité certaine de cette idée n'enlève toutefois rien à sa force dans l'opinion courante, prompte à s'étonner de cet "étonnement imbécile" dont parlait Spinoza - devant une découverte de l'intelligence humaine, ou tout simplement devant l'application d'une loi naturelle.

Il suffit souvent d'un peu d'ignorance ou de crédulité pour voir un miracle là où il n'y a en fait que connaissance et travail. Mais le problème est plus profond : puisque le mot "miracle" est incontestablement chargé d'un sens religieux, ne doit-on pas dire que nous avons face aux diverses techniques une attitude proprement religieuse, avec toutes les conséquences que cela implique (nouveaux dieux, prêtres, prières, etc.) ? Le cas de la médecine serait certainement intéressant, et vraisemblablement pas unique. Quoi qu'il en soit, il faut commencer par examiner en quel sens on peut habituellement dire que la technique réalise des miracles. On appelle technique toute activité qui se donne pour but de créer des objets n'existant pas dans la nature, ou de produire des effets ne se réalisant pas naturellement.

La technique en général est donc l'activité humaine visant à faire de l'artificiel ; il faut toutefois observer qu'il est aussi peu légitime de parler de "la technique en général" que de dire "la science" ; il n'existe que des techniques, différentes par leurs procédés, leurs objectifs, et justement par les sciences sur lesquelles elles s'appuient.

L'importance de cette remarque ne pourra apparaître que plus loin. Les techniques ne se confondent donc pas avec les sciences, qui ne visent pas à créer, mais à connaître la réalité. Néanmoins, il est certain que les unes entretiennent avec les autres des rapports étroits, qui ne se limitent pas d'ailleurs à une, simple application des sciences dans les techniques. Considérons maintenant le miracle en son sens propre, qui est le sens religieux ; le mot a en effet un sens figuré, atténué, lorsqu'il désigne un événement hautement improbable ou simplement inattendu : sortir indemne d'un accident grave.

ou se relever rapidement d'une crise ("miracle allemand").

En son sens plein, le miracle est un événement heureux inexplicable par des causes naturelles, l'explication étant généralement renvoyée à une puissance divine.

Par définition, la technique faisant ce que justement la nature ne fait pas, on peut à bon droit qualifier les productions techniques de miracles.

d'autant que la technique se donne généralement pour but la création d'objets ou d'effets propres à assurer le bonheur de l'homme. Il ne faut pas chercher ailleurs ce qui rend possible la croyance commune aux miracles de la technique : la technique est un pouvoir de réaliser ce que la nature ne donne pas.

Reste que les mécanismes de cette croyance sont autrement plus complexes.. »

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