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Parler nous donne-t-il du pouvoir ?

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« Corrigé envoyé par [email protected] Parler semble d'abord avoir pour fonction de communiquer avec les autres, de leur faire part de nos opinions, de nos sentiments, de nos émotions...La parole apparaît donc, dans un premier temps comme un moyen, un instrument, toutefois, comme moyen, elle peut servir à persuader les autres, à les influencer.

Pensez ici tout simplement à l'adage qui dit « Qui ne dit mot consent » signifie que celui qui ne dit rien, qui ne prend pas la parole manifeste, par défaut son accord.

Au contraire, on dit bien « prendre la parole », signifiant que la parole est quelque chose qu'on s'approprie, dont on prend possession.

Cette prise de possession est-elle alors toujours synonyme de pouvoir ? Vous pouvez donc commencer simplement par vous demander ce qu'apporte la parole à celui qui parle.

Ici, vous pouvez, par exemple, penser aux analyses de Descartes lorsqu'il montre que seuls les être dotés de raison parlent alors que les animaux ne parlent pas.

Parler ne consiste donc pas simplement à émettre un son, la parole est le témoin, la manifestation d'une capacité à faire un certain usage de sa raison.

Dès lors, s'il y a un tel rapport entre la parole et la raison, on peut penser que la parole manifeste une certaine capacité à réfléchir, à se mettre à distance et à ne pas simplement subir.

Mieux encore, il semblerait alors que celui qui manie la parole peut manier la pensée.

Ici, vous pouvez penser aux analyses de Platon lorsqu'il parle de la rhétorique et qu'il opère une critique du langage comme instrument de persuasion.

Vous pouvez alors montrer ici en quoi la parole peut devenir un instrument de pouvoir. Montrez, par exemple, en quoi certains régimes politiques s'attachent à réduire leurs opposants au silence.

Vous pouvez, dans une même perspective, penser à toutes les entreprises de persuasion tout comme vous pouvez montrer en quoi une bonne maîtrise de la parole donne un ascendant sur les autres.

On évoquera alors simplement le « beau parleur » pour désigner celui qui séduit, enrôle.

Pourtant suffit-il de prendre la parole pour prendre le pouvoir ? Peut-être s'agit-il avant tout de distinguer celui qui sait user de la parole de celui qui parle pour ne rien dire.

En ce sens, demandez-vous si l'usage de la parole ne peut pas relever d'un art. Pouvoir du langage & langage du pouvoir. Puisqu'il a pour fonction essentielle l'expression de la pensée et la communication entre les hommes, il est clair que le langage joue un rôle éminent dans les phénomènes de pouvoir.

Il permet ou facilite l'action; il l'interdit ou la sanctionne; le droit se dit et s'écrit et ceux qui dirigent la Cité exercent leur fonction par l'intermédiaire du langage, tout comme ils sont attentifs à en capter les signes. Dans toutes les sociétés, les titulaires du pouvoir ont possédé la maîtrise du langage ou des langages propres à orienter l'action d'autrui.

Ceux-là sont détenteurs de ce "maître-mot" que Kipling attribuait dans la jungle à l'enflant démuni mais qui finirait par s'emparer de la fleur rouge.

Prêtres et scribes, pontifes et rois, légistes et avocats, journalistes et hommes des médias connaissent tour à tour cette puissance.

L'agora d'Athènes était le lieu de disputes, de collusions oratoires.

De même, Dieu se manifeste par cet acte de langage: " Au commencement était le Verbe" disait déjà Saint-Jean. Dans les sociétés complexes, le langage est l'expression du pouvoir.

A tel point que le fait de nommer, de qualifier un Pouvoir, lui donne sa cohérence, sinon son existence: qui dit monarchie se met en mesure d'élaborer le système monarchique, formule la série des concepts qui se trouvent mis dans la langue. Toutes les institutions majeures ont pour rôle de tester et d'élaborer le langage du Pouvoir.

L'un des privilèges les plus incontestables du milieu dirigeant est précisément de conserver la langue.

Le langage de la culture se confond avec celui de la classe dirigeante.

Les faits langagiers montrent la capacité "performative" des classes dirigeantes.

Et, le propre de ces dernières est d'éviter ou d'intégrer la "gheottisation" du langage: culture jeune (BD, musique, expressions "branchées"...).

Dès lors, si le pouvoir manifeste son emprise sur le langage, ce dernier à son tour influence le Pouvoir, à tel point que l'évolution des phénomènes langagiers a une signification historique et politique considérable: l'invasion du franglais traduit ainsi notre infériorité à l'égard de l'Amérique anglophone, lorsque la France était puissante, on parlait français à Saint-Pétersbourg.

De même, à la limite, on obtient le phénomène de la langue de bois qui est une conséquence de la glaciation du langage et/ou de la glaciation du Pouvoir. Aussi, il faut bien qu'un jour, change ce langage jugé rétrograde.

Et, la révolution se manifeste aussi par un acte de langage.

La prise du pouvoir ne s'accompagne pas par hasard de déclarations solennelles, de thèses ou de profession de foi. En bref, on peut dire que le rêve de puissance est un rêve de langage.

Il fonde et manifeste le Pouvoir et celui-ci s'exerce par celui-la.. »

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