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PASCAL: «Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point...»

Extrait du document

« L'imagination est la plus grande puissance d'erreur qui se puisse trouver en l'homme, et dont il ne peut se défaire.

Si elle était toujours fausse, il suffirait d'en prendre le contre-pied pour trouver la vérité, mais nous ne savons jamais si ce qu'elle nous représente est réel ou irréel.

N'étant pas la règle infaillible du mensonge, elle ne peut l'être de la vérité.

Elle représente le vrai et le faux avec la même indifférence.

Sa puissance de persuasion est infinie, même auprès des hommes les plus sages et les plus raisonnables.

Elle emporte l'assentiment par surprise et sans difficulté.

Les plus beaux discours de la rhétorique ne sont pas ceux qui parlent à notre raison mais à notre coeur.

La raison calcule, soupèse, compare, mesure, établit des rapports, mais elle est incapable de "mettre le prix aux choses".

C'est l'imagination qui nous fait estimer, blâmer, aimer ou détester, et non pas la raison dont elle se joue sans efforts.

L'imagination a produit en l'homme une seconde nature : "Elle remplit ses hôtes d'une satisfaction bien autrement pleine et entière que la raison."La foi se passe de la raison. «Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point [...] C'est le coeur qui sent Dieu et non la raison.

Voilà ce que c'est que la foi.» Pascal, Pensées (1670). • Pascal distingue deux modes de connaissance.

La raison «connaît» sur le mode conceptuel et argumentatif, comme dans les mathématiques.

Mais Dieu échappe à ce mode de connaissance.

Il serait vain, pour Pascal, de prétendre en démontrer l'existence.

C'est le coeur qui «sent» Dieu.

La foi est donc une connaissance immédiate et trop subtile pour pouvoir être argumentée. • La raison peut néanmoins être mise au service de la foi, de façon indirecte: c'est la célèbre théorie du «pari» pascalien, visant à convertir les incroyants.

II montre que l'homme a beaucoup à gagner en croyant, et, réciproquement qu'il n'a rien à gagner en en croyant pas.

Il est donc, en pratique, raisonnable de croire en Dieu, même si ce n'est pas rationnel, et n'a pas besoin de l'être. Le plus souvent, avoir raison, c'est s'imaginer que l'on dispose d'une opinion certaine ou que l'on peut l'imposer par la persuasion ou la force : " avoir le dernier mot ".

Mais une telle conviction apparaît vite comme peu solide et nous conduit au relativisme : chacun a raison s'il croit avoir raison.

D'où la tentation de chercher dans la sensation un critère plus fiable de la vérité.

Hélas la sensibilité ne nous permet pas davantage d'échapper au relativisme.

En tout ceci, la raison risque de prendre l'apparence d'une opinion parmi d'autres.

Toutefois, comme en science, l'idée de prouver ou de démontrer peut nous sauver de l'incertitude, bien que là encore le vrai puisse souvent devenir faux. Les données sensibles, plus immédiates et passives, permettent d'appliquer des raisonnements par induction dont la pertinence logique est tout aussi incertaine que ceux de la déduction.

Ce qui nous fait soupçonner que les erreurs des sens pourraient parfois être des illusions de la raison elle-même.

Cette dernière n'est-elle qu'un artifice ? Passer de l'idée d'avoir raison à la raison met en lumière l'importance de l'activité proprement argumentative de la raison.

On peut en gros distinguer trois acceptions principales du mot raison : 1) la raison est la faculté qui nous rend capable de réfléchir, de penser, de raisonner.

2) Elle est le motif d'une action,l'argument d'une idée, ou la cause d'un fait.

3) « Raison apparaît enfin dans « avoir raison «, qui indique une conformité — du reste assez problématique — entre le sentiment de certitude et la vérité. On peut penser que la raison laisse échapper tout un domaine de la vie humaine : celui de la conscience esthétique, et plus généralement la vie affective et les sentiments.

D'autre part la raison est conditionnée par divers éléments culturels et éducatifs qu'elle ne sait plus interroger.

Mais peut-elle faire l'économie de l'acceptation, de la confiance a priori, de l'acte de foi, et tout remettre en question ? La raison peut toutefois s'efforcer de mettre sous son pouvoir, sous sa juridiction, les autres facettes du psychisme.

La question reste de savoir si une maîtrise rationnelle constitue pour l'homme un asservissement ou une libération.

Une telle prétention est-elle bien raisonnable ? Qu'il soit question d'un exemple ou d'une idée, il s'agit de raisonner, d'approfondir pour COMPRENDRE / EXPLIQUER et justifier nos pensées.

Toutefois la raison ne semble pas nous mettre à l'abri des contradictions.

Celles-ci proviennentelles des choses, ou serait-ce la raison elle-même qui les introduit en elles ? La raison contredit-elle les données de la sensation ou se contredit-elle elle-même ? Le cas par cas du sensible doit-il primer sur l'universalité de la raison ? Si la raison semble fiable en géométrie, est-elle valable dans tous les domaines ? Sur ces dilemmes repose le conflit entre pratique et théorie.

Mais même si c'était la pensée seule qui était contradictoire, faudrait-il pour autant renoncer à raisonner ? La fonction de la raison ne se limite pas à son pouvoir de connaissance, elle a aussi un usage pratique, c'est-à-dire qu'elle énonce également des règles de conduite, valables pour l'action.

On l'oppose à la sensibilité, mais cette dernière nous fournit aussi des éléments utilisables pour régir nos comportements.

Des jugements sont portés, fondés sur des rapports établis par la raison ou l'expérience, qui déterminent entre autres le bien et le mal, le vrai et le faux.

La raison intervient également dans le domaine esthétique : elle se combine avec la sensation pour constituer notre expérience de la beauté.

Mais si la raison est présente dans le monde, si elle en est la cohérence, mieux vaut se méfier de son apparente toute-puissance.

Pour cela il s'agit de mieux la connaître et de la mettre en oeuvre.. »

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